Motocyclisme - Après les équilibristes, les indestructibles

Un équilibriste qui gagne en pneus slicks (lisses) sur une piste devenue détrempée: c’était il y a quinze jours, chef-d’œuvre du Sud-Africain Brad Binder (KTM), sur le Red Bull Ring autrichien. Des hommes qui tombent – l‘un à très grande vitesse, l’autre beaucoup moins… ce qui fait généralement plus mal – et qui se relèvent, qui repartent à l’assaut du chronomètre. C’était ce vendredi, sur le mythique circuit britannique de Silverstone.

Premier acte, première séance d’essais libres MotoGP: Marc Márquez, l’octuple champion du monde, semble plus proche que jamais de sa forme d’avant son terrible accident de Jerez de la Frontera, à l’été 2020. On le voit à son comportement, au langage corporel qu’il dégage… et au chronomètre. Pourtant, à un endroit où aucun pilote ne veut tomber, sa Honda décroche soudainement.

À 274 km/h, Márquez est éjecté dans les airs, on n’arrive pas à compter le nombre de ses roulés-boulés, alors que sa machine va exploser de l’autre côté du bac à sable, au milieu de la piste. Le drapeau rouge est immédiatement présenté, l’Espagnol se relève, secoue sa tête pour reprendre ses esprits et rentre à son stand, le regard sombre. Blessures? Aucune… si ce n’est un grain de sable qui est entré dans un œil et qui en est immédiatement extrait. Quatre heures plus tard, dans la seconde séance du jour, il améliore son chrono matinal de 9 dixièmes. Le travail continue…

Nous voici donc en début d’après-midi. Et voilà que Fabio Quartararo, le net leader (47 points) du championnat du monde MotoGP, va être victime lui aussi du froid ambiant. Dans le virage No 8, l’un des plus lents du circuit de Silverstone, à 80 km/h. Pourtant, c’est généralement à basse vitesse que l’on se fait le plus mal, et c’est le cas pour le Niçois désarçonné de sa Yamaha et dont la cheville gauche est heurtée par sa propre moto.

Au sol, Quartararo regarde le bas de son corps, on voit qu’il a mal, il peine à se relever. Aidé par les commissaires de piste, il s’éloigne de l’endroit de l’accident appuyé sur l’un de ces bénévoles sans qui les courses n’existeraient pas. Il marche à peine, demande de s’arrêter, grimace et continue. Ramené derrière son stand, il grimpe les quelques marches qui mènent à son local privé, aménagé dans l’un des camions de l’équipe Yamaha. On lit la souffrance sur son visage, on la devine aux efforts qu’il doit fournir.

Dix minutes plus tard, il ressort, engoncé dans un cuir neuf; la démarche est encore hésitante, mais la volonté est de retour. Un bref briefing avec son responsable technique, sa seconde moto chauffe déjà. Il repart et en deux tours, signe le meilleur temps du jour, avec un écart qui en dit long sur l’état d’esprit et le talent du pilote français: une demi-seconde de mieux que tout le monde! Même sur un circuit aussi long (5900 mètres), c’est énorme. Premier diagnostic des médecins: «Un petit ligament légèrement distendu. Cela le gênera pour marcher, mais pas pour piloter sa moto.»

Maverick Viñales va donc monter pour la première fois sur l’Aprilia RS-GP, la machine qu’il pilotera l’an prochain, mardi à Misano. Peut-on imaginer le voir déjà en course cette saison, quand bien même il a été libéré de toutes ses obligations envers son désormais ex-employeur, Yamaha? «Nous sommes maintenant concentrés sur le test à venir, on décidera ensuite de la possibilité d’aligner Maverick lors de quelques GP», explique le manager d’Aprilia, Massimo Rivola.

«Pour une marque comme Aprilia, c’est une opportunité formidable. Selon moi, Maverick est l’un des, si ce n’est le plus grand talent du paddock», ajoute l’Italien. Précision: en tant que marque qui n’a pas encore obtenu de podiums en MotoGP, Aprilia a droit à plusieurs wild cards pendant la saison; c’est dire qu’on pourrait voir trois RS-GP en piste très bientôt!

C’est bien sûr à prendre encore avec des pincettes, situation sanitaire oblige, mais les premières dates du prochain championnat du monde ont été fixées: le shakedown MotoGP (pour les pilotes de tests et les «rookies») se tiendra du 31 janvier au 2 février, à Sepang (Malaisie). Une semaine plus tard, premiers tests officiels de la catégorie reine au même endroit (5-6 février) et, du 11 au 13 février, Quartararo & Cie découvriront, en Indonésie, le nouveau Mandalika Street Circuit, dont les travaux ne sont pas terminés à l’heure actuelle. Pour les classes Moto2 et Moto2, le traditionnel rendez-vous d’avant-saison se tiendra à Jerez de la Frontera, du 22 au 24 février. Premier GP prévu au Qatar, le dimanche 6 mars.