Gastronomie et patrie: Le foie gras sauvé au nom de la cohésion nationale

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Gastronomie et patrieLe foie gras sauvé au nom de la cohésion nationale

Le Conseil national a retourné sa veste et renonce à vouloir interdire le foie gras. Il se rallie à la solution de déclaration spécifique des États.

Eric Felley
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Eric Felley
On trouvera toujours du foie gras issu du gavage dans les magasins en Suisse.

On trouvera toujours du foie gras issu du gavage dans les magasins en Suisse.

Getty Images/iStockphoto

Ce jeudi à Berne, on a frôlé une guerre gastronomique entre la Romandie friande de foie gras et la Suisse alémanique, qui voit d’un mauvais œil ce produit issu de méthodes de gavage interdites en Suisse. Au final, c’est un compromis qui a gagné: le foie gras pourra toujours être importé en Suisse, mais il devra porter une déclaration spécifique sur son mode de production.

Dans ce dossier, le Conseil national a cependant fait le grand écart en une année et demie. En février 2022, il avait accepté la motion de Martin Haab (UDC/ZH), qui voulait rayer de la carte des menus le foie gras issu de gavage. Martin Haab (UDC/ZH) a rappelé l’approbation de sa motion en février 2022 par une majorité confortable de119 voix contre 61. Mais au mois de juin dernier, le Conseil des États a décidé ne pas interdire le foie gras par 19 à 18, en adoptant un régime de déclaration spécifique.

Le bien-être animal

Ce jeudi au Conseil national, le débat a pris une tournure plus fondamentale relevant de la cohésion nationale, plutôt que du bien-être des oies et des canards. Ada Marra (PS) a interpellé Martin Haab: «Est-ce que cela ne vous dérange pas d’intervenir dans les traditions culinaires des minorités de ce pays?». «J’ai conscience que la consommation est une question culturelle en Suisse francophone, a répondu le Zurichois, ressentie différemment en Suisse alémanique, mais nous ne sommes qu’un seul pays et nous nous engageons pour le bien-être des animaux et les considérations gastronomiques culturelles passent au second plan»

«Un coup de couteau dans le dos»

Mais rien ne pouvait arrêter la soudaine fronde contre l’interdiction. Thomas Aeschi (UDC/ZG), Olivier Feller (PLR/VD) et Marie-France Roth Pasquier (C/FR) ont déposé des propositions individuelles pour s’en tenir à la version édulcorée du Conseil des États. Pierre André Page a accusé la majorité de la commission de «planter un coup de couteau dans le dos des restaurateurs». Valentine Python lui a répondu que «cette métaphore sanglante» était pour le moins exagérée…

La visite de Macron

Pour Simone de Montmollin (PLR/VD): «Il existe une vraie différence culinaire entre les deux parties du pays». Elle a fustigé la position dogmatique de certains Alémaniques qui «renforce le röstigraben». La Genevoise a même évoqué la visite du président français Emmanuel Macron en novembre prochain: «Est-ce que cette interdiction serait le meilleur cadeau qu’on pourrait lui faire?» Finalement, Jean-Luc Addor (UDC/VS) a posé la question existentielle habituelle: «Est-ce que l’État veut nous imposer ce qu’on a le droit de mettre ou non dans nos assiettes?»

Le Conseil fédéral s’est toujours opposé à l’interdiction du foie gras, en particulier parce qu’elle nous met en délicatesse avec des accords internationaux (OMC) et qu’elle n’est pas proportionnée: «L’interdiction est une mesure radicale, a plaidé Alain Berset, et ne se justifie que s’il n’existe pas d’autres mesures… Le Conseil fédéral estime que la déclaration des modes de production est suffisante».

Au vote, le Conseil national a suivi cette voie par 141 oui contre 39 non et 8 abstentions.

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