ÉlectionLes Argentins aux urnes pour le premier tour de la présidentielle
Pour être élu au premier tour en Argentine, un candidat doit obtenir au moins 45% des voix, ou 40% des suffrages mais avec 10% d’avance sur le deuxième.
Éreintés par le surendettement et l’inflation, les Argentins votent dimanche au premier tour de l’élection présidentielle, entre la tentation d’un candidat «antisystème» et la certitude de lendemains difficiles. Rarement depuis le retour de la démocratie il y a 40 ans, un scrutin n’a été aussi incertain en Argentine, où l’inflation atteint des niveaux parmi les plus élevés au monde (138%).
Javier Milei, économiste «anarcho-capitaliste» de 53 ans, qui promet de «tronçonner» l’État, admire Donald Trump et nie toute responsabilité de l’homme dans le changement climatique, a renversé la table en deux ans à peine en politique, au point de se trouver en tête des intentions de vote au premier tour.
«Qu’ils s’en aillent tous, qu’il n’en reste plus un!» a encore crié Javier Milei, le visage de la «bronca» (colère), en meeting de clôture cette semaine, fidèle au fil rouge «dégagiste» de sa campagne contre la «caste politique parasite» qui alterne au pouvoir depuis vingt ans, entre péronistes (centre-gauche) ou libéraux. Dans cette «élection de trois tiers», comme l’ont baptisée les sondeurs, Javier Milei recueille environ 35% des intentions de vote.
Austérité, ou ajustements?
Javier Milei devance devant Sergio Massa (autour de 30%), le ministre de l’Économie et candidat du bloc gouvernemental de centre-gauche, et Patricia Bullrich (26%) de l’alliance d’opposition (centre-droit), une ex-ministre de Sécurité sous le président libéral Mauricio Macri (2015-2019). Derrière eux, deux candidats mineurs Myriam Bregman (gauche radicale) et Juan Schiaretti (coalition centriste) ne dépassent pas la barre des 4%.
Pour les Argentins, l’incertitude du lendemain est compagne habituelle: 12,4% d’inflation en août, 12,7% en septembre --plus fort indice mensuel en 32 ans-- des étiquettes qui valsent d’une semaine sur l’autre. Et une guérilla de tous les jours pour déjouer les prix ou pour faire face aux échéances de crédits.
«C’est insupportable, invivable, l’autre jour j’achète un morceau de viande, 1000 pesos, c’était à 500 le mois dernier», réagit Hector Sanchez, serveur de 59 ans, qui se dit tenté de voter Javier Milei «pour mettre les gens au travail, un vrai travail, au lieu de vivre de programmes sociaux». Là se joue sans doute le scrutin, quelque part entre la colère, l’inquiétude et le scepticisme. Envers Patricia Bullrich, qui promet «le gouvernement le plus austère de l’histoire de l’Argentine», et un audit sévère du mille-feuille social, dans un pays à 40% de pauvres, 10% de plus qu’il y a huit ans.
«Mirage»
Envers Sergio Massa, qui assure que «le pire de la crise» est passé grâce à un prochain boom exportateur, mais ne pourra éviter un tour de vis à une économie pathologiquement sursubventionnée, sous l’œil du FMI auquel l’Argentine peine à rembourser un prêt colossal de 44 milliards de dollars (39 milliards de francs). Ou envers Javier Milei, au projet de «dollarisation», soit le remplacement de la monnaie nationale par la devise américaine, décrié dans un manifeste par 170 économistes de divers bords comme un «mirage» au périlleux coût social et inflationniste.
Au lendemain de la primaire d’août, sorte de «répétition» de la présidentielle qui avait vu la percée de Javier Milei (30%), le peso, sous pression, avait été dévalué de 20%. Pour être élu au premier tour, un candidat doit obtenir au moins 45% des voix, ou 40% des suffrages mais avec 10% d’avance sur le deuxième.
Dans le cas contraire, un deuxième tour aura lieu le 19 novembre. Quelque 35,8 millions d’électeurs renouvellent aussi dimanche la moitié des députés, et un tiers du Sénat. Les premiers résultats sont attendus vers 22h00 locales (03h00 lundi, heure suisse).