États-UnisPrison à vie pour l’un des «Beatles» du groupe État islamique
El Shafee el-Sheikh est le troisième membre des «Beatles» de l’État islamique à être condamné à la prison à perpétuité.
L’un des membres des «Beatles» du groupe djihadiste État islamique (EI), une cellule spécialisée dans la capture, la torture et l’exécution d’otages occidentaux en Syrie, a été condamné vendredi à la prison à vie par un tribunal américain.
El Shafee el-Sheikh, 34 ans, portant une barbe, de larges lunettes et un masque noir, est resté impassible à l’annonce de la sentence dans un tribunal d’Alexandria, près de la capitale Washington. Ce qu’à fait El Shafee el-Sheikh «ne peut être décrit que comme horrible, barbare, brutal, cruel et, bien sûr, criminel», a déclaré le juge fédéral T.S. Ellis, tout en énonçant sa décision: huit peines de prison à perpétuité simultanées pour le meurtre de quatre Américains.
Ses avocats ont indiqué son intention de faire appel et demandé à ce qu’il ne soit pas envoyé dans la prison de haute sécurité à Florence, dans le Colorado (ouest), ce que le juge a refusé. El Shafee el-Sheikh avait été arrêté par les forces kurdes syriennes en 2018. Il a depuis été déclaré coupable en avril par un jury populaire, à l’issue d’un procès éprouvant qui avait exposé le sadisme des «Beatles» au grand jour.
Pas une première
Un jury de 12 personnes avait délibéré moins de six heures sur deux jours avant de le déclarer coupable pour son rôle dans la mort des journalistes James Foley et Steven Sotloff ainsi que les travailleurs humanitaires Peter Kassig et Kayla Mueller.
«Ce procès a révélé les crimes atroces contre les droits humains que vous avez commis», a déclaré Diane Foley, la mère du journaliste, huit ans jour pour jour après la diffusion par le groupe État islamique de la vidéo montrant sa décapitation. «Vos crimes pleins de haine ne l’ont pas emporté». «Je vous plains, el-Sheikh, pour avoir choisi la haine», a-t-elle encore dit.
El Shafee el-Sheikh avait été arrêté en même temps qu’un autre membre présumé des «Beatles», Alexanda Kotey, ancien ressortissant britannique âgé de 38 ans. Les deux hommes avaient été remis aux forces américaines en Irak et envoyés aux États-Unis en 2020 pour y être jugés. Alexanda Kotey a plaidé coupable en septembre 2021, et a été condamné à la prison à vie en avril dernier par le même juge, T.S. Ellis.
Un autre membre présumé des «Beatles», Aine Davis, 38 ans, a été inculpé et présenté à la justice britannique la semaine dernière à Londres après son expulsion de Turquie. Le plus connu du groupe, le Britannique Mohammed Emwazi, alias «Jihadi John», a été tué par un drone américain en Syrie en 2015. Il apparaissait dans de multiples vidéos montrant des égorgements.
Vidéos de propagande
Actifs en Syrie entre 2012 et 2015, les quatre membres des «Beatles», tous radicalisés à Londres, sont accusés d’avoir supervisé la détention d’au moins 27 journalistes et travailleurs humanitaires venus des États-Unis, du Royaume-Uni, de France, d’Espagne, d’Italie, d’Allemagne, du Danemark, de Suède, de Belgique, du Japon, de Nouvelle-Zélande et de Russie.
Le surnom de «Beatles» avait été donné par des otages occidentaux à ce groupe de djihadistes à l’accent britannique. Ce groupe avait gagné une sinistre notoriété en mettant en scène l’exécution de captifs dans d’insoutenables vidéos de propagande. Au procès d’El Shafee el-Sheikh, dix anciens otages européens et syriens avaient décrit les atrocités subies aux mains des «Beatles», comme des simulations de noyade, des chocs électriques ou des simulacres d’exécution.
«Ce procès a démasqué le sadisme et la barbarie des Beatles de l’EI», a affirmé l’un des procureurs, Raj Parekh, lors de l’audience vendredi. El-Sheikh se montre «défiant, sans remords, sans repentir», a-t-il ajouté. Cette semaine, la police britannique a révélé que monter le dossier contre les «Beatles» s’était apparenté à construire durant dix ans «un puzzle de toutes petites pièces».
«Nous avons suivi un chemin de petites miettes de pain, des fragments en fait, à partir d’une quantité énorme d’autres enquêtes», avait raconté mercredi à des journalistes le chef de la division antiterroriste de la police de Londres, Richard Smith. De son côté, le directeur adjoint du FBI, Paul Abbate, a assuré vendredi que «ceux qui tuent ou blessent nos citoyens ne peuvent pas se cacher éternellement», promettant d’œuvrer «sans relâche pour les traduire en justice».