JuraLa cigogne infirme s’en est allée
Le sort d’un échassier estropié a ému les promeneurs, près d’un terrain d’aéromodélisme. Depuis dimanche matin, on ne le voit plus.
- par
- Vincent Donzé
Une cigogne infirme s’est posée il y a douze jours sur un terrain utilisé pour l’aéromodélisme, à Glovelier (JU). Avec une patte estropiée, elle a ému ceux qui l’ont aperçue, en particulier une promeneuse habituée à sortir ses deux chiens à cet endroit, à proximité de la ligne ferroviaire Delémont-Porrentruy.
La présence de la cigogne a été signalée sur un billet épinglé à la cabane du club de modélisme. La police a été avertie, de même que le vétérinaire cantonal, le garde-faune et l’Office de l’environnement. «On pourrait l’aider, mais on l’abandonne à son sort», a indiqué la promeneuse au «Quotidien Jurassien».
Cal osseux
Le biologiste Michel Juillard s’est rendu de Damphreux à Glovelier. Il a vu un cal osseux sur la patte gauche de la cigogne solitaire, consécutivement à une fracture qu’elle a pu se faire dès sa naissance. Son diagnostic, livré au «QJ»: «Elle peut vivre longtemps comme ça».
«Elle n’est pas craintive: les chiens ne l’effraient pas», rapportait dimanche la promeneuse qui a attiré l’attention sur la cigogne. Selon Michel Juillard, l’option qui prévalait dès le début, c’est de laisser l’échassier tranquille et de laisser faire la nature. «L’opérer serait compliqué et… très coûteux», indique-t-il.
Bonne santé
Il n’y a dans la région ni volière, ni programme de reproduction des oiseaux en captivité. Montrer la cigogne infirme dans un zoo ne serait pas une perspective alléchante.
À l’Office jurassien de l’environnement, le préposé de l’avifaune protégée a estimé que la capture d’un animal handicapé serait préjudiciable, tant qu’il est en bonne santé: le stress pourrait lui être fatal. «On ne peut pas l’attraper», confirme Michel Juillard, en précisant avoir vu des cigognes atrophiées se reproduire.
Si la jeune cigogne marche en sautillant, elle peut très bien voler et même partir en migration: dimanche matin, après l’avoir aperçue depuis le train, à 9 heures, lematin.ch ne l’a plus vue sur place, vingt minutes plus tard: un héron l’avait remplacé sur le champ. Entretemps, l’ombre d’une cigogne a plané sur la route cantonale, entre les traverses de chemins de fer en bois empilées par le Groupe Corbat.
Vers de terre
La cigogne parvenant à se nourrir et à fuir les prédateurs, elle s’est remplumée. En mangeant des vers de terre, elle a repris du poil de la bête. Sans doute s’est-elle envolée vers d’autres cieux… «Ce mâle a repris sa migration», suppose Michel Juillard, animateur de la fondation des Marais de Damphreux.
La cigogne infirme est-elle allemande? C’est le sentiment du biologiste jurassien, la vallée de Delémont étant dépourvue de nidification. En Ajoie, toutes les cigognes ont migré le mois dernier, sauf quelques spécimens maintenus un temps en captivité en Alsace, ce qui a cassé leur sens migratoire. Ces volatiles sont encore visibles du côté de Damphreux.