Evolution climatique: Les piscines privées sont-elles devenues un plaisir coupable?

Une enquête de la RTS, diffusée dimanche soir à l’émission «Mise au point», révèle qu’il y a en Suisse quelque 56 000 piscines ou bassins privés et publics d’au moins 24 m2. C’est un véritable travail de fourmi qui a été fait par ses enquêteurs: «Aucun registre national n’existe, note-t-elle. Pour établir une estimation, la cellule data de la RTS s’est alors appuyée sur une base de données issues d’images aériennes de l’Office fédéral de topographie».

La RTS met à disposition de tout un chacun une carte interactive où l’on peut savoir, commune par commune, le nombre de piscines privées qui s’y trouvent. «Celles-ci sont réparties de façon très inégale, note la chaîne. Elles sont particulièrement prisées par les habitants de certaines communes tessinoises et sur les bords du Léman». Lugano s’illustre avec 730 piscines privées, soit 11,9 bassins pour 1000 habitants. La palme de la concentration revient à la commune huppée genevoise de Vandœuvres avec 267 bassins, soit 94 bassins pour 1000 habitants. Dans les autres cantons romands, ce sont les communes de Blonay-Saint-Légier (VD), Estavayer (FR), La Grande-Béroche (NE), Fully (VS) et Haute-Sorne (JU) qui s’illustrent par leur nombre de piscines.

L’intérêt de cette recherche est de susciter le débat sur l’utilisation de l’eau, alors que les sécheresses ont tendance à se multiplier: «La piscine privée, un luxe incompatible avec l’intensification des sécheresses?» s’interroge «Mise au point». Certaines régions en France ou en Italie interdisent déjà leur remplissage cet été. «Chez nous aussi, la question se pose, alors que des communes ont déjà émis des restrictions d’eau avant même le début de l’été».

Pour remplir ces piscines en Suisse, il faut compter 3,5 milliards de litres d’eau, soit la consommation annuelle de 70 000 personnes.  «Peut-on se le permettre?» demande la RTS. Pour le savoir, l’émission «Mise au Point» s’est rendue dans la commune de Blonay-Sainté-Légier, qui avait interdit l’année dernière le remplissage des bassins en pleine canicule.

Deux habitants y ont même lancé une pétition pour interdire de nouvelles piscines. Son syndic, Alain Bovay, en possède lui-même une et ne souhaite pas en arriver là, car il n’existe pas de base légale pour le faire. «Du moment que le règlement communal l’autorise, dit-il, on ne va pas faire deux poids deux mesures entre ceux qui ont eu de la chance et qui ont pu construire leurs piscines, et ceux qui ne pourraient plus le faire».

Pour l’instant donc, les piscines privées ne semblent pas poser de gros problèmes. Quant à savoir ce que l’avenir leur réserve, tout dépendra de l’eau qui restera à disposition. Si elle vient à manquer, la baignade privative pourrait bien devenir un plaisir coupable.