Football – Maxime Odiet, de Porrentruy à la Challenge League au sifflet

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FootballMaxime Odiet, de Porrentruy à la Challenge League au sifflet

Le Bruntrutain (28 ans) dirige avec un certain succès ses premiers matches de deuxième division. Ouvert au dialogue, il colle à merveille à la nouvelle image que cherche à se donner l’arbitrage suisse. Rencontre.

Florian Vaney
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Florian Vaney
Maxime Odiet arbitre en Challenge League.

Maxime Odiet arbitre en Challenge League.

Andy Mueller/Freshfocus

Dans son quartier de Porrentruy, un terrain de foot. Dans sa famille, des footeux. À ses pieds, des crampons. Non, Maxime Odiet n’était pas prédestiné par sa région natale à devenir hockeyeur. N’en déplaisent au succès du sport de glace dans le canton et à l’état des pelouses jurassiennes parfois limites. «Footballeur, ça n’a pas duré bien longtemps. Le temps que je comprenne, vers 15 ans, que je n’étais pas forcément fait pour jouer.» Il attrape un sifflet. Treize ans plus tard, il le tient toujours. En Challenge League.

De son propre aveu, il est plutôt bien tombé pour ses premiers matches de deuxième division. Deux rencontres tranquilles, sans décision «clutch» susceptibles de changer le cours du jeu. Tranquilles, vraiment? La seconde l’a mené à la Pontaise mardi soir, où l’attendait un chaud derby vaudois (finalement plutôt froid) et où il n’a pas manqué de s’attirer les foudres des supporters d’Yverdon Sport. «Je n’ai pas vraiment fait attention, à vrai dire. J’étais tellement pris dans mon match… En tout cas, j’ai été honoré de me voir confier si rapidement un tel duel», apprécie l’homme de 28 ans.

«Si un joueur, un entraîneur ou un dirigeant veut discuter de telle ou telle décision, ma porte est ouverte après un match»

Maxime Odiet

Accepter le courroux des fans, la qualité est nécessaire. Aujourd’hui devant 500 spectateurs, demain peut-être à Saint-Jacques ou au Wankdorf. «Je les comprends. Ma partie s’est plutôt bien déroulée mardi, mais je n’étais pas parfait. Il y a eu quelques erreurs, qui peuvent irriter. C’est normal», accepte-t-il humblement.

Maxime Odiet peut désormais tenir le panneau de quatrième arbitre en Super League.

Maxime Odiet peut désormais tenir le panneau de quatrième arbitre en Super League.

Freshfocus

Le mot exact, c’est empathie. Maxime Odiet ne s’en sépare jamais. Du moins, il essaie. «Disons qu’il y a les épisodes où il ne faut montrer aucun signe d’hésitation. Un penalty, un carton rouge… Cinq minutes plus tard, à la mi-temps, après le match, il y a lieu de s’expliquer. Mais sur le moment, on ne peut que montrer une conviction totale.»

Et puis il y a le reste. «Je ne suis pas du genre à m’enfermer, ou à tomber dans l’arrogance qu’on prête parfois aux arbitres. Si un joueur, un entraîneur ou un dirigeant veut discuter de telle ou telle décision, ma porte est ouverte après un match. Même pendant, il m’arrive facilement de reconnaître mes erreurs, de faire savoir que je n’ai pris «que» la meilleure décision à mes yeux.»

Un bon modèle pour une nouvelle philosophie

Le pont est tout tracé avec ses patrons. Depuis l’arrivée de Christophe Girard à la tête de la commission des arbitres de l’ASF, les mots d’ordre sont «ouverture, transparence, dialogue». Sur le plateau de la RTS récemment, l’homme s’est même vu félicité pour sa démarche novatrice par le réputé journaliste Vincent Duluc. Le processus débute, les arbitres de Super League n’en sont pas encore à venir s’expliquer en zone mixte après avoir donné le coup de sifflet final d’une rencontre, l’article que vous lisez ici a dû passer entre les mains de l’ASF, mais la volonté mérite d’être soulignée et encouragée.

Au sifflet d’un derby nord-vaudois en 2017. On reconnaît un certain Djibril Cissé (deuxième depuis la droite).

Au sifflet d’un derby nord-vaudois en 2017. On reconnaît un certain Djibril Cissé (deuxième depuis la droite).

Twitter: Yverdon Sport

«Je crois que l’enjeu important là-dedans, c’est l’humanité. Soit de faire savoir que les arbitres sont des gens comme les autres. Vous l’entendez, je n’ai pas de peine à évoquer un match précis ou une décision litigieuse. Se diriger dans cette direction, ça me paraît être une belle avancée pour tout le monde.»

La fuite en avant

Celle de Maxime Odiet s’est faite sans brûler les étapes. Il est bien conscient de ne pas être le plus précoce des hommes en noir. «Certains parviennent où j’en suis à 24, 25 ans.» D’autres, beaucoup d’autres, restent bloqués plus bas. Le périple est long, les sacrifices nombreux. Avant de se voir confier un sifflet en Challenge League, le Jurassien a au moins porté vingt fois le panneau de quatrième arbitre.

«Il faut savoir regarder en arrière, apprécier le chemin parcouru. Sinon on ne profite jamais. Après la Challenge League, il y a la Super League. Ensuite l’international. L’Europa League, la Champions League. Ça ne s’arrête pas.»

Alors modestement, il savoure un Stade-Lausanne - Yverdon presque comme une finale de Coupe du monde. Sans trop penser à la suite. Et surtout en redescendant avec un plaisir intact arbitrer un match de série inférieure.

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