FootballCommentaire: CR7, Messi, TikTok et Cie
Franchement, je pensais qu’on était enfin débarrassé de «ça». «Ça», c’est la guéguerre infernale entre fans de Cristiano Ronaldo et supporters de Lionel Messi, ces deux vétérans qui jouent désormais dans des compétitions de seconde zone.
- par
- Robin Carrel
Ce qui ne va pas dans le football moderne a été résumé en un titre dans les médias au mois de juin: «Le Paris St-Germain a perdu près de 2 millions d’abonnés sur Instagram après le départ de Lionel Messi». Alors Dieu sait qu’on ne peut pas me taxer de supporter le club parisien, hein. Mais quand j’ai lu ça, j’ai su pour la 4234e fois que le jeu de ballon était devenu clairement autre chose. Un truc qui n’a plus rien à voir avec onze types d’une ville contre onze gaillards d’un autre bled et un truc en cuir au milieu, pour les départager.
Aujourd’hui, sur les réseaux sociaux, ça débat tactique, ça décrypte, ça scoute et c’est intéressant. Mais pour la plupart des gens, pour ceux qui ont besoin d’idoles dans leurs tristes vies, ça se bat juste à base d’émoticônes chèvres et d’émojis avec des yeux en étoiles à chaque passement de jambes d’un vieil argentin de 36 ans exilé en Major League Soccer et d’un vétéran portugais de 38 printemps qui roule sur un championnat de troisième zone. Les diffuseurs sont tombés dans le panneau et ont pris les droits du championnat saoudien. Vu l’horaire, ça remplace avantageusement une rediffusion de pétanque et un direct de tir à l’arc, je comprends…
Bravo, Lionel Messi a marqué des tas de fois dans une Coupe entre Américains et Mexicains. Youpie, Cristiano Ronaldo a enfilé un hat-trick contre Al-Fateh et scoré deux fois face à Al-Shabab. Ça n’a aucun intérêt sportif, les 99% de leurs followers sont incapables de placer l'Arabie saoudite sur une carte et de dire dans quelle ville joue tel ou tel club, mais ce n’est pas grave pour le fan moderne qui met, du coup, trois émoticônes chèvres sans avoir vu le match, mais juste un passage sur TikTok, où la scène est abruptement coupée avant une perte de balle, une passe en touche ou une gueulante contre un coéquipier/l’arbitre.
Bon, ce n’est pas que j’avais encore des illusions, hein. Le PSG qui arrive à se séparer de gros salaires en les cédant au Qatar (à lui-même), c’est pas super joli. Chelsea qui vient de dépenser le milliard de Livres Sterling en joueurs en l’espace de quelques mois, ça ne fait pas rêver. Lyon qui n’arrive pas à se payer un joueur et qui se le fait acheter 25 millions, puis prêter par le Racing White Daring de Molenbeek (11e en Belgique et qui vient d’en prendre 7 contre le Club Brugge), c’est débile. Et puis il y a tout ce qu’il se passe en Arabie saoudite…
Les gars? Les gars! On parle quand même d’un pays qui a condamné à mort un homme sur la seule base de ses activités sur X et sur YouTube, pendant que, de l’autre, il mettait une clause à un demi-million de dollars dans le contrat de Neymar pour chaque post Instagram du Brésilien vantant les mérites du Royaume! Lionel Messi, lui, joue aux USA, mais est ambassadeur de l'Arabie saoudite et prend plus de 600’000 francs pour une publication pour vanter les beautés de cette contrée.
Relisez ces phrases deux fois, digérez-la, posez-vous les bonnes questions, avant de passer plus loin.
On n’est pas à une contradiction près, hein. Mais après avoir organisé le nouveau «plus grand Mondial féminin de l’histoire» en Australie et en Nouvelle-Zélande, v’là-t’y pas que la FIFA rêve d’aller en Arabie saoudite jouer une Coupe du monde dans cette contrée qui permet aux femmes de conduire depuis cinq ans seulement. Oui, il faut du foot pour tout le monde. Volontiers. Mais déjà, bon, le Qatar, la Fédération internationale, les femmes tout ça… Je ne vais pas m’épancher davantage sur le sujet, après, j’ai des problèmes.