Cyclisme: Marc Madiot - «Ce ne sont que quelques litres d’eau!»

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CyclismeMarc Madiot: «Ce ne sont que quelques litres d’eau!»

Le manager de Groupama-FdJ de Stefan Küng s’est mis en colère, ce lundi, à Carcassonne, quand on lui a demandé s’il était raisonnable d’arroser les routes du Tour alors que la France s’embrase…

Christian Maillard Carcassonne
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Christian Maillard Carcassonne
On arrose les routes du Tour? Et alors. Pour Marc Madiot, «ce ne sont que des litres d’eau»…

On arrose les routes du Tour? Et alors. Pour Marc Madiot, «ce ne sont que des litres d’eau»…

LMS

Manager de l’équipe Groupama FDJ, celle de Stefan Küng, de Thibaut Pinot et de David Gaudu, Marc Madiot n’est pas du genre à mettre la langue dans sa poche. Quand il a quelque chose sur le cœur ou une question qui le heurte, il s’emballe.

Ce lundi à Carcassonne, jour de repos, le Français était à la disposition des journalistes. On a hésité à lui demander s’il allait regarder le Tour féminin, la semaine prochaine, mais on s’est dit que ce n’était pas le moment de lui rappeler son dérapage sur le plateau de Jacques Chancel, en 1986, lorsqu’il avait déclaré dans les yeux à Jeannie Longo «qu’une femme sur un vélo, c’est moche.»

On ignore s’il regrette aujourd’hui ses propos, mais ce qu’on sait c’est qu’il s’est fâché lorsqu’on lui a posé la question sur le réchauffement climatique. Le double vainqueur de Paris-Roubaix (1985 et 1991) ne va pas, une fois de plus, se faire que des copains…

Marc Madiot, on a vu ce dimanche entre Rodez et Carcassonne, un camion qui arrosait les routes du Tour. Est-ce raisonnable alors que le pays est en état d’urgence avec les incendies et qu’on parle d’une pénurie d’eau?

Oui, bien sûr que c’est raisonnable et je vais même aller plus loin. Je ne comprends même pas pourquoi on pose cette question.

Pourquoi?

Si on avait affaire à des animaux, on ne me poserait pas de question pour les soigner ou les mettre en bonnes conditions. Qu’on arrose la route pour favoriser le passage du Tour de France? Ce ne sont que quelques litres d’eau. Je trouve décevant qu’on prête aussi peu d’intérêt au petit bien-être des coureurs. Car quand on est coureur cycliste on reste un homme et je pense qu’on a le droit d’avoir un minimum de considération et de respect. Je trouve que ce que fait ASO, la société du Tour, par rapport à la protection du parcours mais aussi l’UCI (Union cycliste internationale) ainsi que le syndicat des coureurs font tout pour faciliter la vie des coureurs dans ces circonstances particulières. Mais ce n’est pas tous les jours qu’on arrose une route pour le passage de la course. J’aimerais aussi vous rappeler une chose.

‹‹Je trouve décevant qu’on prête aussi peu d’intérêt au petit bien-être des coureurs. Car quand on est coureur cycliste on reste un homme et je pense qu’on a le droit d’avoir un minimum de considération et de respect.››

Marc Madiot, manager de Groupama FDJ

Que voulez-vous nous rappeler?

Que le Tour de France c’est 8 à 9 millions de téléspectateurs en France et ces 8 ou 9 millions de téléspectateurs sont souvent des gens qui n’ont pas la chance d’aller en vacances ou qui sont dans des maisons de retraite. Je pense que c’est une chance qu’on leur offre. Le Tour de France qu’on met sous leurs yeux c’est quelque chose de fort et d’important, et ça ne peut pas se limiter à quelques litres d’eau qu’on mettrait sur les routes pour permettre le passage des coureurs dans les meilleures conditions. Voilà ma réponse.

À l’image de Tadej Pogacar, les coureurs s’arrosent aussi d’eau…

À l’image de Tadej Pogacar, les coureurs s’arrosent aussi d’eau…

AFP

Est-ce que selon vous, il y aurait d’autres mesures à prendre que d’arroser la route pour le bien-être des coureurs, comme des départs plus tôt par exemple?

Ça peut être une option, en effet. On pourrait peut-être également aménager des points d’arrosage pour les coureurs plutôt que la route. On a évoqué cela avec Thierry Gouvenou, le responsable du parcours, et je crois que ça mérite une réflexion. Il est clair qu’il va falloir trouver des moyens de permettre à la course de continuer, dans les prochaines années, si on est toujours dans ces mêmes situations. J’avoue que cela fait un certain nombre d’années que je suis sur le Tour de France et c’est la première fois qu’on rencontre des situations aussi périlleuses. Il faut être réaliste, on ne peut pas réitérer ce qu’on a fait dimanche, des jours et des jours. Il y a beaucoup de courage chez tous les coureurs et les membres de l’encadrement pour assurer leur hydratation mais s’il y a des choses qu’on peut faire une fois de temps en temps, c’est impossible de réaliser ça au quotidien et régulièrement. Je pense qu’il faut qu’on ait cette capacité de réflexion à aménager les situations.

En continuant d’arroser les routes et les coureurs?

On a des progrès à faire sur l’hydratation sur l’aménagement du parcours et je pense qu’on peut trouver des solutions, et tant pis si ça coûte quelques litres d’eau. Mais les coureurs le méritent, la grandeur de la course aussi. Sinon on arrête tout, on va tous à la pêche et on attend tranquillement l’heure d’aller au cimetière!

‹‹J’estime que c’est un brin de bonheur qu’on apporte à ces personnes et il faut essayer de le garder dans une période estivale. Ça permet de réjouir et de sortir des méandres et des difficultés que la vie nous réserve chaque jour.››

Marc Madiot, manager de Groupama-FdJ

Peut-on aussi organiser le Tour plus tard, en octobre par exemple, comme il y a deux ans en situation de Covid?

Oui mais… non. Je pense que le Tour c’est vraiment l’événement majeur de l’été. C’est un rendez-vous important pour beaucoup de gens, comme ceux qui regardent la télé l’après-midi ou ces gens qui sont dans une maison de retraite. J’estime que c’est un brin de bonheur qu’on apporte à ces personnes et il faut essayer de le garder dans une période estivale. Ça permet de réjouir et de sortir des méandres et des difficultés que la vie nous réserve chaque jour.

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