Accusé d’abus sexuels – Le fils du père incestueux est condamné pour viol

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Accusé d’abus sexuelsLe fils du père incestueux est condamné pour viol

Le verdict est tombé. Le jeune Vaudois de 19 ans, l’un des garçons de la fratrie fracassée par ses parents incestueux, écope de 9 mois avec sursis pendant 4 ans. Il n’ira pas en prison.

Evelyne Emeri
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Evelyne Emeri
Ce mercredi après-midi 8 décembre, le Tribunal correctionnel d’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a rendu son verdict.

Ce mercredi après-midi 8 décembre, le Tribunal correctionnel d’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a rendu son verdict.

Jean-Paul Guinnard

La juste peine. Exercice périlleux de tout temps pour les juges. Exercice encore plus délicat lorsque ces mêmes juges doivent se replonger, par ricochet, dans la pire affaire de maltraitance que la Suisse ait jamais connue en mars 2018: un père pédophile et cruel avec ses huit enfants; et une épouse qu’il violentait, qui l’a couvert durant onze années et qui frappait aussi. De leur union sont nés cinq garçons et trois filles. L’un de leur fils a comparu mardi devant le Tribunal correctionnel d’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois.

Faire comme papa

Pour avoir voulu faire comme papa avec ses grandes sœurs, notamment. Pour avoir assisté aux orgies familiales, répétées et incessantes, et à tant d’autres abus, ce jeune de 19 ans répondait de viol et de contrainte sexuelle, subsidiairement d’actes d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance. Il est reproché à ce gosse – dont les retards mentaux, de développement et de construction sont saisissants - d’avoir abusé de l’une de ses camarades dans un foyer du canton de Vaud une nuit d’août 2020. La jeune fille de tout juste 16 ans, hémiplégique après un AVC, également cabossée par la vie, a perdu sa virginité ce soir-là.

Courageuse procureure

Face à cette avalanche de détresse de part et d’autre de la barre, la procureure Valérie de Watteville Subilia avait abandonné l’entier des charges qui pesaient contre le Vaudois sans remettre en cause la souffrance réelle de la plaignante: «Elle n’a pas su verbaliser son refus, il y a clairement eu des incompréhensions. Il n’y a eu aucune contrainte, aucune violence de la part du prévenu, elle n’en fait pas état. Il pensait qu’elle était consentante». Elle avait requis l’acquittement et le transfert immédiat du dossier à la justice de paix pour le suivi de l’accusé. Elle avait aussi requis une indemnité de 14 700 francs pour détention injustifiée (88 jours). Un réquisitoire qui avait légitimement fait grincer des dents la partie plaignante. Et réjoui la défense.

Coupable, partiellement

Était-elle consentante? A-t-elle protesté? Les versions concordent parfois, parfois pas. Le prévenu savait-il que ce n’était pas bien ce qu’il faisait (ndlr. déclarations contradictoires) ou simplement «normal» pour lui? A-t-il agi intentionnellement? Tous deux s’appréciaient et s’aimaient bien. Ils se faisaient même des hugs (ndlr. accolades). Ce mercredi en fin d’après-midi, la Cour d’Yverdon a tranché et l’a jugé coupable, s’écartant clairement du réquisitoire du Parquet. Si elle ne retient pas la contrainte sexuelle, subsidiairement les actes d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance, elle retient le viol pour la seconde intrusion dans la chambre de la jeune victime.

La victime dit vrai

«Nous n’avons pas de raison de douter des propos de la plaignante quand elle prétend qu’elle lui a dit qu’elle avait mal lors de la pénétration vaginale (ndlr. elle était vierge) et qu’elle lui a demandé d’arrêter. C’est donc volontairement que le prévenu a poursuivi l’acte. Pour cette raison, le viol doit être retenu», détaille le président de céans Alban Ballif. Et de poursuivre: «Sa culpabilité est jugée moyenne, sa responsabilité pénale également. Si l’on tient compte de la situation particulière et de l’absence d’antécédents de l’auteur, c’est une peine de 9 mois avec sursis pendant 4 ans à laquelle il doit être condamné. De même qu’à un traitement ambulatoire au sens de l’article 63 du Code pénal. Les mesures de substitution (ndlr. depuis sa sortie de détention provisoire), notamment le suivi psychosexuel et psychiatrique, seront maintenues».

Le Ministère public fera-t-il appel de cette condamnation? Trop tôt pour le dire.

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