Mayotte (F)«Ces délinquants, à un moment donné il faut peut-être en tuer»
Un élu de l’archipel a fait scandale en déclarant que le meurtre de «voyous» pourrait être une solution à la violence sur l’île.
Mauvais départ pour l’opération «Wuambushu»: la justice a suspendu l’évacuation d’un bidonville prévue mardi. Elle devait s’inscrire dans le cadre de cette vaste opération des autorités françaises contre la délinquance et l’habitat insalubre à Mayotte, après le refus la veille des Comores d’accepter des migrants expulsés.
Préparée depuis un an, l’évacuation de «Talus 2» devait constituer la première opération de «décasage» (destruction des cases en tôle), depuis l’arrivée mi-avril de centaines de renforts policiers et de gendarmerie sur l’île. À cette heure, aucune autre opération de ce genre n’est en «phase active». Sur place tôt le matin, des affrontements sporadiques ont eu lieu entre des jeunes du quartier voisin et des forces de l’ordre déployées en nombre.
Un appel au meurtre
Les forces de l’ordre, prises à partie par des jets de pierres, ont répliqué par des tirs nourris de LBD et de grenades lacrymogènes. Signe de la tension extrême dans l’archipel, les déclarations sont de plus en plus virulentes entre partisans et opposants des expulsions. «Ces délinquants, ces voyous, ces terroristes, à un moment donné il faut peut-être en tuer», a été jusqu’à déclarer le premier vice-président du conseil départemental de Mayotte, Salime Mdéré, soutien de la majorité présidentielle, sur la chaîne Outre-mer La Première.
La phrase de l’élu mahorais a suscité un tollé, aussi bien à gauche que du côté du parti présidentiel. «De tels propos sont inadmissibles et je les condamne fermement», a réagi le préfet de Mayotte, Thierry Suquet, «consterné». Le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, a exprimé son «indignation». «Mes propos – qui sont à la hauteur de ma passion pour cette île – ont dépassé ma pensée et je m’excuse bien volontiers s’ils ont pu heurter», a ensuite assuré l’élu sur Facebook.
Salime Mdéré s’expose à des poursuites judiciaires. «Les propos du vice-président du département de Mayotte sont un appel aux meurtres d’enfants. Cela tombe sous le coup de la loi», s’est indigné auprès de Franceinfo Arié Alimi, avocat au barreau de Paris, appelant à l’ouverture d’une enquête. De son côté, le député Thomas Portes (La France insoumise) a fait savoir sur Twitter qu’il a saisi le procureur de la République «pour incitations publiques à la haine, à la violence ou à la discrimination.»