FranceUne relation «opaque» et «privilégiée» entre Uber et Macron
Après six mois d’investigations, la commission d’enquête parlementaire sur les Uber Files a rendu un rapport accablant pour le président français.
Le rapport final de la commission d’enquête parlementaire sur les Uber Files publié mardi pointe du doigt les liens étroits entre Emmanuel Macron et la plateforme américaine. «La confidentialité et l’intensité des contacts entre Uber, Emmanuel Macron et son cabinet témoignent d’une relation opaque mais privilégiée», y compris depuis son accession à la présidence de la République, selon le rapport.
Le président de la République, ministre de l’Économie à l’époque des faits, poursuit-il, avait passé un «deal secret» avec la société américaine pour qu’elle renonce à son application controversée Uber Pop en échange de la simplification des conditions nécessaires à l’obtention d’une licence de Voiture de transport avec chauffeur (VTC). «C’est au mépris de toute légalité, et grâce à un lobbying agressif auprès des décideurs publics, que l’entreprise américaine est parvenue à concurrencer de manière déloyale» les taxis, ajoute le rapport.
La commission d’enquête, lancée il y a six mois, a auditionné 120 personnes dont deux anciens Premiers ministres, Bernard Cazeneuve et Manuel Valls. D’anciens dirigeants d’Uber ont également été entendus pour tenter de cerner les agissements d’Uber en France entre 2014 et 2017. L’affaire a été déclenchée par la révélation des Uber Files, soit la fuite de 124’000 documents internes recueillis par Mark McGann, ancien lobbyiste pour le compte d’Uber, et communiqués au journal britannique «The Guardian».
«Conflit d’intérêts»
Toujours selon le rapport, la création de l’Agence de régulation des plateformes d’emploi (Arpe) en 2021, censée réguler le secteur, ne constitue qu’«une manœuvre de contournement des droits sociaux des travailleurs à travers la création d’un soi-disant dialogue social» pour éviter une «requalification en salariat de l’activité des travailleurs». Selon la rapporteure Danielle Simonnet (La France insoumise), Uber a eu également «34 échanges avec les services du président de la République entre 2018 et 2022».
Elle a aussi relevé sur la même période 26 échanges avec le ministère du Travail, 25 avec Bercy et 83 avec le ministère des Transports, prouvant selon elle une intensification des rapports entre l’exécutif et l’entreprise californienne. Les conclusions du rapport ont été sévèrement critiquées par le président de la commission d’enquête, Benjamin Haddad (Renaissance), qui a reproché à Danielle Simonnet de politiser l’affaire.
«Il n’y a eu ni compromission, ni «deal» secret, ni conflit d’intérêts, ni contreparties, contrairement à ce que tente de démontrer vainement notre rapporteure», a-t-il écrit dans son avant-propos, témoignant des fortes dissensions entre les membres de la commission d’enquête.