PakistanLa justice blanchit 18 policiers accusés du meurtre d’un jeune mannequin
Naqeebullah Mehsud, âgé de 27 ans, avait été abattu lors d’une opération de police en 2018. Sa mort avait provoqué une vague d’indignation dans le pays. Sa famille veut faire appel du verdict.
Un tribunal pakistanais a acquitté lundi 18 policiers du meurtre en 2018 à Karachi d’un jeune homme, qui avait provoqué un tollé dans le pays sur les méthodes contestées de la police, a-t-on appris auprès de l’avocat de la famille de la victime. Le verdict a suscité une vague d’indignation sur les réseaux sociaux. Au Pakistan, la police est de longue date accusée par les organisations de défense des droits humains de recourir aux exécutions extrajudiciaires, maquillées en affrontements mortels avec des criminels.
Accusé de liens avec les talibans
Naqeebullah Mehsud, un apprenti mannequin de 27 ans, avait été abattu en janvier 2018 avec trois autres personnes dans une opération à Karachi visant, selon la police, les talibans pakistanais. Les quatre victimes étaient originaires du Waziristan du sud, une zone tribale troublée du nord-ouest du pays, frontalière de l’Afghanistan. Le meurtre du jeune homme, dont les photos étaient vite devenues très populaires sur les réseaux sociaux après sa mort, avait suscité une vive émotion dans le pays. Sa famille avait vigoureusement démenti qu’il ait entretenu le moindre lien avec les talibans.
Cette colère s’était en grande partie focalisée sur la personne de Rao Anwar, un superintendant de la police de Karachi, accusé d’avoir ordonné ce meurtre et nombre d’autres exécutions extrajudiciaires. Rao Anwar avait été interpellé quelques semaines plus tard, alors qu’il tentait de fuir le pays après le scandale. Mais lundi, un tribunal antiterroriste réuni à la prison centrale de Karachi a acquitté les 18 policiers accusés «y compris Rao Anwar», a annoncé l’avocat de la famille Mehsud, Salahuddin Panwar, qui a promis de faire appel du verdict.
Les exécutions extrajudiciaires se multiplient à Karachi
La grande mégalopole portuaire de Karachi, qui abrite 15 millions d’habitants, a longtemps été le refuge de talibans, de membres du crime organisé et de militants politiques violents. Les exécutions extrajudiciaires s’y sont multipliées à partir de 2013, quand les forces paramilitaires et la police ont lancé une vaste opération, qui a débouché en quelques années sur une réduction significative de la violence.
En 2022, Human Rights Watch (HRW) continuait à estimer que les forces de l’ordre pakistanaises sont «responsables de graves violations des droits humains, ce qui inclut la détention sans inculpation et les exécutions extrajudiciaires». «Le gouvernement continue à faire trop peu pour obtenir que les forces de l’ordre rendent des comptes pour les accusations de torture et autres graves abus», ajoutait HRW.
L’indignation suscitée par la mort de Naqeebullah Mehsud s’était transformée en un vaste mouvement de protestation, dans la communauté pachtoune, dont il était issu et qui s’estime discriminée au Pakistan.