Qatar 2022Analyse: l’Argentine ne se fait plus peur, elle fait peur
Emmené par un Messi tout-puissant, l’Albiceleste a enfin traversé l’entier d’un match sans s’égarer (3-0 contre la Croatie). Est-elle mûre pour le titre? Réponse dimanche.
- par
- Florian Vaney Doha
La fête argentine était belle mardi dans l’air toujours aussi agréable de Doha. Des buts, une victoire totale, un stade qui résonne et cette communion finale entre joueurs et supporters toujours aussi sympathique à observer. Seulement, cette fête ne pourra être totale qu’avec une victoire dimanche. Personne ne s’est jamais contenté d’une place en finale, certainement pas une grande nation du football, encore moins une sélection en mission comme l’est l’Albiceleste. Elle a fait voler la Croatie en éclats (3-0) en se prouvant qu’elle n’avait pas nécessairement à souffrir 90 minutes pour arriver à ses fins. La valeur de cet enseignement se mesurera en finale, face à la France ou au Maroc.
Les trois enseignements
Évoquer une progression sur une aussi courte période a quelque chose de délicat. Mais on peut au moins estimer qu’il s’agit d’un chaînon qui n’est plus manquant. Le tournoi des Argentins jusqu’ici s’était composé de patience, de gestion des émotions, d’acceptation des échecs d’un jour et des oublis d’un instant. Jamais tranquille, toujours sur un fil. Et voilà qu’en demi-finale, tout s’est succédé à la perfection. Des buts qui tombent régulièrement, presque aucun moment de faiblesse, un Lionel Messi toujours plus impressionnant. Cette victoire-là, l’Argentine ne l’avait pas encore à sa collection. Elle lui offre encore un peu plus de relief.
Il y a les mots, qui annoncent une Argentine en mission, une prophétie qui doit relier deux génies, feu Diego Maradona et Lionel Messi. Et puis il y a les actes. Cet homme-là n’est plus seulement décisif, il est tout-puissant. Le penalty qu’il envoie sous la latte pour le 1-0 semble quasi inarrêtable. Sa chevauchée qui offre le 3-0 à Julian Alvarez est un condensé sur dix secondes de toute la magie que la «Pulga» possède dans ses pieds. Pour une des premières fois de la compétition, Messi s’est permis quelques gestes juste pour allumer la foule, prouesses techniques ou de malice pas forcément nécessaires mais tellement plaisantes pour les yeux. Façon de poser son sceau tout entier sur cette Coupe du monde.
La Croatie s’est-elle vue un peu trop belle après une demi-heure de possession de balle? Un peu trop sûr de pouvoir échapper à son habitude de terminer un match à élimination directe aux tirs au but et d’imposer sa loi? C’est une théorie, qui trouve sa contenance dans la façon dont les Croates se sont fait transpercer plein axe à deux reprises en dix minutes. Tout tient à un étonnant raté de Luka Modric la première fois et à deux contres défavorables la seconde fois. Reste que ce n’est pas commode d’observer un groupe aussi solide depuis des années s’écarteler de la sorte.
Le duo du match: Lionel Messi et Julian Alvarez
Ces deux hommes peuvent bien évoluer au même poste, ils n’ont pas le même rôle. Il y a celui qui court, tant et plus, qui compense, qui appelle, et il y a celui qui réfléchit à son prochain coup d’éclat. Mardi, les deux ont largement trouvé leur compte. Ils se sont même offerts et rendus tous les cadeaux. Un penalty obtenu par Julian Alvarez pour Lionel Messi, un solo de 30 mètres du second pour ouvrir le but au premier. Juste de quoi bien effrayer le futur autre finaliste.
Le moins bon: Josko Gvardiol
À force d’apparaître dans les équipes types des trois premiers quarts du Mondial, le défenseur central s’était bâti une jolie réputation au Qatar. Il est entré par la grande porte, il ressort par la petite, peu sûr de lui face à l’Argentine et ridiculisé par Lionel Messi sur le 3-0.
La décla’
La statistique
2,4. C’est le nombre de buts qu’aurait dû encaisser l’Argentine depuis le début de la Coupe du monde selon le modèle des expected goals. Soit un total (le plus faible de la compétition avec le Brésil) de 0,38 but par période de 90 minutes. C’est peu, très peu. Et ça confirme que, derrière un Lionel Messi capable de faire basculer n’importe quel match, les Argentins ne laissent presque aucune ouverture à leurs adversaires.
La question de la finale
Les deux options sont les suivantes. Soit l’Argentine affronte le Maroc, embrasse le rôle de favorite mais perd une partie de la force transmise par son douzième homme dans les tribunes. Soit elle fait face à la France, l’adversaire le plus effrayant possible, mais dans un stade tout acquis à sa cause.
Des deux, quelle est la plus profitable pour aller chercher une troisième étoile?