États-UnisLe Texas s’apprête à exécuter son plus vieux condamné à mort
Reconnu coupable d’avoir tué un policier il y a plus de 30 ans, Carl Buntion (78 ans) ne représente plus de danger pour la société, affirment ses soutiens. Or il doit être exécuté le 21 avril.
En juin 1990, Carl Buntion, élevé par un père alcoolique et violent, déjà condamné à treize reprises, se trouvait en liberté conditionnelle après avoir commis une agression sexuelle sur un enfant. Lors d’une intervention pour une banale infraction routière, à Houston, il a tiré sur le policier James Irby, le tuant. Condamné à la peine de mort, il a vu ce verdict annulé en 2009 par la plus haute juridiction texane, qui avait estimé que la défense n’avait pas pu être correctement entendue par les jurés. Mais en 2012, il a de nouveau été condamné à la peine capitale.
Dans cette affaire, ses défenseurs ne cherchent pas à prouver son innocence. Alors qu’il doit être exécuté le jeudi 21 avril, «chaque jour des 32 dernières années, j’ai regretté ce qui s’est passé», a-t-il confié lors d’une interview à la chaîne KHOU 11, cette semaine. Mais dans ce grand État du Sud conservateur, celui qui exécute le plus aux États-Unis, une personne ne peut être condamnée à la peine capitale que si un jury estime qu’elle représente un futur danger pour les autres.
Or Carl Buntion, qui souffre notamment d’arthrose, de vertiges, d’hépatite et de cirrhose, «ne peut plus être dangereux», plaident ses avocats dans un recours auprès de la commission des grâces et des libérations conditionnelles du Texas, qui se prononcera deux jours avant la date de l’exécution.
«Une vraie question éthique»
Carl Buntion, qui n’a été reconnu coupable que de trois infractions disciplinaires pendant ses décennies d’incarcération, est isolé dans sa cellule 23 heures par jour, depuis 20 ans. «Au Texas, les personnes dans le couloir de la mort sont placées dans une minuscule cellule avec, en haut, à peine une petite fente en guise de fenêtre», rappelle Burke Butler, directrice de l’association Texas Defender Service. «Elles ne peuvent pas voir ceux qu’elles aiment, si ce n’est en étant séparés par une vitre, en parlant dans un téléphone.» Être en confinement solitaire durant 30, 40 ou 50 ans constitue une «torture».
L’an dernier, la Cour suprême américaine a refusé de revenir sur la condamnation de Carl Buntion, mais le juge progressiste Stephen Breyer a estimé que la durée de son confinement «remet en cause la constitutionnalité de la peine de mort». «C’est une vraie question éthique et humaine sur l’obsession de l’État du Texas à vouloir exécuter coûte que coûte, quelles que soient les conditions», réagit de son côté Raphaël Chenuil-Hazan, directeur de l’association Ensemble contre la peine de mort.
Melissa Lucio dans l’attente
Au Texas, 192 hommes et six femmes attendent dans le couloir de la mort. Trois ont plus de 70 ans et cinq s’y trouvent pour des crimes remontant à plus de 40 ans. Après celle de Carl Buntion, l’exécution de Melissa Lucio, accusée d’avoir tué sa fille de 2 ans, en 2007, est prévue le 27 avril. Condamnée au terme d’un procès controversé, elle est soutenue par de nombreux élus démocrates et républicains, ainsi que par la star de téléréalité Kim Kardashian, qui a contribué à médiatiser ce que ses défenseurs qualifient d’erreur judiciaire.