GuerreParti combattre en Ukraine, un tireur d’élite suisse risque la prison
Un Schaffhousois a bravé l’interdiction de servir dans des armées étrangères. Sept procédures sont actuellement ouvertes contre des Suisses dans le cadre de la guerre d’Ukraine.
- par
- Jonathan Zalts
Le Suisse Avi Motola, 47 ans, est l’un des nombreux volontaires partis se battre en Ukraine. Dans les premières semaines de la guerre, ce sont plus de 20 000 combattants étrangers qui s’étaient engagés au sein des forces ukrainiennes. Fin février 2022, le président Volodymyr Zelensky avait même annoncé la création d’une «légion internationale» pour l’aider à repousser l’invasion russe.
En Suisse, le Code pénal militaire interdit aux citoyens de servir dans des armées étrangères. Des peines allant jusqu’à trois ans de prison sont prévues pour les contrevenants. Selon la SRF, la justice militaire mène actuellement sept procédures contre des Suisses partis combattre en Ukraine.
«Grande lâcheté»
Cette perspective n’a toutefois pas empêché Avi Motola de s’engager: «Je trouve que (cette loi) témoigne d’une grande lâcheté de la part d’un État, déplore le Schaffhousois au micro de la «Rundschau». Les soldats allemands, français, italiens, américains, tous peuvent rentrer dans leur pays et on les remercie. Il n’y a que moi qui dois m’attendre à une quelconque répression.»
Avi Motola avait d’abord rejoint l’Ukraine peu après le début de l’invasion russe avec une organisation humanitaire étrangère. Il y a aidé des civils à fuir avant de se rendre à Kiev où il ne pensait passer que quelques jours. C’est alors que les atrocités de Boutcha et d’Irpin ont été mises au jour. Des événements qui ont immédiatement motivé son engagement dans l’armée.
«Ce qui m’intéresse, ce sont les civils»
Le Schaffhousois s’est depuis découvert un talent pour la guerre. Il sert désormais comme tireur d’élite dans une unité de combattants volontaires sur le front de l’Est, dans des territoires occupés par l’armée russe. «Beaucoup pensent que les gens comme moi viennent ici pour jouer à la guerre, pour tuer», raconte-t-il à la SRF. «Mais ce qui m’intéresse, ce sont les civils que je peux sauver.»
Et c’est bien là que réside sa principale source de motivation. «Je ne veux plus emballer de petits enfants dans des sacs plastiques», explique Avi Motola. «Et si, grâce à mon travail, il n’y en a au moins un de moins, cela en aura valu la peine.»
Pour s’engager, le Suisse a dû laisser derrière lui un fils de quatre ans. Un enfant à qui il prévoit de rendre visite ce mois-ci, avant de repartir à la guerre. «Je me demande les jours qu'est-ce que je fous ici, confie-t-il. Mais si tous ceux qui ont quelque chose à perdre ne se battaient pas, ce serait déjà fini depuis longtemps.»