Polémique«L’héritage de Poudlard» visé par des appels au boycott
Les positions considérées comme transphobes de l’autrice des livres «Harry Potter» font de l’ombre au nouveau jeu vidéo. L’impact devrait être limité.
Avant la sortie vendredi de «Hogwarts Legacy – L’héritage de Poudlard», les appels à ne pas acheter ce jeu vidéo issu de l’univers Harry Potter se multiplient aux États-Unis et dans le monde, en raison des positions considérées comme transphobes de l’autrice J. K. Rowling.
«Il ne s’agit pas de savoir si ce jeu a du contenu répréhensible – mais de se dire que soutenir ce jeu valide en quelque sorte les positions très très douteuses» de l’autrice de Harry Potter, estime Will Overgard, un «streamer» diffusant ses parties de jeux vidéo en direct à des milliers de spectateurs sous le pseudonyme «VikingBlonde».
Cet ancien employé de studios de jeux vidéo, âgé de 36 ans, a appelé sur les réseaux sociaux ses «amis et collègues» à «ne pas soutenir» «L’héritage de Poudlard» que ce soit en l’achetant ou en créant des streams ou des vidéos YouTube. Sa vidéo a depuis été vue plus de deux millions de fois.
J. K. Rowling est accusée d’être devenue ces dernières années l’une des opposantes les plus influentes au mouvement de reconnaissance des droits des personnes transgenres, y voyant une atteinte aux droits des femmes. L’autrice de Harry Potter s’est notamment opposée l’an dernier à une loi du Parlement écossais visant à faciliter la reconnaissance légale du changement de genre, autorisé dès 16 ans.
Réputation écornée
Ces dernières années, son image d’écrivaine adulée par des générations de lecteurs a été largement écornée par ces accusations de transphobie à son encontre. Et depuis que la campagne promotionnelle de «Hogwarts Legacy» bat son plein, des appels à ne pas contribuer à sa fortune par le versement de royalties liées au jeu ont fleuri en ligne.
L’annonce récente qu’un personnage transgenre serait inclus dans le jeu n’a pas apaisé les débats. Au sein des communautés de joueurs LGBT+, «il existe beaucoup de discussions internes sur le sujet», affirme Cody Mejeur, professeur d’études des médias à l’Université de Buffalo, dans l’État de New York.
Deux approches
«Cela va des gens qui aiment toujours la franchise Harry Potter et qui en quelque sorte se bouchent le nez (…) aux personnes transgenres qui ont été très impliquées dans ces appels au boycott», observe ce spécialiste des questions LGBT+ dans les jeux vidéos.
Selon le professeur, les joueurs trans se partagent entre les partisans d’un boycott pur et simple du jeu et ceux qui adoptent une approche critique, à base d’interactions et discussions limitées autour du jeu. «Parfois cela va se traduire par un achat du jeu plus tard, d’occasion, de manière que vous ne contribuiez pas directement» aux revenus de J.K. Rowling, note Cody Mejeur.
Pas de couverture
Les critiques envers le jeu se sont en outre étendues à une partie de la presse spécialisée. Le site TheGamer a annoncé fin janvier qu’il ne couvrirait pas la sortie du jeu sous quelque forme que ce soit. La décision fut «facile» à prendre, écrit Jade King, l’une des principales responsables éditoriales du site, «étant donné que J. K. Rowling continue de s’affirmer en tant que transphobe la plus influente au monde».
En France, le site Gamekult a pris une position similaire en annonçant sur Twitter refuser de «donner un écho à une marque dont le poids économique et médiatique profite à une femme érigée en figure de proue d’un mouvement de haine». Sollicité par l’AFP, Warner Bros. Game, maison mère du studio Avalanche ayant développé le jeu, n’avait pas répondu dans l’immédiat.
Peu d’impact
Selon Will Overgard, les appels à ne pas acheter «Hogwarts Legacy» n’auront cependant que peu d’impact sur les ventes du jeu, qui grâce aux préventes figure déjà en tête des meilleures ventes de jeux vidéos sur la plateforme Steam.
«Cela a surtout permis de soulever le débat autour» du sujet, affirme-t-il.