Formule 1«Mamma mia», encore raté!
C’est devenu une habitude cette saison: à Budapest, les Ferrari avaient tout pour gagner, mais terminent hors du podium. La faute à une stratégie calamiteuse.
- par
- Luc Domenjoz
39e tour. Charles Leclerc mène le Grand Prix de Hongrie, et s’arrête pour la deuxième fois. Contre toute attente, et contre la volonté du pilote monégasque, la Scuderia Ferrari lui chausse alors des pneus durs.
Une décision d’autant plus incompréhensible que ces pneus étaient ceux des deux Alpine de Fernando Alonso et Esteban Ocon. Ils ne fonctionnaient visiblement pas, les deux Alpine ayant glissé hors des points à cause d’eux.
Charles Leclerc, lui, aurait préféré continuer plus longtemps sur son train de pneus médiums, et les changer plus tard contre des pneus tendres pour terminer la course. Résultat: ses pneus durs se sont avérés si mauvais que le Monégasque a dû s’arrêter une nouvelle fois pour passer aux tendres.
«Le tournant de la course»
Il a terminé sixième. Et écœuré. «Démarrer avec les pneus médiums était un bon choix. Mais passer aux durs a été le tournant de la course. J’avais été clair à la radio: je voulais rester le plus longtemps possible avec les pneus médiums. Au lieu de ça, on m’a rappelé très tôt pour me mettre ces durs. Il va falloir m’expliquer pourquoi. Les pneus durs étaient incroyablement difficiles à utiliser.»
Le pilote soupçonne que son écurie a agi en réaction au deuxième arrêt de Max Verstappen. «Je suis sûr que ça a mis notre équipe sous stress. Mais on n’aurait pas dû l’imiter, parce que ça a eu un effet boule de neige, on a perdu bien plus de terrain que nous aurions dû.»
Au moment d’aborder les vacances d’août, Charles Leclerc compte 80 points de retard sur Max Verstappen. C’est beaucoup pour espérer remporter le titre mondial. «Il y a toujours quelque chose qui ne tourne pas rond chez nous, que ce soit la fiabilité, la stratégie ou autre, reconnaît-il. Nous devons comprendre comment faire mieux, comment assembler un bon week-end du début à la fin.»
Des mauvais choix
Selon Mattia Binotto, le patron de Ferrari, les simulations de l’écurie avaient montré que les pneus durs mis sur la voiture de Charles Leclerc à son deuxième arrêt étaient les bons pour aller jusqu’à la fin de la course. «Nous savions que ces pneus seraient plus lents que les médiums pour une dizaine de tours, puis qu’ils devaient se montrer meilleurs et qu’ils auraient permis d’aller jusqu’à l’arrivée», assure-t-il. Sauf que ça ne s’est pas du tout déroulé comme prévu. Avec le temps frais qui régnait sur Budapest, il était très difficile de faire monter les pneus en température.
Ferrari n’en a peut-être pas assez tenu compte, et aurait peut-être dû mieux regarder ce qui se passait en piste, où les deux Alpine étaient à la peine avec ces pneus durs. «Nous avons vu les Alpine, et nous en avons discuté en interne», poursuit Mattia Binotto. «Parce que nos stratégies ne sont pas gravées dans le marbre, elles peuvent s’adapter. Nous avons pris tous les paramètres en considération, et nous avons décidé pour les pneus durs. À l’évidence, ce n’était pas le bon choix.»
À l’évidence aussi, ce n’est pas la première fois que l’écurie se trompe de stratégie. Pourtant, comme toujours, le patron reste imperturbable et accuse la monoplace. «Il est important d’ajouter que la voiture, aujourd’hui, ne fonctionnait pas comme nous l’attendions, poursuit-il. Nous n’avions pas du tout le rythme de course que nous avions montré vendredi, lors des simulations. Il faisait beaucoup plus frais aujourd’hui, c’était évidemment très différent. Et quel que soit le type de pneus que nous aurions utilisé, je pense que nous n’étions pas aussi rapides que nous l’espérions.»
Deux Mercedes sinon rien
Pour le deuxième Grand Prix consécutif, l’écurie Mercedes place ses deux voitures sur le podium, avec Lewis Hamilton deuxième et George Russell troisième. Au classement des constructeurs, l’écurie allemande n’a plus que 30 points de retard sur Ferrari.
Si ce même résultat avait été plutôt inespéré au Castellet, et obtenu grâce à la sortie de route de Charles Leclerc et le fait que Carlos Sainz partait dernier, c’est à la régulière, sans profiter du sort, que les deux Mercedes se sont classées sur le podium à Budapest.
Lewis Hamilton pense même qu’il aurait pu jouer la victoire sans le problème du samedi (son DRS refusait de s’ouvrir, ce qui l’avait relégué à la septième place de la grille). «Oui, je pense que si je m’étais qualifié devant, je pouvais viser la victoire», remarquait-il. «En réalité, je ne sais pas pourquoi nous étions si compétitifs. La météo plutôt fraîche a certainement joué son rôle. À la fin de la course, j’espérais même qu’il pleuve, pour que je puisse avoir une chance de rattraper Max (Verstappen), devant. Mais il aurait fallu que ça dure quelques tours de plus pour avoir ma chance… Pour nous, avoir les deux voitures sur le podium, c’est assez spécial. C’est une belle manière d’aborder les vacances. À la rentrée, on espère bien se battre avec les autres pour la victoire.»
Russell se frottait les mains
Alors qu’il s’élançait de la pole position, George Russell a terminé troisième à Budapest. Un très bon résultat pour une Mercedes, mais une petite déception pour celui qui partait devant. «Je savais que la course allait être plutôt délicate, parce que la menace de pluie était permanente», racontait le Britannique. «En général, quand vous êtes en pole et qu’il pleut, vous êtes plutôt déçu, mais pas moi. Je savais que j’avais les pneus tendres et que les autres, autour de moi, avaient les médiums. Je me frottais même les mains en voyant les gouttes tomber. Quand il pleut, les pneus tendres font une énorme différence. Je suis bien parti, j’ai tout de suite creusé trois secondes d’avance sur Carlos (Sainz), mais malheureusement, les gouttes ont cessé. Les pneus médiums sont revenus en force, et on s’est arrêté tôt pour changer les miens. C’était une bonne chose par rapport aux Ferrari, mais Max était simplement trop fort pour nous aujourd’hui.»
Sur la fin de course, George Russell a dû laisser passer son équipier Lewis Hamilton. «Ces changements m’ont fait rouler en médiums pour le dernier relais. Quand mon ingénieur m’a dit qu’il restait 25 tours, qu’il a recommencé à tomber quelques gouttes et que la température de mes pneus chutait, je savais que la fin de course serait très difficile et que je ne pourrais pas résister à Lewis.»