FranceMalgré la fronde, Geoffroy Lejeune prendra la tête du «JDD» le 1er août
Alors que les journalistes du «Journal du Dimanche» sont en grève depuis plus d’un mois, le groupe Lagardère a annoncé que Geoffroy Lejeune prendrait la tête du «JDD» le 1er août.
Le groupe Lagardère, propriétaire du JDD, reste inflexible en dépit d’une grève inédite de plus d’un mois des journalistes: Geoffroy Lejeune (ex-Valeurs actuelles) «prendra la direction effective de la rédaction» à partir du 1er août.
Lagardère News regrette lundi soir, dans un communiqué, «la position de la Société des journalistes (SDJ), qui ne semble pas avoir pris en compte les ouvertures proposées» et a «conduit à une rupture des négociations, qui est préjudiciable tant aux journalistes qu’aux lecteurs du Journal du Dimanche».
L’annonce de la date de l’arrivée effective de Geoffroy Lejeune, marqué à l’extrême droite, survient alors que la rédaction du JDD a massivement reconduit jusqu’à mardi matin sa grève contre l’arrivée à sa tête de ce journaliste.
«Nous diviser»
«Certes, ça fait peur de voir un tel aveuglement, mais que l’on reste conscient que cela reste une manœuvre pour nous diviser, tenter d’attaquer notre détermination», a déclaré à l’AFP un journaliste gréviste, souhaitant rester anonyme. Ce même gréviste «ne pense pas» que la direction du JDD parviendra à diviser les opposants à l’arrivée de Geoffroy Lejeune avec cette stratégie.
Arnaud Lagardère, patron du groupe propriétaire du JDD, «déplore» lundi «cette issue» – la rupture des négociations, imputée à la SDJ – dans le même communiqué. «Je le redis, nous ne ferons pas du JDD un tract idéologique ni un journal militant», assure-t-il. «Ce fantasme de l’extrême droite est infondé et méprisant. Le JDD restera une publication d’information généraliste, grand public et ouverte à tous les courants de pensée», conclut-il.
De son côté, la rédaction de l’hebdomadaire dominical avait souligné sa «mobilisation sans faille» face à une «rupture totale avec l’identité d’un journal vieux de 75 ans», samedi en début d’après-midi, au moment de la reconduction de la grève jusqu’à mardi. La rédaction réitérait ses demandes, restant opposée à l’arrivée de Geoffroy Lejeune et réclamant des garanties d’indépendance juridique et éditoriale.
L’ombre de Vincent Bolloré
Soutien d’Eric Zemmour à l’élection présidentielle, Geoffroy Lejeune, 34 ans, doit succéder à Jérôme Béglé, attendu le 1er août à la tête de Paris Match. Il n’a pas encore pu rencontrer la rédaction, ni voir comment elle fonctionnait.
Beaucoup d’observateurs voient dans sa nomination la main du milliardaire Vincent Bolloré, dont le groupe Vivendi doit avaler Lagardère, propriétaire du JDD, de Paris Match et d’Europe 1, après une offre publique d’achat réussie. Le mouvement en cours est inédit dans l’histoire du JDD: sa précédente grève, en 2016, n’avait touché qu’un seul dimanche. Cela fait désormais cinq week-ends que le journal n’est pas paru.
La situation du JDD rappelle ainsi les grèves d’Europe 1 en 2021 et d’i-Télé (devenu CNews, propriété de Vivendi) en 2016, conclues à chaque fois par des départs massifs. De quoi remettre à l’agenda politique la question de l’indépendance des médias. Des députés de huit groupes politiques (hors RN et LR) ont notamment présenté mercredi une proposition de loi sur le sujet, tandis que l’Élysée a officialisé le lancement en septembre d’États généraux de l’information, attendus depuis un an.
Le coût de la grève pèse déjà lourd pour le JDD: chaque non-parution du journal entraînerait 500’000 euros de pertes, d’après un chiffre dévoilé par le quotidien Le Monde et évoqué par «une membre de la régie publicitaire en tout début de mobilisation», a dit vendredi à l’AFP le journaliste du JDD Guillaume Caire.