TristesseDécès de Guy Marchand à 86 ans
L’acteur et chanteur, interprète de Nestor Burma à la télévision, a rendu l'âme vendredi, ont annoncé ses enfants.
Guy Marchand, qui avait incarné Nestor Burma, créé par le romancier Léo Malet, dans une série sur France 2 de 1991 à 2003, «s’est éteint paisiblement ce vendredi (…) à l’hôpital de Cavaillon» (Vaucluse), ont indiqué ses enfants Jules et Ludivine dans un communiqué à l’AFP.
Il avait «dédié sa vie à la musique, au cinéma et à la beauté sous toutes ses formes», ont-ils ajouté. Le comédien avait tout pour réussir dans ce rôle d’enquêteur privé au contact des gens modestes de Paris: natif de la capitale, il avait grandi dans le quartier populaire de Belleville. «Né à Belleville» est d’ailleurs le titre de son dernier album, en 2020.
Destiné au cinéma
Sa voix grave l’avait d’abord porté vers la chanson, qu’il aimait beaucoup, lui qui avait joué de la clarinette dans les clubs de Saint-Germain-des-Prés à la belle époque de l’après-guerre. Son grand tube est «La Passionata» en 1965, à une époque où ce brun joue le séducteur latino, «racé comme un hidalgo», disent les paroles de ce titre.
Il est également l’interprète de «Destinée», morceau figurant sur la bande originale des «Sous-doués en vacances» (1982), repris dans une séquence culte de la version ciné du «Père Noël est une ordure». C’est d’ailleurs au cinéma qu’il va percer, en jouant des rôles secondaires sous l’œil de grands réalisateurs.
Une riche carrière
À son palmarès, il compte plusieurs nominations au César du meilleur second rôle. Il obtient cette récompense une fois, en 1982, lorsqu’il incarne l’un des policiers de «Garde à vue» de Claude Miller, où Lino Ventura et Michel Serrault tiennent les rôles principaux. Ventura était déjà la vedette, aux côtés de Brigitte Bardot, de son premier film, «Boulevard du rhum» (1970).
Dans sa filmographie, beaucoup de noms de grands cinéastes: François Truffaut, Maurice Pialat, Costa-Gavras, Bertrand Tavernier, Bertrand Blier, Alain Corneau, Jean-Louis Trintignant…
Éternel Nestor
Mais, pour les téléspectateurs, il est indissociable de son rôle de Nestor Burma, enquêteur au chapeau sombre et à la cravate dénouée, dans des épisodes de 90 minutes qui sont autant de téléfilms. «Nestor Burma, c’est moi, le courage en plus. Je suis beaucoup plus timoré que lui dans la vie», expliquait-il à l’AFP en 2000.
Léo Malet lui-même, qui à la fin de sa vie avait vu la série s’éloigner de plus en plus de l’intrigue de ses romans, restait très attaché à l’acteur et lui avait confié: «Toi, tu es mon Nestor Burma».
Guy Marchand poussait loin la nonchalance de l’enquêteur solitaire, revenu de tout, se frottant au vice et au crime, quand il navigue entre l’argot des gangsters venus des faubourgs et les fortunes des beaux quartiers. «Il ne s’est jamais embourgeoisé. (…) C’est un garnement. Mais tout ce qu’on me reprochait avant, au niveau de la provocation, c’est ce qu’on me demande de faire aujourd’hui», racontait-il après quelques années de tournage.
Ruiné
La série aurait pu s’arrêter tôt, la chaîne publique n’étant pas certaine de sa pérennité. «On m’a viré car une étude de marché disait que ça ne pouvait pas marcher. On a dit que ça ne pouvait pas plaire, c’était trop surréaliste. Mais, manque de pot, j’ai eu le 7 d’or. Alors, on me reprend», rapportait-il à France Culture en 2016, en se souvenant de cette récompense décrochée par la série en 1993.
Guy Marchand avait déclaré en 2019 qu’il finissait sa vie ruiné, dans cette ville de Cavaillon où il passait ses vieux jours. «Je suis dans le rouge», expliquait-il alors au magazine «Voici», invoquant sa passion pour les voitures américaines.