Qatar 2022: Raphaël Guerreiro, porte-drapeau de toute une diaspora

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Qatar 2022Raphaël Guerreiro, le digne représentant des «emigrantes»

Le franco-portugais de 28 ans, devenu un pilier de la Seleçao qui s’apprête à affronter le Maroc en quart de finale de la Coupe du monde, se présente aujourd'hui comme le porte-drapeau de toute une communauté, celle de la diaspora portugaise, en France comme en Suisse.

Jonathan Amorim Machado
par
Jonathan Amorim Machado
Buteur contre la Suisse, Raphaël Guerreiro, né en France, occupe le couloir gauche de la défense portugaise lors de cette Coupe du monde

Buteur contre la Suisse, Raphaël Guerreiro, né en France, occupe le couloir gauche de la défense portugaise lors de cette Coupe du monde

AFP

Suite au large succès mardi soir du Portugal face à la Suisse, c'est logiquement le francophone Raphaël Guerreiro qui s'est présenté au micro de la RTS pour débriefer du match. Issu d’une famille franco-portugaise, il est devenu le symbole de toute une communauté : celle des millions de personnes aux origines lusitaniennes vivant en France ou en Suisse romande. Fils, filles, petits-fils ou petites-filles de la première vague d'émigration vers l’Europe centrale, cette diaspora nourrit une passion et un amour inconditionnel envers son pays d'origine. Un phénomène que Victor Pereira, enseignant-chercheur en histoire à l’université de Pau en France, expliquait en 2016 pour «So foot» comme une forme de loyauté envers le clan familial, très important dans la culture portugaise. Depuis 2014, cette communauté peut compter sur l'un des siens en équipe nationale : Raphaël Guerreiro, né le 22 décembre 1993 en Seine Saint-Denis d'un père portugais et d'une mère française. C’est en banlieue parisienne que Raphaël tape dans ses premiers ballons, à Blanc-Mesnil avant de rejoindre le JA Drancy puis l’INF Clairefontaine avant de terminer sa formation en Normandie, à Caen où il devient professionnel avant de prendre la direction de Lorient, en Bretagne. Un parcours loin de Lisbonne et de Porto mais avec le Portugal toujours dans un coin de la tête.

S'il y a de quoi s'identifier à l'actuel latéral du Borussia Dortmund, c'est que le parcours de vie privé du natif du 93 est similaire à celui de millions d’autres. Dans un entretien pour Eurosport en 2014, Raphaël Guerreiro expliquait déjà ses attaches au Portugal, citant son enfance et les traditionnelles vacances estivales au pays : «Depuis que je suis tout petit, j’ai toujours préféré le Portugal à la France. Dans ma famille, c’est comme ça. Mes frères, c’est pareil. Avant que je rejoigne Caen, nous allions tous les ans en vacances près de Faro.» Un attachement qui se prolonge à la maison où le petit Raphäel hérite du benficisma de son père, contrairement à ses frères qui choisissent Sporting et Porto : «Lorsque je partais en vacances au Portugal, j’étais toujours avec mon maillot du Benfica. C’est le club que je soutiens depuis mon enfance», avouait-il au journal portugais A Bola en janvier 2017.

Cette double identité et cette jeunesse vécue au rythme des allers-retours entre Paris et le Portugal font grandir en Raphaël le rêve de jouer pour son club de coeur. En 2017, toujours pour A Bola, il affirmait encore :«Ce serait un rêve de jouer à Benfica, c’est mon équipe. Je ne sais pas si ça sera possible, car actuellement, je suis à Dortmund et je ne pense pas à partir, car je suis vraiment heureux ici.» Une idylle similaire à celle de millions de jeunes benficistas en région parisienne ou plus proche, dans nos villes et villages romands. Grâce à Raphaël, l'autre rêve ultime, celui de la Seleçao parait également moins inaccessible surtout que la fédération portugaise a des yeux partout. Depuis plusieurs années, elle a tissé un réseau dans toute l'Europe avec des recruteurs qui écument les pelouses françaises, suisses ou encore allemandes à la recherche du prochain Raphaël Guerreiro.

Raphaël a marqué son premier but en Coupe du monde mardi contre la Suisse

Raphaël a marqué son premier but en Coupe du monde mardi contre la Suisse

AFP

L’ancien joueur de Lorient compte 60 sélections en équipe nationale pour 4 buts, le dernier mardi soir contre la Suisse. Il est aujourd’hui l’un des piliers de l’équipe nationale. Raphaël est surtout la plus grande réussite d’un homme, Olivier Feliz. Le franco-portugais est le cerveau derrière le projet de la FPF autour de sa diaspora en France. Un travail de détection qui s’étend désormais en Suisse. Pour le blog franco-portugais trivela.fr, Olivier Feliz expliquait les raisons de ce succès : «Il y a 95% de jeunes franco-portugais qui te disent « moi, c’est la Seleção ». Quand tu les abordes, ils te disent généralement que leur rêve, c’est de représenter le Portugal. Ils sont nés devant la Sport TV, les Benfica – Porto, la Seleção… Quand tu vois ton papa qui regarde Benfica, Porto, Sporting, tu penches pour ça toi aussi, c’est naturel. L’inverse peut arriver, mais c’est rare.» Observé par Olivier et ses recruteurs depuis ses 14 ans, Raphaël Guerreiro est le premier joueur issu de la diaspora portugaise en France à réellement s’être imposé avec le Portugal. Il a été accompagné pendant de longues années par le gardien de l’Olympique Lyonnais Anthony Lopes, aujourd’hui barré par la concurrence. Une concurrence que semble avaler depuis 2014 l’actuel numéro 5 de la Seleçao. Avec la récente explosion du Parisien Nuno Mendes, l’avenir du joueur de Dortmund en sélection semble toutefois s’écrire dans un rôle de doublure. Profitant actuellement de la blessure du joueur du PSG, le latéral s’éclate au Qatar, avec déjà deux passes décisives et un but. Ses qualités de projection et sa vitesse explosent également aux yeux du monde. Une forme de reconnaissance pour l’un des meilleurs soldats de Fernando Santos depuis sa nomination en 2014. 

Samedi, Raphäel disputera pour la première fois de sa carrière un quart de finale de Coupe du monde, face au Maroc. Un match qui fera vibrer tout un peuple de Lisbonne à Porto en passant par le 93, Lausanne ou Genève.

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