FootballPourquoi Sion semble se complaire dans les galères
Le club valaisan jouera une balle de maintien contre Winterthour. Un contexte qu’il reproduit avec une troublante régularité depuis six ans. Comme si ses joueurs ne pouvaient pas exister autrement.
- par
- Nicolas Jacquier
Si le FC Sion avait «enfin» tenu son rang cette saison, n’avait à tout le moins pas ressemblé à ce qu’il est devenu depuis bien trop longtemps, jamais Young Boys n’aurait probablement fêté la reconquête de son titre aussi tôt. À la lumière du recrutement valaisan effectué durant l’été 2022, nous n’étions pas les seuls à penser que cette fois-ci, le club de Tourbillon possédait le potentiel pour jouer le haut du classement, à défaut de parvenir à concurrencer l’ogre bernois sur la durée. Tant il n’avait rien à envier, sur le papier du moins, à Lugano (2e), Lucerne et Servette (3e ex-aequo) ou Bâle (5e).
On se trompait sur toute la ligne - et peut-être vous également - parce que Sion, comme il en a pris la très vilaine habitude, n’a pas son pareil lorsqu’il s’agit de tromper tout son monde. Résultat de cet appauvrissement programmé: au lieu de pouvoir terminer son championnat en sifflotant, le voici condamné à trembler devant le FC Winterthour pour éviter une place de barragiste qu’il ne connaît que trop bien.
Or avec les moyens considérables qui sont les siens, il n’est pas normal que Sion en vienne à autant galérer, saison après saison, depuis le printemps 2017 qui l’avait vu terminer européen (4e). Des galères dont il a fini par faire sa marque de fabrique, comme s’il ne pouvait pas exister autrement. Mais à trop jouer à se faire continuellement peur, le risque existe de se prendre un jour le boomerang en retour. Autant l’écarter quand les circonstances vous y invitent, ce qui sera le cas samedi à l’occasion du duel des mal classés…
Les trois enseignements à retenir
Éliminé en mars au stade des quarts par le futur finaliste Lugano, Sion est fâché depuis 2015 avec la Coupe, cette compétition qui lui a permis d’écrire l’histoire en 13 épisodes, tous victorieux. Mine de rien, c’est une nouvelle finale - mais de championnat cette fois-ci - que s’apprêtent à disputer les Valaisans contre Winterthour samedi (18 h). En s’imposant, Sion laisserait son hôte zurichois à cinq points. De quoi voir venir alors qu’il restera quatre journées à disputer… Tout autre verdict, a fortiori un nouveau couac, rendrait la fin de l’exercice crispante.
Si on le répète aussi fréquemment, c’est que cela doit être vrai: une lutte pour le maintien se joue aussi au niveau des cartons, ce qui suppose de savoir garder ses nerfs. Un domaine dans lequel Sion a encore quelques substantiels progrès à réaliser. On en veut pour preuve que le visiteur s’est présenté au bord de la Limmat pour la septième fois d’affilée avec… un ou plusieurs éléments suspendus! Et comme Joël Schmied a écopé à son tour d’une biscotte fatidique, son entraîneur va à nouveau pouvoir bricoler, y compris en défense, pour la réception des Lions. Messieurs, on se calme!
Si Sion (après deux défaites et un nul dans les confrontations directes) entend enfin crier victoire contre Winterthour, il devra d’abord vaincre la terrible malédiction de Tourbillon, un stade devenu maudit pour lui. Il en résulte un bilan affreusement négatif, avec un ultime succès à domicile fêté le 15 octobre sous l’ère Tramezzani – 2-0 contre Lucerne - et seulement 10 points obtenus à la maison (contre 21 en déplacement, faisant de Sion la 3e meilleure équipe à l’extérieur). On sait heureusement l’importance du 12e homme dans ces matches couperet. Provoquer le destin, c’est aussi réussir à embarquer le public avec soi. Les Valaisans en sont-ils capables?
Au fait, que va faire CC dans 12 mois?
On a presque tendance à l’oublier. Ou à ne pas vouloir tenir compte d’un paramètre pourtant capital. Mais Christian Constantin, il convient de s’en rappeler, a répété durant la dernière trêve hivernale qu’il entendait se désengager financièrement du FC Sion, qu’il porte à bout de bras depuis un quart de siècle. Devant l’émoi suscité, le boss de Tourbillon, dans un savant exercice de rétropédalage, art qu’il maîtrise à la perfection, avait entrouvert une porte en laissant entendre que seul le projet d’un nouveau stade pourrait l’inciter à surseoir sa volonté de déposer le club en Promotion League en juin 2024.
Alors, stop ou encore? Le flou persiste. Mais à le voir autant s’impliquer, parfois jusque sur le banc, difficile d’imaginer CC rendre les plaques dans 12 mois. Et pourquoi vouloir à tout prix sauver la Ligue si c’est pour ensuite tirer l’eau du monde professionnel? À moins que la piste d’un repreneur crédible se dessine, ce dont le président lui-même a toujours douté.
Le meilleur (à Sion)
Alors que l’on en attendait monts et merveilles depuis son arrivée en Valais, Wylan Cyprien a souvent déçu l’assistance. Il se trouve que l’homme, souvent blessé, monte gentiment en puissance. À Zurich, le No 10 a enfin été à la hauteur de ce que l’on en attendait. À l’image de son coup franc victorieux, un modèle du genre. Et si l’on avait enfin retrouvé le Cyprien qui, associé à l’époque à… Balotelli, brillait sous le maillot de l’OGC Nice?
Le moins bon
On a de la peine à reconnaître Mirlind Kryeziu, défenseur en perdition après avoir été couronné champion de Suisse. Alors qu’il avait été l’un des grands artisans du titre du FC Zurich le printemps dernier (32 matches joués, 3 buts), le No 31 du Letzigrund n’en aligne plus une de juste jusqu’à jouer les fantômes. Un retour sur terre collectif puisque s’appliquant à l’ensemble de ses coéquipiers.
La décla’
La double question en pensant à l’avenir
David Bettoni récupérera-t-il Mario Balotelli pour le week-end prochain? Et lui-même, au bénéfice d’un effet suspensif depuis trois matches, sera-t-il autorisé à prendre place au bord de la touche?