AjoieLe narcisse à fleurs rayonnantes est sauvé
Une plantation de 15 000 bulbes dans une combe de Damvant marque la fin d’un processus de dix ans, après un cuisant échec en Hollande.
Le narcisse rayonne à nouveau dans la Combe des Vaux, à Damvant, son territoire naturel. Après dix ans d’essais divers liés à la production et à la dissémination de cette fleur blanche printanière, une première étape s’achève avec la réintroduction de plus de 15 000 bulbes. Dans la foulée, la culture de plus de 50 000 bulbes «permettra d’envisager avec un certain optimisme la sauvegarde de cette fleur emblématique», selon le Service jurassien des infrastructures.
Le Narcissus radiiflorus (Salisb.) était autrefois largement répandu et très abondant sur toute la région du vallon des Vaux, à deux kilomètres du village de Damvant, en Haute-Ajoie. «De fin mai à fin juin, les prairies étaient couvertes de ces magnifiques fleurs blanches», rapporte Edouard Roth, gestionnaire de l’entretien des surfaces de compensation écologique de l’A16.
La faute aux nitrates
Problème: les pratiques culturales ont modifié son habitat et des cueillettes immodérées ont considérablement réduit les populations de narcisses à fleurs rayonnantes. «C’est la faute à la charrue, mais surtout aux nitrates contenus dans les engrais», disait un observateur aujourd’hui décédé.
En 1997, l’ensemble des parcelles qui abritaient les populations restantes de narcisses a été acquise par le canton. La surface est gérée de manière extensive depuis 2003. Les prairies d’utilité publique rachetées par le canton et louées au paysan sont indemnisées à titre de mesure compensatoire à la construction de l’autoroute A16, à condition de ne pas pratiquer d’agriculture intensive. Tardive, la fauche n’intervient pas avant le 14 juillet, une fauche qui donne plus de paille que de foin.
Échec en Hollande
Afin d’accélérer la recolonisation du narcisse dans la combe, un projet de mise en culture de 100 000 bulbes a été tenté en Hollande, entre 2003 et 2010, au moyen de graines récoltées sur le site de Damvant. Las! Le projet a été un cuisant échec: seuls 50 bulbes sur les 100 000 prévus ont pu être fournis…
Dès 2010, avec l’aide d’un bureau de biologie, une entreprise ajoulote a été mandatée pour effectuer des essais de travaux de semis sur le site même de Damvant. En 2016, une première série de 3 000 bulbes a pu être produite et les bulbes réintroduits dans la combe. Une culture plus importante a alors été mise en place, sur la base des enseignements tirés lors de la phase d’essai.
Recoloniser la combe
À ce jour, 15 000 bulbes sont prêts à être remis en terre pour recoloniser la combe. En marge de ces opérations, diverses expériences ont été menées afin de mieux comprendre le narcisse et de définir la manière la plus efficace pour le réintroduire et garantir sa survie.
Une culture à plus large échelle débutera cet automne, dans le but de produire au minimum 50 000 bulbes en quatre à cinq ans. «Les populations existantes se portent bien, tout comme les réintroductions déjà effectuées, avec des pratiques agricoles adaptées à la biologie du narcisse et avec la collaboration participative des exploitants agricoles de Damvant», explique Edouard Roth.
Riviera vaudoise
Il y a deux ans, un cri d’alarme était lancé sur la Riviera vaudoise, l’autre pays du narcisse. Un plan d’action était alors élaboré, avec côté public, des patrouilles de rangers pour informer les promeneurs. Il y a là 75 hectares de prairies à narcisses, contre neuf à Damvant.
C’est la terre qui fait le narcisse, une terre jaunâtre qui contient du mycélium, appareil végétatif des champignons. Sur ses panneaux, le Service de l’environnement mentionne «les marnes sous-jacentes puis les calcaires de la Dalle nacrée».