Montreux (VD)La restauratrice anti-pass rouvrira le lendemain de son procès
Sa désobéissance lui a valu la fermeture de son établissement montreusien depuis fin septembre. Et une amende salée qu’elle refuse de payer.
- par
- Evelyne Emeri
9000 francs. C’est le montant auquel Lynn Dardenne, 42 ans, et son oncle, co-gérants du café Territet & Co ont été condamnés à parts égales. L’ordonnance pénale a été rendue par la préfecture Riviera-Pays d'Enhaut début décembre 2021. Cette sanction faisait suite à la décision de l'Etat-major cantonal de conduite (EMCC) - cellule de crise Covid - de fermer l’établissement du village montreusien fin septembre pour avoir enfreint les nouvelles mesures sanitaires liées au pass Covid et entrées en force le 13 septembre 2021.
«Un boulot de malade mental»
La restauratrice vaudoise refusait catégoriquement de contrôler ses clients à l’intérieur de son café, ni les certificats et encore moins les cartes d’identité. Elle ne s’en était du reste pas cachée et avait averti la Police du commerce en amont. «Une grève éthique», souligne la dissidente que nous rencontrons dans son antre. Le contrôle du certificat, ça a été la goutte qui a fait déborder le vase. «J’ai ouvert en octobre 2020, entre la première et la deuxième vague. Il y a eu les fermetures, les mini-réouvertures, le social pass, les QR codes sur les tables, la distanciation, les tables de 4, les mains, le masque, s’égosiller, faire la police… C’était un boulot de malade mental», tonne la présumée coupable.
Pas antivax
«Je ne suis pas antivax. Je voulais pouvoir recevoir des gens injectés et pas injectés, sans discrimination». La patronne récalcitrante a bien essayé de recourir contre cette décision administrative devant la Cour cantonale, sans succès. Elle a hésité à grimper au Tribunal fédéral (TF) avant de renoncer l’âme en peine, faute de moyens, d’énergie et peut-être de chances de réussite. La conseillère communale de Montreux, ex-radicale, membre fondatrice de «Droits et Liberté», a préféré se concentrer sur l’audience pénale agendée début mars et sur sa candidature au Grand Conseil et au Conseil d’État sur la liste de l’Alliance des libertés.
Elle a bien tenté de rouvrir sa terrasse, en vain également: «L'Etat-major de conduite n’est pas entré en matière. Ils veulent faire de moi un exemple. Je suis la première en Suisse romande à avoir contesté cette dictature et à m’être rebellée contre ces contraintes qui, selon moi, n’ont pas de base légale. Il s’agit d’une ordonnance, pas d’une loi, qui stipule l’obligation du certificat mais qui n’indique pas que le restaurateur doit le contrôler. On nage dans l’arbitraire et l’incohérence». Le fait qu’elle ne soit elle-même pas vaccinée a-t-il joué un rôle? «Je n’espère pas.»
«Une question de principe»
La politicienne est en colère, elle n’est pas la seule, et s’est érigée en fer de lance d’autres établissements restés bien plus discrets sur leur politique de contrôle et bien moins transparents. Accusée d’infraction à la loi fédérale sur les épidémies, Lynn Dardenne est remontée à bloc. Elle est prête à plaider sa cause lors de l’audience pénale qui se tiendra au Tribunal de Vevey le jeudi 3 mars, dès 14h. Avec son avocat Me Philippe Dal Col, elle compte bien faire annuler son amende: «C’est une question de principe. Si je suis condamnée à payer cette somme, je la commuerais en travaux d’intérêt général. Ce sera bien plus constructif pour la société».
Jugée le 3, ouverte le 4?
Lynn Dardenne craint toutefois que les juges lui retirent sa patente (ndlr. celle de son oncle en réalité). «La police du commerce m’avait menacée de suspendre la patente durant 5 ans et de revoir mon projet de concept store (ndlr. café-restaurant-bar éclectique avec une scène pour l’humour, le théâtre, la musique etc. + épicerie fine) tel qu’il a été homologué officiellement», confie encore la co-prévenue. Hasard du calendrier, la créatrice du concept store Territet & Co a prévu de rouvrir le vendredi 4 mars - le Conseil fédéral a levé les mesures depuis le 16 février - au lendemain de son procès.