AfriqueAu Mali, des groupes armés disent se préparer aux hostilités
La tension augmente au fil des jours dans le nord du Mali, où plusieurs groupes armés semblent vouloir se défendre militairement contre la junte au pouvoir à Bamako.
Des groupes armés signataires d’un important accord de paix dans le nord du Mali ont déclaré dimanche se préparer à se défendre militairement contre la junte au pouvoir à Bamako, faisant craindre une reprise des hostilités ouvertes. Le Cadre stratégique permanent (CSP) qui réunit ces groupes a appelé dans un communiqué les civils à s’éloigner des installations et des lieux d’activités militaires.
Toujours dans le Nord, le gouvernorat de la région de Gao, où les attaques et accrochages se sont multipliés ces dernières semaines, a instauré un couvre-feu nocturne de 30 jours de 20h00 du soir à 6h00 du matin jusqu’au 9 octobre inclus. Seuls les véhicules des forces de sécurité sont exemptés, dit le texte consulté par l’AFP.
Ces développements interviennent dans un contexte de tension grandissante dans cette région du Mali où opère une multitude d’acteurs armés se disputant le contrôle du territoire: armée nationale, groupes à dominante touareg, groupes djihadistes, sans parler des bandits.
Avion abattu
Ces tensions font plus que jamais redouter la réouverture du front entre l’armée malienne et les groupes à dominante touareg qui ont combattu l’État central à partir de 2012 avant d’accepter un cessez-le-feu en 2014 et de signer en 2015 l’accord de paix dit d’Alger.
Les djihadistes, qui avaient d’abord combattu les forces maliennes avec les rebelles touareg et arabes avant de se retourner contre eux, ne sont pas concernés par l’accord d’Alger, et ont depuis étendu leurs agissements au centre du pays et au Burkina Faso et Niger voisins sous la bannière d’Al-Qaïda ou de l’organisation État islamique.
La Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), qui fait partie du CSP, a affirmé samedi soir avoir abattu un avion de l’armée malienne après un bombardement sur ses positions dans la région de Gao. La mise hors de combat d’un avion de l’armée malienne par les groupes armés du nord serait un acte inédit au cours des dernières années.
64 morts jeudi
Le chef d’état-major de l’armée de l’air, le général Alou Boi Diarra, a assuré à la télévision d’État dimanche soir que l’appareil, en mission non précisée, avait connu «quelques problèmes techniques qui ont forcé l’équipage à abandonner le bord, c’est-à-dire à s’éjecter de l’appareil qui s’est écrasé».
L’équipage «a été récupéré sain et sauf», a-t-il dit. Les régions de Gao et Tombouctou sont le théâtre depuis quelques semaines d’une succession d’attaques djihadistes, mais aussi d’accrochages impliquant armée malienne et groupes signataires de l’accord d’Alger.
Une double attaque imputée aux djihadistes a tué 64 civils et soldats entre Tombouctou et Gao jeudi selon un bilan gouvernemental. Mais différentes sources indiquent que les pertes humaines sont en fait beaucoup plus lourdes. Ces événements coïncident avec le désengagement en cours de la mission de l’ONU déployée au Mali depuis 2013 et poussée vers la sortie par la junte en 2023.
«Prétexte»
Le Cadre stratégique permanent a accusé la junte dimanche dans un communiqué d’une série de violations du cessez-le-feu de 2014 et de l’accord de paix de 2015. Il prête à la junte au pouvoir depuis 2020 une stratégie de rupture du cessez-le-feu. Il «déclare adopter dorénavant toutes mesures de légitime défense contre les forces de cette junte partout sur l’ensemble du territoire de l’Azawad», le nord du Mali objet d’anciennes revendications indépendantistes touareg.
La junte «prétexte la décision de retrait de la mission onusienne» pour réoccuper des zones dont le contrôle devrait revenir aux groupes armés en vertu des arrangements de 2014 et 2015, accuse le CSP. La junte a fait du rétablissement de la souveraineté un de ses mantras, un objectif qui se heurte aux différents groupes armés, qui contrôlent de vastes étendues de territoire.