Jeu vidéo«The Wreck», l’émotion intacte malgré tout
Paradoxe des jeux vidéo: ils restent de langue anglaise même si, comme c’est le cas ici, l’âme du jeu est profondément française.
- par
- Jean-Charles Canet
Vous n’allez par rire beaucoup en pratiquant «The Wreck» (littéralement «L’épave»), jeu vidéo sorti en ce mois de mars qui tient plus de l’expérience interactive que du shooter ou de la simulation sportive. Mais vous allez peut-être fugacement sourire parce que la tranche de vie à laquelle vous imprimerez votre rythme n’est pas totalement dépourvue d’humour. Mais vous allez être surtout émus.
Comme son titre ne l’indique pas, «The Wreck» est un jeu français, dont l’action se situe en France, avec des Français et dont la façon d’explorer les émotions est, elle aussi, profondément française. Cela se ressent dans les petits détails. La façon d’évoquer une relation amoureuse, la façon d’exposer une relation mère fille, la façon de suggérer une relation avec son enfant, la façon de se confronter au monde. Ajoutons dans le cocktail un soupçon de deuil, un brin de fin de vie, un accident de voiture tragique et une séparation parce que la vie sépare ceux qui s’aiment.
«The Wreck» est pourtant un jeu puisqu’il se pratique, sur Xbox, PlayStation, Switch et sur Windows. Un jeu narratif, comme l’est «What Remains of Edith Finch», bouleversante exploration d’une famille dysfonctionnelle sur plusieurs générations (et maudite, approche très anglo-saxonne). Mais son regard hexagonal exclut tout fantastique. Le jeu reste ancré dans le quotidien, dans le réalisme. Il reflète les émois de Junon, une jeune adulte de la classe moyenne supérieure: elle est scénariste. Son compagnon travaille dans l’industrie du jeu vidéo. Maman est une artiste reconnue…
Alors comment se fait-il que «The Wreck» soit pourvu d’un titre en anglais, que ses dialogues ne soient disponibles que dans une seule langue… anglaise (avec un accent français, charmant) et que, dans les options, seul l’écrit puisse être en français? On ne cache pas que cela nous a surpris tant l’âme du jeu est française. C’est comme si ou visionnait un film de Claude Sautet ( «Les choses de la vie», par exemple) doublé en anglais.
La puissance émotionnelle de «The Wreck» n’est pas grandement affectée par cette bizarrerie qui s’explique très certainement par la modestie de la production et les conditions d’un marché mondialisé. La qualité de l’écriture, des dialogues et de la construction l’emportent. Une expérience adulte, ni trop courte, ni trop longue, à tenter sur la plateforme de votre choix.