FranceLa plus grande usine de clopes de contrefaçon jamais découverte à ce jour
Alertée par Europol, la police française a démantelé jeudi une gigantesque fabrique de cigarettes de contrebande située près de Rouen, la plus importante mise au jour en France à ce stade.
Il y avait tout pour fabriquer, conditionner, expédier les cigarettes de contrefaçon, y compris un espace de vie pour ne pas avoir à quitter les lieux. Les gendarmes ont démantelé jeudi près de Rouen la plus importante fabrique clandestine de cigarettes à ce jour en France.
Prix de revente de 13,7 millions d’euros
Plus de 100 tonnes de produits (55 tonnes de cigarettes, 50 tonnes d’étiquettes, filtres, papiers, emballages... et 18 tonnes de résidus de tabac et de déchets de cigarettes) ont été saisies. Le prix de revente de tabac contrefait est évalué à 13,7 millions d’euros (environ 13,8 millions de francs), selon la gendarmerie nationale. Ce qui en fait la plus importante fabrique clandestine découverte à ce jour en France.
La première l’avait été en décembre 2021 par les douanes à Poincy, une petite commune de Seine-et-Marne de 750 habitants. Depuis cette «première», deux autres ateliers clandestins ont été mis au jour: un site de conditionnement à La Longueville (Nord) et un lieu de stockage à Poincy, encore. Le trafic est en plein essor: plus de 284 tonnes de tabac de contrebande ont été saisies en 2020 en France, 402 tonnes en 2021 et plus de 600 tonnes, dont plus de deux tiers de cigarettes, sur les dix premiers mois de 2022. Le 12 janvier, les gendarmes, alertés par Europol fin 2022 sur la présence d’un trafic international de cigarettes dans la zone industrielle de Saint-Aubin-les-Elbeuf, près de Rouen, découvrent une véritable usine intégrée.
Parfaite autonomie
La fabrique, qu’une soixantaine de gendarmes investissent, comprend trois unités. Une unité de production avec deux chaînes, une de confection des cigarettes à partir de tabac brut et une autre dédiée au conditionnement en paquets puis en cartouches au nom d’un fabriquant célèbre. Il y a aussi une zone de stockage où les cartouches de cigarettes sont conditionnées en carton sur des palettes recouvertes de film, le tout prêt à être livré.
Enfin, une zone de vie complète l’ensemble, avec un dortoir équipé d’une quinzaine de couchages, un coin cuisine, un coin repas et un espace détente, qui permettait aux malfaiteurs de vivre sur place en toute autonomie. Il y avait en outre un groupe électrogène. L’ensemble des produits saisis a été détruit immédiatement, de même que les machines de production, a précisé la gendarmerie. Neuf personnes, âgées de 21 à 55 ans, toutes de nationalité étrangère, ont été interpellées et placées en garde à vue. La majorité d’entre elles sont de nationalité moldave.
Profits énormes
Au regard de l’ampleur de ce dossier, le parquet de Rouen s’est dessaisi au profit de la Junalco (Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée) de Paris, qui a sollicité notamment l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante (OCLDI) et le Service d’enquêtes judiciaires des Finances (SEJF). Les neuf personnes interpellées étaient présentées dimanche à la justice à Paris.
Les profits énormes générés suscitent l’appétit d’organisations criminelles souvent spécialisées dans les stupéfiants, qui cherchent à se diversifier. «Le coût de fabrication est d’un euro par paquet, le reste c’est de la marge», rappelait début décembre Christophe Perruaux, directeur du SEJF, en charge des deux affaires de Poincy et maintenant de celle de Rouen. «Une usine clandestine fonctionne pendant maximum trois mois», expliquait début décembre le patron du renseignement douanier, Florian Colas. De ses lignes de production sortent en moyenne 70 paquets à la minute, 4200 cartouches de l’heure. A raison de 8 heures par jour, ces usines rapportent, selon les renseignements douaniers, de 80’000 à 120’000 euros la journée, soit 7 millions d’euros pour trois mois (environ 7 millions de francs).