FranceVers une nouvelle mise en examen de Nicolas Sarkozy?
L’ancien président Sarkozy va être convoqué par les juges prochainement en vue d’une possible mise en examen. Il est soupçonné d’avoir avalisé des manœuvres frauduleuses pour le disculper dans l’affaire du financement libyen.
L’ex-chef de l’État français est convoqué prochainement pour une mise en examen, soupçonné d’avoir avalisé des manœuvres frauduleuses entreprises par plusieurs protagonistes pour le disculper dans l’affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle 2007. L’interrogatoire devait se tenir ces jours-ci, a appris l’AFP mercredi de sources proches du dossier, confirmant Libération, mais a été repoussé ultérieurement et devrait se tenir en octobre, comme l’ont écrit RTL et M6.
Selon la teneur de ses déclarations devant le magistrat instructeur et l’appréciation qu’en fera celui-ci, M. Sarkozy pourrait ressortir de cet interrogatoire mis en examen ou sous le statut moins incriminant de témoin assisté, qui lui donne un accès au dossier mais lui évite le renvoi en procès. L’ex-chef de l’État est soupçonné d’avoir bénéficié des manœuvres qui auraient été entreprises avec son aval par au moins huit protagonistes pour que le sulfureux intermédiaire franco-libanais Ziad Takieddine retire, fin 2020 contre rémunération, ses accusations contre lui.
Mimi Marchand mise en cause
Cette opération aurait également visé à obtenir une preuve que le retentissant «document libyen» publié dans l’entre deux tours de la présidentielle 2012 par Mediapart et évoquant un financement à hauteur de 50 millions d’euros était un faux, ou encore à obtenir la libération d’un fils Kadhafi, détenu au Liban, pour que la famille du défunt dictateur libyen facilite la mise hors de cause de Nicolas Sarkozy. La reine des paparazzis Mimi Marchand figure parmi les mis en cause.
Le parquet national financier a élargi début mars l’information judiciaire ouverte au printemps 2021 à des faits de «recel de subornation de témoin», une qualification qui pourrait correspondre au rôle de Nicolas Sarkozy tel qu’il apparaît dans certaines déclarations des protagonistes dans l’enquête.
À l’origine des investigations, la spectaculaire volte-face de Ziad Takieddine, qui accusait Nicolas Sarkozy depuis 2012 d’avoir bénéficié de fonds libyens pour sa campagne présidentielle 2007, et qui avait déclaré en novembre 2020 sur BFMTV et Paris Match que Nicolas Sarkozy n’avait en fait pas bénéficié d’un tel financement. En fuite au Liban, pour échapper à sa condamnation dans l’affaire Karachi, Ziad Takieddine, dont les propos sont pris avec des pincettes par la justice, était revenu sur ses déclarations deux mois plus tard.
«Pieds nickelés»
Dans cette «affaire d’une gravité majeure», selon le mot du juge d’instruction dans une ordonnance de fin 2021, les enquêteurs ont récemment chiffré à au moins 608'000 euros l’argent engagé pour cette opération «Sauver Sarko».
En juin, Nicolas Sarkozy a déjà été entendu dans ce dossier en audition libre et perquisitionné, comme l’avait alors révélé l’AFP. Selon ses déclarations aux enquêteurs financiers de l’Oclciff (Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales), dévoilées lundi par Libération et dont l’AFP a eu confirmation, Nicolas Sarkozy a nié avec force, sur deux jours et pendant 12 heures, toute participation aux faits mis en cause.
Il a indiqué avoir été mis au courant du souhait de Ziad Takieddine de changer de version par Mimi Marchand en octobre 2020, un mois avant que l’information ne soit publique. Mais «aucun élément concret matériel, de téléphonie, ne peut m’incriminer dans cette folie, ni de près, de ni de loin», a assuré Nicolas Sarkozy.
Un agenda judiciaire chargé
Longuement interrogé sur son agenda et sa téléphonie de la fin 2020 et du début 2021, qui suggèrent des rendez-vous ou conversations à des moments-clés avec des protagonistes du dossier, Nicolas Sarkozy a évoqué quelques «coïncidences» et nié tout contact significatif avec la plupart des mis en cause. Pour lui, «toute cette petite bande n’a que pour seule préoccupation de se faire mousser les uns par rapport aux autres» en prétendant être en contact avec lui, a encore dit l’ex-président. «L’idée même que je puisse pousser directement ou indirectement au financement des pieds nickelés est une idée folle», a-t-il ajouté.
L’agenda judiciaire de Nicolas Sarkozy, qui promeut actuellement son dernier livre «Le temps des combats», est très chargé. Il sera jugé en novembre en appel dans le dossier Bygmalion puis en première instance début 2025 sur le cœur des soupçons de financement libyen de sa campagne présidentielle de l’époque.
«Je suis propre», a répondu Nicolas Sarkozy, interrogé dans C à vous (France 5) sur l’ensemble de ces mises en causes judiciaires.