Royaume-UniLa justice valide le projet d’expulsion vers le Rwanda de migrants illégaux
Dans un jugement rendu lundi, la Haute Cour de Londres estime que les dispositions prévues par le Royaume-Uni ne contreviennent pas à la Convention de Genève sur les réfugiés.
La justice britannique a donné lundi son feu vert à l’expulsion vers le Rwanda de demandeurs d’asile, arrivés illégalement au Royaume-Uni, un projet hautement controversé que le gouvernement veut déployer au plus vite. Aucune expulsion n’a encore eu lieu: un premier vol prévu en juin a été annulé, après une décision de la Cour européenne des droits de l’homme qui réclamait un examen approfondi de cette politique.
«La Cour a conclu qu’il est légal pour le gouvernement britannique de mettre en place des dispositions pour envoyer des demandeurs d’asile au Rwanda et que leur demande d’asile soit examinée au Rwanda plutôt qu’au Royaume-Uni», selon un résumé du jugement publié par la Haute-Cour de Londres. Celle-ci estime que les dispositions prévues par le gouvernement ne contreviennent pas à la Convention de Genève sur les réfugiés.
Une priorité des conservateurs
Les conservateurs ont fait de la lutte contre l’immigration clandestine l’une de leurs priorités. En avril, le gouvernement de Boris Johnson a conclu un accord avec Kigali pour expulser vers le Rwanda des demandeurs d’asile, quelle que soit leur origine, arrivés illégalement sur le sol britannique. Une politique destinée à décourager les traversées de la Manche à bord de petites embarcations, mais qui a été largement critiquée et attaquée en justice.
La Haute Cour a en revanche demandé au ministère de l’Intérieur de revoir sa copie concernant huit migrants qui s’opposaient à leur expulsion vers le Rwanda. Le «Home Office» n’a pas suffisamment examiné leurs situations personnelles pour déterminer s’il existe, les concernant, des éléments qui justifieraient qu’ils ne soient pas expulsés.
Deux ONG pensent faire appel
Les opposants au projet ont accueilli le jugement avec déception et colère. Parmi les associations à l’origine de ce recours en justice, Care4Calais, dont la fondatrice Clare Moseley, a fait part de sa détermination à ce qu’«aucun réfugié ne soit expulsé de force» au Rwanda. L’association, tout comme Detention Action, envisage de faire appel de cette décision.
Le syndicat de fonctionnaires PCS (présent notamment dans la police des frontières), a estimé pour sa part que le projet gouvernemental reste «moralement répréhensible et totalement inhumain», estimant qu’un appel doit «sérieusement» être envisagé. Quant au Refugee Council, il a étrillé cette politique «cruelle» consistant à assimiler «des gens qui cherchent la sécurité à des marchandises humaines» comme dommageable à la réputation du Royaume-Uni comme un pays des droits de l’homme.
Cher, amoral et impraticable pour l’opposition travailliste
L’opposition travailliste a de son côté jugé le projet «impraticable», «contraire à la morale» et «d’un coût exorbitant». Le Haut-Commissariat de l’ONU aux réfugiés était même intervenu dans le dossier devant la Haute Cour, faisant valoir que «les composantes minimums d’un système d’asile fiable et juste» font défaut au Rwanda et qu’une telle politique mènerait à de «graves risques de violations» de la Convention de l’ONU sur le statut des réfugiés.
Reste que les migrants n’ont jamais été aussi nombreux à traverser la Manche sur des petites embarcations. Depuis le début de l’année, environ 45’000 sont ainsi arrivés sur les côtes anglaises, contre 28’526 en 2021. Et quatre migrants, dont un adolescent, ont perdu la vie en tentant la traversée le 14 décembre, un peu plus d’un an après la mort de 27 personnes dans des circonstances similaires.