Réforme des retraitesLa France toujours sous tension et dans l’incertitude
Après la sixième journée d’action contre la réforme des retraites, mardi, le mouvement de colère a, mercredi, entravé les transports publics et la livraison de carburants. Probablement jeudi aussi.
Au lendemain d’une journée d’action massive contre la réforme des retraites, la pression restait forte, ce mercredi, en France, avec l’annonce de nouvelles mobilisations, mais l’exécutif semble compter sur un essoufflement du mouvement social et une adoption accélérée du texte au Sénat.
L’incertitude demeure sur le point de savoir si les blocages et grèves reconductibles touchant des secteurs clés de l’économie (transports, énergie, etc.), qui ont eu lieu mardi, se poursuivront et si les étudiants et les lycéens vont rejoindre massivement le mouvement ces prochains jours.
Mardi, le nombre de personnes dans la rue a établi un record, dépassant le pic du 31 janvier, selon les chiffres du Ministère français de l’intérieur et du syndicat CGT. Depuis le 19 janvier, il s’agissait de la sixième journée d’action contre cette réforme des retraites, voulue par le président français Emmanuel Macron, et son report de l’âge légal de départ de 62 à 64 ans, à laquelle les Français sont, selon les sondages, majoritairement hostiles, la jugeant «injuste», notamment pour les femmes et les salariés aux métiers pénibles.
Un train sur trois à la SNCF
Au lendemain de cette forte mobilisation, des manifestations de moindre ampleur ont eu lieu, en lien aussi avec la Journée internationale des droits des femmes. «Celles qui vont payer le plus cette réforme, ce sont les femmes, qui subissent le plus les carrières hachées et les contrats précaires», a lancé le dirigeant de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise, LFI) lors d’un rassemblement à Marseille.
Ce mercredi, un train sur trois roulait à la compagnie ferroviaire nationale, la SNCF, soit mieux que les 20% de mardi. La grève continuera jeudi et au moins vendredi, mais le trafic devrait s’améliorer. Dans les airs, la Direction générale de l’aviation civile a exigé des compagnies aériennes qu’elles renoncent à 20 ou 30% de leurs vols jeudi et vendredi, comme les deux jours précédents, en raison de la grève des contrôleurs aériens opposés à la réforme.
Dans les autres secteurs, trois ports français (Le Havre, Rouen et Marseille-Fos) ont été bloqués par une opération «ports morts». Dans le secteur du gaz, trois des quatre terminaux méthaniers que compte le pays ont été mis à l’arrêt pour «sept jours», lundi, par les syndicats. Les expéditions de carburants étaient toujours bloquées, mercredi, à la sortie des raffineries de TotalEnergies et d’Esso-ExxonMobil.
Deux nouvelles journées d’action
L’intersyndicale appelle à deux nouvelles journées d’action, samedi 11 mars et le jour où Sénat et Assemblée tenteront de se mettre d’accord sur le texte. Très vraisemblablement le mercredi 15 mars, selon des sources parlementaires.
L’intersyndicale a aussi demandé à être reçue «en urgence» par le président français «pour qu’il retire sa réforme», en fustigeant son «silence». Mais l’exécutif a opposé une fin de non-recevoir. Emmanuel Macron joue une part importante de son crédit politique sur cette mesure phare de son second quinquennat, symbole de sa volonté affichée de réformer, mais qui cristallise aujourd’hui la grogne d’une bonne partie des Français à son encontre.
Passage en force risqué?
Le gouvernement compte sur l’adoption, au Sénat, de la réforme d’ici à la date butoir de dimanche, et envisage «un vote le 16 mars» dans les deux chambres du Parlement. La majorité sénatoriale de droite a donné dans la nuit un gros coup d’accélérateur qui pourrait conduire à faire examiner rapidement l’article relevant l’âge légal de départ à 64 ans. «Ce scénario d’une victoire à l’usure n’est bien sûr pas à exclure. Mais si l’exécutif faisait ce pari, il serait risqué. Rien ne laisse entrevoir qu’il peut miser sur un essoufflement», estime le journal «Libération».