AsieInauguration du premier sous-marin made in Taïwan
Taïwan a inauguré jeudi son premier sous-marin de fabrication nationale, visant à renforcer son armée face à la Chine. Pékin l’a qualifié de «non-sens stupide».
Taïwan a inauguré jeudi son premier sous-marin de fabrication nationale, visant à renforcer son armée face à la Chine, qui a qualifié en retour la stratégie de défense du territoire autonome de «non-sens stupide». Le gouvernement chinois considère l’île comme une partie de son territoire qu’il s’est juré de réunifier un jour, par la force si nécessaire.
Le budget de la défense taïwanais atteindra en 2024 un record de 19 milliards de dollars. Taipei entend acquérir du matériel militaire, en particulier auprès de son principal allié, les États-Unis, auprès duquel il n’a pas réussi à acquérir de sous-marins. À son arrivée au pouvoir en 2016, la présidente Tsai Ing-wen, issue d’un parti hostile à Pékin, a lancé un programme de construction sur son sol de sous-marins avec l’objectif de livrer huit submersibles.
Jour «historique»
Ce premier prototype, baptisé «Hai Kun», qui signifie «créature marine mythique» en chinois, a été dévoilé jeudi lors d’une cérémonie organisée dans la ville portuaire de Kaohsiung, dans le sud du pays. «L’histoire se souviendra toujours de ce jour», a déclaré Tsai Ing-wen, debout devant le navire drapé des couleurs du drapeau taïwanais.
«Pendant longtemps, construire localement des sous-marins était considéré comme une mission impossible», a rappelé la présidente. «Mais aujourd’hui, un submersible conçu et construit par notre propre peuple est sous les yeux de tous – nous l’avons fait», s’est-elle félicitée. D’un coût de 1,5 milliard de dollars, le sous-marin, dont la construction a débuté en 2020, mesure 80 mètres et pèse de 2500 à 3000 tonnes lorsqu’il est en mouvement.
Systèmes américains
Ses systèmes de combat et ses torpilles proviennent du géant américain de la défense Lockheed Martin. Il va désormais faire l’objet d’essais en mer et Tsai Ing-wen a affirmé que le Hai Kun serait opérationnel d’ici à 2025. Certains spécialistes de la défense estiment que cela pourrait prendre plus de temps.
La marine taïwanaise dispose actuellement de deux sous-marins en état de fonctionnement, des navires de la classe Swordfish achetés aux Pays-Bas dans les années 1980. En 2001, Washington avait accepté de fournir huit sous-marins conventionnels à Taipei, mais la vente ne s’est jamais concrétisée. Au cours de la même période, la Chine s’est dotée de l’une des plus grandes flottes de la planète, avec des sous-marins à propulsion nucléaire et des porte-avions.
«Non-sens» selon Pékin
Le ministère chinois de la Défense a qualifié jeudi de «non-sens stupide» la stratégie de Taïwan de construire ses propres sous-marins. «Peu importe le nombre d’armes» que les autorités taïwanaises «construisent ou achètent, elles ne peuvent pas empêcher la tendance générale vers la réunification nationale», a déclaré le porte-parole du ministère, Wu Qian.
Selon le ministère américain de la Défense, la Chine possède environ 60 sous-marins, dont six à propulsion nucléaire et armés de missiles balistiques. Bien que Taïwan soit clairement désavantagée en termes de nombre, le déploiement de ses sous-marins en deux points stratégiques – le canal de Bashi et le détroit de Miyako – suffirait à poser des problèmes à la Chine, selon Sifu Ou, de l’Institut taïwanais pour la défense nationale et la recherche sur la sécurité.
«Très important» pour Taïwan
«Ils ne peuvent pas passer facilement, c’est très important pour la défense de Taïwan», a-t-il affirmé. Ce sous-marin constituerait un risque en cas d’assaut amphibie et de transport de troupes de l’armée chinoise, a affirmé à l’AFP Ben Lewis, un analyste indépendant basé aux États-Unis et spécialiste des mouvements de l’armée chinoise autour de l’île.
«La Chine a eu recours à beaucoup de navires civils pour renforcer le transport de troupes et un sous-marin pourrait faire des ravages sur des navires qui ne sont pas conçus pour une guerre navale», a estimé Ben Lewis.
Zivon Wang, analyste militaire au sein du groupe de réflexion Chinese Council of Advanced Policy Studies, basé à Taipei, estime cependant que le submersible est encore loin d’être «prêt au combat». «Le lancement ne signifie pas que Taïwan deviendra immédiatement très puissant, mais il s’agit d’un élément crucial de la stratégie de défense de Taïwan», explique-t-il.
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