BangladeshLe héros de l’indépendance mérite mieux que du pain
Au Bangladesh, pour le centenaire de la naissance du héros de l’indépendance, deux hommes avaient servi de vulgaires morceaux de pain au lieu d’un gâteau. En guise de punition, ils liront ses œuvres.

En 2018, le Bangladesh a adopté une loi sur la sécurité numérique pour chercher à faire taire les critiques à l’égard de l’équipe ministérielle de l’actuelle cheffe du gouvernement et fille du héros de l’indépendance, Sheikh Hasina (ici avec l’équipe nationale de cricket).
AFPEn 2020, pendant les célébrations du centenaire de Sheikh Mujibur Rahman, héros de l’indépendance du Bangladesh, deux enseignants avaient organisé une petite fête, diffusée en direct sur Facebook depuis un séminaire islamique dans le nord-ouest du pays, a expliqué la procureure Ismat Ara Begum. «Ils ont coupé du pain de dix takas (douze centimes, ndlr) pour l’occasion et distribué les morceaux d’un air moqueur à plusieurs étudiants.»
Un responsable du parti au pouvoir, la Ligue Awami, avait porté plainte en vertu d’une loi de 2018, qui criminalise la «propagande» contre la guerre d’indépendance du pays de 1971 (et sa séparation avec le Pakistan), son hymne national, son drapeau et Sheikh Mujibur Rahman, père de la nation et de l’actuelle Première ministre.
Vingt arbres à planter et une autobiographie inachevée à lire
Mardi, les deux hommes ont été jugés coupables et ont reçu l’ordre de lire trois livres de Sheikh Mujibur Rahman, ainsi que son autobiographie inachevée, à titre de «punition avec mise à l’épreuve», a précisé la procureure. Le tribunal les a également condamnés à planter chacun vingt arbres et à enseigner à leurs élèves l’histoire de la guerre d’indépendance du Bangladesh, en 1971.
«Je n’avais pas pensé que notre manque de moyens allait offenser quelqu’un. Sinon, nous ne l’aurions jamais diffusé en direct sur Facebook.»
Contacté, Abdus Salam, l’un des deux hommes, a nié toute intention moqueuse. «Nous avions auparavant organisé des prières en son nom. Mais lorsque les élèves ont voulu le célébrer, nous n’avons trouvé que du pain, car nous vivons dans un village reculé, où il est impossible de trouver instantanément des gâteaux de bonne qualité», a raconté l’homme de 57 ans.
«Je n’avais pas pensé que notre manque de moyens allait offenser quelqu’un. Sinon, nous ne l’aurions jamais diffusé en direct sur Facebook. Ce n’était pas intentionnel, et nous avons présenté des excuses au tribunal», a-t-il ajouté.
Deux mille plaintes en trois ans
Le Bangladesh a adopté une loi sur la sécurité numérique en 2018, dénoncée par les partis d’opposition, les médias et les groupes de défense des droits de l’homme, pour chercher à faire taire les critiques à l’égard de l’équipe ministérielle de l’actuelle cheffe du gouvernement, Sheikh Hasina. Selon Amnesty international, plus de 2000 plaintes ont été déposées au titre de cette loi depuis sa promulgation, principalement par des membres du parti au pouvoir.