TennisL’homme qui rejouait service-volée
Révélation anachronique du début de saison, Maxime Cressy a enchaîné 283 fois service-volée en trois matches. Il défiera Medvedev en huitième de finale.
- par
- Mathieu Aeschmann
C’est un indémodable plaisir de janvier: découvrir un joueur, un style, que l’on n’attendait pas. 2021 avait tremblé devant la frappe métallique d’Aslan Karatsev; 2022 regarde interloqué le tennis anachronique de Maxime Cressy, un Américain né à Paris, 70e mondial, finaliste de l’ATP 250 de Melbourne contre Nadal et qui défiera Daniil Medvedev lundi en huitième de finale après avoir aligné… 283 enchaînements service-volée en trois matches.
Vous avez bien lu: 283 fois service-volée; l’attaque la plus frontale que le tennis ait inventé, celle que tout le microcosme juge inopérante depuis une quinzaine d’années. Alors comment s’y prend Maxime Cressy pour redonner vie à un style qui a connu son heure de gloire aux tournants des années 1980-1990? D’abord, il sert fort, en première comme en seconde balle et touche toutes les zones avec un relâchement troublant. Ensuite, il prend beaucoup de place au filet. Et si sa volée n’a pas la pureté de celles de Stefan Edberg ou Patrick Rafter, ce Parisien devenu Yankee possède assez de main pour transformer son envergure en atout. Enfin Maxime Cressy est d’un calme olympien, ce qu’il a encore prouvé samedi matin dans l’enfer du court 3, le «chaudron des Australiens», entièrement acquis à la cause de Chris O’Connell, éternelle wild card locale.
Mécanique mentale
«J’ai un carnet où j’écris la même chose tous les jours, expliquait-il à L’Équipe en début de semaine. Ça me permet d’être dans une zone où je ne vais pas être perturbé. C’est un peu comme une méditation, un mantra. Deux ou trois mots qui m’aident à rester dans le moment présent.» Avant de servir pour un premier huitième de finale en Grand Chelem, samedi, Maxime Cressy a donc ressorti ses fiches. «Je suis convaincu que mon style de jeu demande beaucoup de concentration. Ça se joue sur des millimètres, sur des points courts. La moindre distraction mentale fait que la balle sort au lieu d’être parfaitement ajustée.»
Obstiné par l’attaque immédiate, Maxime Cressy décline son credo également au retour. Ne l’imaginez pas se positionner quatre mètres derrière la ligne, comme le font désormais presque tous les meilleurs (Nadal, Tsitsipás, Medvedev). Lui saute sur le moindre engagement un peu court et agresse, notamment avec un coup droit très peu lifté. Le contraste est rafraîchissant. Peut-il être efficace face au favori Daniil Medvedev? «Là où je suis très fort, c’est que je suis illisible au service, expliquait-il après son succès au premier tour face à Isner. C’est la qualité première d’un serveur volleyeur. Entrer dans la tête de l’adversaire.» Tout un programme, surtout lorsque l’on sait qu’à ce petit jeu, le Russe est devenu injouable.