Retraites en FranceMobilisation en baisse, les débats s’enlisent à l’Assemblée
Avec des manifestants moins nombreux, mais toujours déterminés, les syndicats se sont mobilisés jeudi contre le projet de réforme des retraites.
Avec des manifestants moins nombreux, mais toujours déterminés, les syndicats ont mobilisé jeudi pour la cinquième fois contre le projet de réforme des retraites, souhaitant maintenir la pression sur des députés qui n’ont plus beaucoup d’espoir de pouvoir débattre de l’âge légal avant vendredi minuit.
«Il y a une incertitude, c’est +est-ce qu’on va voter cette réforme?+», a noté sur RTL dans la soirée le ministre du Travail Olivier Dussopt. «Nous discutons de tout et à peu près n’importe quoi, sauf de la réforme», a-t-il déploré.
En pleines vacances scolaires, à l’exception de l’Île-de-France et de l’Occitanie, la mobilisation est apparue en baisse, les syndicats se projetant vers le 7 mars, où ils ont promis de «mettre la France à l’arrêt».
La CGT a revendiqué 1,3 million de manifestants, le chiffre le plus faible depuis le début de la mobilisation le 19 janvier.
Les dirigeants des huit principaux syndicats français avaient décidé de manifester à Albi pour «braquer le projecteur» sur cette France des villes moyennes très mobilisées, selon le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger.
«Le mécontentement, la détermination et la combativité sont intacts», a-t-il assuré avant le départ de la manifestation, qui a réuni 10’000 personnes selon la préfecture et 50’000 selon les syndicats – autant que le nombre d’habitants de cette ville.
«Les élus ne peuvent pas être indifférents quand il y a autant de monde dans la rue», a déclaré son homologue de la CGT, Philippe Martinez.
«Fidèle au poste»
Dans la plupart des villes, les rangs étaient plus clairsemés que pour la 4e journée de mobilisation samedi, comme à Toulouse, où la police a compté 14’000 personnes (contre 25’000 samedi) ou Lille, où ils étaient 3’500, contre 10’700 samedi.
Le cortège parisien a réuni 300’000 personnes selon la CGT, 37’000 selon la préfecture, et 33’000 selon le cabinet Occurrence. Parmi elles, Estelle Hue Le Cloître, 47 ans, employée SNCF, a confié mettre «beaucoup d’espoir» sur le 7 mars.
«L’idée aujourd’hui ce n’est pas de faire nombre, mais d’entretenir le souffle», a dit la N.2 de la CFDT, Marylise Léon.
Les perturbations sont restées limitées dans les transports. Néanmoins, des vols ont été annulés et des agents d’EDF ont baissé la production d’électricité, sans provoquer de coupures de courant. Dans l’éducation, le taux de grévistes était moindre que le 7 février.
Faute de réussir à infléchir l’exécutif, l’intersyndicale a adressé un courrier aux parlementaires, hormis ceux du RN, pour leur demander de rejeter la réforme «et plus particulièrement son article 7», qui porte le recul de l’âge légal de départ de 62 à 64 ans.
«Aveu» de LFI
Après plusieurs jours d’empoignades stériles, les députés abordent la dernière ligne droite des débats jusqu’à vendredi minuit, heure couperet de l’examen du texte avant sa transmission au Sénat.
Seule à maintenir encore des milliers d’amendements qui ralentissent les débats, la France insoumise a justifié sa position jeudi soir par la voix de Jean-Luc Mélenchon: «Incompréhensible retrait des amendements du PCF. Pourquoi se précipiter à l’article 7? Le reste de la loi ne compte pas? Hâte de se faire battre?» a-t-il tancé sur Twitter.
Le ministre des Comptes publics Gabriel Attal a dénoncé une «bascule» et un «aveu» de Jean-Luc Mélenchon, qui veut faire «traîner les débats».
Olivier Dussopt a été de nouveau interpellé par la gauche sur le «flou» des chiffres concernant les conséquences de la réforme. «C’est la réforme Dracula: plus on l’éclaire, plus elle se transforme en cendres», a ironisé le député PS Jérôme Guedj.
«C’est lamentable ce qui se passe au Parlement», «il faut que ça avance», a déclaré à Albi le président de la CFTC Cyril Chabanier, à l’unisson de l’intersyndicale.
De son côté, le RN a déposé mercredi une motion de censure, pour savoir qui est «pour ou contre la réforme», selon sa cheffe de file Marine Le Pen.
Et répondre ainsi à Emmanuel Macron qui ironisait mercredi sur des oppositions qui «n’ont plus de boussole».
Vote ou pas, les syndicats ont en vue la journée du 7 mars que M. Berger envisage comme «une immense journée de mobilisation».
D’autres actions sont prévues le lendemain lors de la journée internationale des droits des femmes. Les principales organisations de jeunesse annoncent aussi une journée de mobilisation le 9.
De quoi donner des envies de grèves reconductibles à partir du 7 mars. Si l’intersyndicale n’y a pas appelé, certaines confédérations comme Solidaires y sont favorables. Les syndicats de la RATP l’ont déjà annoncé ainsi que la CGT éboueurs.