Fidji: Le dépouillement des législatives retardé par une anomalie technique

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FidjiLe dépouillement des législatives retardé par une anomalie technique

Les législatives opposent le premier ministre sortant Frank Bainimarama, déjà en poste depuis 16 ans, et Sitiveni Rabuka, par deux fois putschiste.

Dans un bureau de vote de la capitale Suva mercredi.

Dans un bureau de vote de la capitale Suva mercredi.

AFP

Le dépouillement des élections législatives de mercredi aux Fidji a été retardé jeudi par une «anomalie» technique, alors que le premier ministre Frank Bainimarama cherche à prolonger ses seize années au pouvoir. Son principal rival Sitiveni Rabuka, deux fois putschiste et surnommé «Rambo», était en tête mercredi soir des résultats partiels quand le décompte a été interrompu.

Le parti de Frank Bainimarama, FijiFirst, était repassé en tête lorsque la publication des résultats partiels a repris quatre heures plus tard. Lors d’une conférence de presse organisée à la hâte jeudi matin, le superviseur des élections Mohammed Saneem a déclaré qu’une «anomalie» avait été détectée. Il a cité un «décalage» entre les votes exprimés et le décompte d’un candidat.

«Pour remédier à cette situation, le bureau électoral fidjien a dû revoir l’ensemble du mécanisme par lequel nous diffusions les résultats», a-t-il déclaré. L’irrégularité, survenue tard dans la nuit, a dominé les bulletins d’information et a été accueillie avec scepticisme et colère sur les réseaux sociaux, mais Mohammed Saneem a défendu l’intégrité du décompte. Jeudi à l’aube, le parti FijiFirst détenait environ 45% des voix sur plus de la moitié des 2071 bureaux de vote du pays dépouillés.

Un appel au peuple fidjien à «rester calme»

L’Alliance populaire de Sitiveni Rabuka et son partenaire de coalition, le Parti de la fédération nationale, comptaient à eux deux un peu moins de 42% des voix. Le décompte final du scrutin n’était pas attendu avant au moins deux jours, en raison de la comptabilisation des votes sur des îles reculées ainsi que d’un système de dépouillement complexe. «J’ai besoin d’être convaincu qu’il s’agit du résultat correct. Même avec l’implication des tribunaux», a relevé jeudi Sitiveni Rabuka à l’AFP. «Nous sommes en train d’examiner notre droit de recours». Avant d’ajouter: «Ne nous laissons pas emporter par ce que nous avions évalué comme une victoire avant l’heure hier» mercredi, avant d’appeler «le peuple fidjien à rester calme, en particulier nos partisans». Il avait auparavant assuré qu’il reconnaîtrait sa défaite s’il était battu.

En quête d’un troisième mandat, l’actuel chef du gouvernement Frank Bainimarama, 68 ans, est arrivé au pouvoir après un coup d’État en 2006 mais a ensuite légitimé sa position en gagnant les élections de 2014 et de 2018. Sitiveni Rabuka, 74 ans, est un ancien chef militaire et ex-Premier ministre, surnommé «Rambo» après avoir organisé deux coups d’État en 1987. Il a dirigé le pays de 1992 à 1999.

Un «Premier test»

Interrogé pour savoir s’il accepterait les résultats du scrutin alors qu’il votait à Suva, la capitale, Frank Bainimarama avait répondu: «Bien sûr». Il s’en était ensuite pris aux journalistes, leur suggérant de poser «de meilleures questions».

Pour Blake Johnson, de l’Institut australien de stratégie politique, toute contestation des résultats sera probablement soumise aux tribunaux au lieu d’aboutir à un nouveau coup d’État.  «Si Rabuka gagne, ce sera pour les Fidji le premier test de passation pacifique du pouvoir en près de deux décennies», a-t-il dit mercredi à l’AFP. Les Fidji ont connu deux scrutins démocratiques en 2014 et 2018 après 35 ans d’instabilité marqués par quatre coups d’État.

Un pays de 900’000 habitants

Le rôle de l’armée sera essentiel. Le commandant général Jone Kalouniwai a affirmé que ses forces «honorer(aient) le processus démocratique en respectant le résultat». Les résultats s’annoncent serrés, estiment les commentateurs, après une campagne entachée de soupçons de corruption, de poursuites judiciaires et de menaces contre des journalistes.

Sitiveni Rabuka, également un ex-international de rugby, avait indiqué que s’il était élu, son pays pourrait s’éloigner de la Chine. Il avait déclaré à la chaîne australienne SBS News qu’il était temps pour les Fidji de «réévaluer nos associations», excluant explicitement de suivre les îles Salomon en signant un pacte de sécurité avec Pékin. Les Fidji se sont rapprochées de la Chine durant les mandats de Frank Bainimarama qui a appliqué la politique dite de «regard vers le Nord» pour stabiliser l’économie, après les lourdes sanctions commerciales imposées à son pays par l’Australie et la Nouvelle-Zélande en représailles à son coup d’État de 2006.

L’économie des Fidji, qui comptent environ 900’000 habitants, dépend étroitement du tourisme qui a souffert de la pandémie de Covid-19.

(AFP)

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