ÉtudeLe racisme structurel reste une réalité en Suisse
Un premier état des lieux de la discrimination institutionnelle et structurelle en Suisse a été publié ce jeudi. Il montre les domaines dans lesquels il se manifeste et qui est touché.
Sur mandat du Service de lutte contre le racisme (SLR), le Forum suisse pour l’étude des migrations et de la population (SFM) de l’Université de Neuchâtel a dressé le premier état des lieux du racisme structurel (voir encadré) en Suisse, «afin d’identifier les domaines dans lesquels il se manifeste, les personnes qui en sont victimes et les formes qu’il adopte». La synthèse qui en présente les principaux résultats a été publiée ce jeudi, annonce le Département fédéral de l’Intérieur (DFI) dans un communiqué de presse.
«L’étude fait apparaître des indices de discriminations institutionnelles et structurelles en particulier dans les domaines du travail, du logement, des démarches administratives et de la naturalisation, mais aussi, dans une moindre mesure, dans les domaines de la sécurité sociale ainsi que de la police et de la justice», liste le DFI.
Le racisme structurel
Le SLR explique dans sa synthèse que le racisme structurel est «un mécanisme de discrimination ou d’exclusion de groupes racisés qui plonge ses racines dans notre société et se manifeste par des valeurs, des actes et des représentations normatives qui se sont développés au cours de l’histoire». Le problème étant que les individus «n’y voyant rien d’«anormal», ne le remettent pas en question».
La présence de discrimination raciale sur le marché du travail est «abondamment attestée par les études scientifiques», illustre par exemple la synthèse. Il existe ainsi des preuves «des inégalités systématiques dont souffrent certains groupes de population, notamment les personnes provenant du sud-est de l’Europe, des pays de l’ex-Yougoslavie et de l’Afrique subsaharienne, mais aussi, dans certains cas, de la Turquie et du Portugal». «Les personnes noires, dont la couleur de peau est reconnaissable sur les photos figurant dans les dossiers de candidature, sont victimes d’une discrimination de même ampleur», poursuit-il.
Et sur le marché du travail, «le phénomène n’épargne pas les personnes de nationalité suisse, qui ont grandi dans notre pays: la discrimination touche en effet les personnes perçues comme «autres», peu importe qu’elles aient suivi leur formation en Suisse ou qu’elles aient le passeport helvétique».
S’attaquer aux biais institutionnels
À noter que «la question est moins bien documentée dans les domaines de la santé et de l’éducation. Quant aux médias et à Internet, à la vie quotidienne ou encore à l’espace public et la famille, ils n’ont pas encore fait l’objet de suffisamment d’études pour que l’on puisse tirer des conclusions concernant la discrimination raciale», précise le DFI.
Face à ces résultats, le SLR estime que «pour ancrer durablement la protection contre la discrimination raciale au sein de la société, il faut jeter un regard critique sur nos structures et nos institutions». Mais «pour concevoir et mettre en œuvre des mesures s’attaquant aux biais institutionnels, il faut disposer d’expertise et d’expérience». Ce qui demande du temps et de l’argent. «Il revient à la politique, aux autorités et aux institutions de permettre à ce savoir de se constituer et de circuler, de soutenir ce processus et de tirer profit de ces connaissances», conclut le SLR.
Déroulement de l’étude
Pour mener son étude, le SFM «a passé en revue en 2022 plus de 300 études scientifiques et mené des entretiens (en groupe et individuels) avec 25 spécialistes du terrain et du monde académique».