Etats-Unis: Mort de soldats: Washington soupèse sa riposte face à l’Iran

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États-UnisMort de soldats: Washington soupèse sa riposte face à l’Iran

Joe Biden a promis des représailles «conséquentes» après l’attaque à la frontière jordano-syrienne qui a tué trois soldats américains dimanche, et que Washington a attribué à des groupes armés pro-Iran.

Joe Biden le 28 janvier 2024 à West Columbia, en Caroline du Sud.

Joe Biden le 28 janvier 2024 à West Columbia, en Caroline du Sud.

AFP

Pressés d’agir, mais jusqu’où? C’est la question qui taraude les États-Unis qui, s’ils ont beau répéter ne vouloir ni escalade ni guerre au Moyen-Orient, se trouvent entraînés dans un conflit à distance avec l’Iran sous le feu de groupes armés proches de Téhéran, au risque d’un embrasement régional.

L’attaque au drone à la frontière jordano-syrienne qui a tué trois soldats américains dimanche, et que Washington a attribué à ces groupes armés proches de l’Iran, fait monter la pression sur le président Joe Biden, qui a promis des représailles «conséquentes».

«C’est ce que beaucoup d’entre nous, je pense, craignaient, que sans doute l’administration craignait, que les alliés des États-Unis, qu’ils soient arabes ou autres, craignaient: que l’Iran fasse un mauvais calcul, fasse une erreur comme celle-ci et force les États-Unis à riposter à un niveau beaucoup plus élevé», dit à l’AFP Gordon Gray, professeur à l’université George Washington.

Changer la donne

Car il s’agit des premiers militaires américains tués au Moyen-Orient depuis le début, le 7 octobre, de la guerre entre Israël et le Hamas palestinien et, à ce titre, cela change la donne.

D’autant que l’attaque s’inscrit dans le sillage de celles menées par des groupes pro-iraniens usant de drones ou de roquettes et visant des installations américaines en Irak et en Syrie.

La plupart de ces attaques ont été revendiquées par la «Résistance islamique en Irak», nébuleuse de combattants issus des groupes armés pro-Iran, qui dit agir en soutien aux Palestiniens et réclame le départ des soldats américains déployés en Irak.

Les Houthis aussi

De leur côté, les rebelles yéménites Houthis, également proches de l’Iran, multiplient les attaques contre la navigation marchande dans la mer Rouge et le golfe d’Aden, mettant là aussi les États-Unis sous pression afin de riposter, ce qu’ils ont fait.

Jusqu’à présent, la riposte américaine -- soigneusement calibrée -- s’est faite essentiellement par le biais de frappes visant à affaiblir les capacités de lancement de roquettes, de missiles ou drones de ces groupes, dont les Houthis. Mais cela n’a pas eu l’effet de dissuasion escompté.

Après l’attaque en Jordanie, «le défi (pour Washington) est de s’assurer que la réponse est suffisamment importante pour empêcher de nouvelles attaques contre les forces américaines, sans pour autant déclencher une nouvelle guerre dans la région», résume Alex Plitsas, du Atlantic Council, un centre de réflexion de la capitale américaine.

«On est à un tournant»

Les responsables américains répètent inlassablement qu’ils ne veulent pas d’escalade, et espèrent encore pouvoir contenir un conflit qui menace de s’étendre. «Nous ne cherchons pas la guerre avec l’Iran», a martelé lundi un porte-parole de la Maison-Blanche, John Kirby.

Téhéran de son côté a nié toute implication dans l’attaque de dimanche, et mis en garde contre une escalade régionale. «On est à un tournant», estime cependant Alex Vatanka, du Middle East Institute à Washington. Selon lui, l’objectif de l’Iran depuis l’attaque du 7 octobre est «d’éviter la guerre avec Israël et les États-Unis, mais d’utiliser cette opportunité pour les presser tous les deux dans le cadre d’un plan à plus long terme». «Comme l’Iran, les États-Unis ne sont pas intéressés par une escalade régionale» aux conséquences imprévisibles, dit-il.

Impasse totale

Les relations avec l’Iran sont dans une impasse totale, même si Washington a récemment reconnu avoir secrètement prévenu Téhéran de la menace d’une attaque avant le double attentat suicide revendiqué par le groupe État islamique à Kerman le 3 janvier, faisant environ 90 morts.

Le président américain avait entamé son mandat en se disant favorable à un dialogue avec l’Iran, y compris pour ressusciter un accord international conclu pour empêcher Téhéran de développer la bombe atomique auquel l’ancien président Donald Trump avait mis fin.

Mais ce dialogue n’a jamais abouti et a même été de facto abandonné après la répression de la contestation inédite déclenchée par la mort de Mahsa Amini en septembre 2022.

Choisir

Le président américain, qui se représente pour un second mandat, se retrouve désormais à devoir choisir entre continuer à tenter une politique de dissuasion ou, au contraire, frapper fort au risque de l’escalade.

Gordon Gray estime que les États-Unis pourraient vouloir, en représailles, viser «une cible militaire ou les Gardiens de la révolution islamique à l’intérieur même de l’Iran». Il souligne que l’administration Biden «a veillé à ne pas réagir de manière excessive et à faire passer le message que les attaques ne seraient pas tolérées». Mais «les dirigeants iraniens n’ont malheureusement pas compris ce message. Je pense que cela augmente les chances d’une confrontation militaire», prévient-il.

(AFP)

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