AfghanistanWashington n’a toujours que ses drones pour contrer les jihadistes
Un an après le retrait des forces américaines d’Afghanistan, Washington ne compte encore que sur ses drones pour empêcher une résurgence de la menace posée par les groupes terroristes islamistes.
Les forces américaines étaient entrées en Afghanistan, le 7 octobre 2001, pour chasser du pouvoir les talibans, en raison de leur refus de livrer le chef d’Al-Qaïda, Oussama Ben Laden, après les attentats du 11-Septembre. Lorsque le président américain Joe Biden a décidé de retirer les soldats américains du pays après 20 ans de guerre l’an dernier, il a assuré que les États-Unis avaient les capacités de continuer la guerre contre le terrorisme sans troupes sur le terrain, ce que l’administration américaine a appelé des opérations «au-delà de l’horizon».
Succès médiatique
Des avions de surveillance et des drones américains patrouillent donc régulièrement le ciel afghan, mais cette stratégie a montré peu de résultats, au moins publiquement, à une exception près: la frappe de drone qui a tué Ayman al-Zawahiri, le chef d’Al-Qaïda, le 31 juillet à Kaboul. Encore a-t-elle été menée par la CIA, et non les militaires.
«Difficile mais pas impossible»
Pour l’ancien commandant des forces américaines au Moyen-Orient, Frank McKenzie, la présence du dirigeant d’Al-Qaïda dans la capitale afghane montre qu’il est très difficile de lutter contre les jihadistes sans aucune présence sur le terrain.
«Je dirais qu’une frappe en un an, ça correspond à «difficile mais pas impossible», a dit récemment à la BBC ce général à la retraite qui a dirigé le retrait des forces américaines d’Afghanistan. Pour lui comme pour son prédécesseur Joseph Votel, les opérations à distance risquent de se révéler insuffisantes, car la menace terroriste contre les États-Unis s’est accrue depuis un an.
Revenir en Afghanistan?
«Je pense que nous sommes moins en sécurité» aujourd’hui qu’il y a un an, a déclaré au média américain VOA l’ex-général Votel, lui aussi ancien chef du commandement central de l’armée américaine (Centcom), envisageant même un retour des forces américaines en Afghanistan. «Je ne sais pas s’il faudra revenir en Afghanistan comme nous l’avons fait en Irak, trois ans après en être partis», a-t-il ajouté. «J’espère que non. Mais je pense que nous devrions y être préparés.»
Pentagone confiant
Des inquiétudes que le Pentagone affirme ne pas partager. «À ce stade, nous estimons qu’en matière de plans d’opérations externes (de groupes terroristes) en Afghanistan, nous sommes en sécurité», a assuré mercredi le porte-parole du Pentagone, le général Pat Ryder. «Nous avons absolument les moyens de répondre où que ce soit et à quelque moment que ce soit à toute menace terroriste, dans le monde entier», a-t-il ajouté. «En Afghanistan, c’est plus difficile, ce n’est pas insurmontable».
Le numéro trois du Pentagone, Colin Kahl, avait pourtant admis fin 2021 que selon les services de renseignement américains, le groupe Etat Islamique (EI) et Al-Qaïda avaient «l’intention de mener des opérations externes, y compris contre les États-Unis, mais (…) pas les capacités». «Nous pourrions voir l’EI générer ces capacités dans 6 à 12 mois», avait-il précisé aux élus du Congrès.
Dialogue avec les talibans?
Pour Douglas London, un ancien responsable de la CIA, «l’Amérique néglige l’Afghanistan à ses risques et périls.» Cet ancien de l’agence de renseignement américaine, aujourd’hui professeur à l’université Georgetown, a estimé dans un article publié par le site spécialisé Just Security qu’au lieu de dépendre exclusivement de frappes de drones, les États-Unis devraient entamer un dialogue minimal avec les talibans.
Sans aller jusqu’à reconnaître officiellement leur régime, Washington pourrait ouvrir des bureaux de liaison à Kaboul et Kandahar, car «il y a toujours quelque chose à gagner à être sur le terrain et à parler à vos adversaires», a-t-il ajouté.
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