Football – Attention, Super Mario est faché!

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FootballAttention, Super Mario est fâché!

Mario Gavranovic, qui n’a pas été aligné à Rome, jouera ce soir contre la Bulgarie. La Suisse compte sur lui pour viser une place directe au Mondial.

Daniel Visentini - Lucerne
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Daniel Visentini - Lucerne
Le banc à Rome n’a pas plu à Gavranovic. Super Mario est fâché.

Le banc à Rome n’a pas plu à Gavranovic. Super Mario est fâché.

AFP

Il y a comme une idée de fuite en avant qui s’impose, sans questionnement, sans autre horizon que cette fuite elle-même. Au pire, la Suisse sera barragiste lundi soir; au mieux, elle sera qualifiée directement pour un cinquième Mondial de suite et ce bonheur-là doit se conjuguer avec une avalanche de buts contre la Bulgarie. Parce qu’à moins d’une immense surprise à Belfast entre l’Irlande du Nord et l’Italie - la Nazionale qui ne gagne pas -, la Suisse devra cartonner, inscrire au minimum trois buts, de préférence sans en encaisser. Parce qu’au coup d’envoi, la différence de but est favorable à l’Italie (+11 contre +9).

Pour le dire le plus simplement possible, en partant de l’hypothèse légitime d’une victoire italienne à Belfast: la Suisse doit également remporter son match, mais avec deux conditions. 1. La victoire suisse doit avoir deux buts d’écart de plus que la victoire italienne (si l’Italie gagne 1-0, il faut gagner 3-0, si l’Italie gagne 4-1, il faut gagner 6-1). 2. La Suisse doit, en gagnant, marquer deux buts de plus que l’Italie (3-2 pour l’Italie et 3-0 pour la Suisse, c’est l’Italie qui est qualifiée avec plus de buts marqués).

«Cela ne sert à rien de ressasser le passé. L’Italie, le match de Rome, c’est derrière. Maintenant, je dois me concentrer sur cette rencontre face à la Bulgarie.»

Mario Gavranovic, attaquant de l’équipe de Suisse.

Bref, la Suisse doit marquer. Beaucoup de buts. Et tous les regards se tournent vers Mario Gavranovic. À Rome, Murat Yakin l’a oublié sur la touche. En toute fin de match, dans les ultimes secondes, après le penalty raté de Jorginho, quand Zakaria s’est arraché pour finalement servir Zeqiri, ce dernier a eu le ballon de la victoire au bout du soulier. Le jeune attaquant a raté son affaire, surpris. L’expérimenté Gavranovic aurait-il poussé au fond ce ballon, lui? On ne refait pas le monde, cela appartient au passé désormais.

L’amertume de Rome

Mais on sait que chauffer le banc à Rome n’a pas plu à Gavranovic. Super Mario est fâché. «Cela ne sert à rien de ressasser le passé, a-t-il soufflé du bout des lèvres hier. L’Italie, le match de Rome, c’est derrière. Maintenant, je dois me concentrer sur cette rencontre face à la Bulgarie. Je suis là pour marquer des buts, quel que soit l’adversaire. J’ai toujours la même motivation quand je suis sur le terrain.»

Gavranovic dans une sélection, c’est une bénédiction pour un sélectionneur. L’homme est délicieux, posé, intelligent, il ne fait pas de vagues, il s’accommode des choix qui le laissent souvent sur la touche même s’il ne les comprend pas. Et ce sens du sacrifice s’accompagne d’une efficacité qui interroge sur les choix effectués, par Petkovic avant, par Yakin aujourd’hui (à Rome, en l’absence de Seferovic et Embolo, il lui préfère Okafor, pour des raisons tactiques).

Seulement un joker?

«Gavra» ne serait-il que ce joueur de grande qualité qui passe après les autres, en restant indispensable dans ce domaine, comme prisonnier de son rôle de joker? Ce buteur sur qui l’on doit compter pour écraser la Bulgarie, mais qui ne peut pas être titulaire à Rome?

Il faut avouer tout de même que l’on comprend le choix de Yakin. Victime de son profil (pur buteur), Gavranovic n’avait pas les mêmes armes qu’Okafor (rapidité, profondeur). Mais on peut bien comprendre aussi celui qui a rongé son frein au Stade Olympique. Parce que quand on fait appel à lui, même dans les grandes occasions, il répond présent. Et pas que contre des équipes de seconde zone.

«Je crois me souvenir que quand j’entre pour jouer contre la France, durant l’Euro, je marque un but important, non?, s’est-il interrogé ironiquement. Et je crois savoir que la France n’est pas une équipe si faible que ça, non?» Inoubliable instant, la passe lumineuse de Xhaka qui voit l’appel éclairé de Gavranovic, le contrôle, Kimpembe sur les fesses, la frappe chirurgicale, Lloris impuissant, l’extase. Pour toujours.

Mario Gavranovic a raison. Il est peut-être sous-estimé, sous-exploité, sous-quelque chose. Pour compléter sa remarque, il aurait pu rappeler le match de Ligue des nations à Cologne en octobre 2020. Pour une fois sous Petkovic, il était titulaire associé en attaque à Seferovic. En 75 minutes, il se fait l’auteur de deux buts, pour le 3-3 final. Efficacité.

«Quand j’en ai eu la possibilité, j’ai souvent montré que je pouvais être dangereux, dit-il, le sourire en coin. Indépendamment de l’adversaire, indépendamment du fait de commencer ou pas le match.»

Un autre jour de gloire?

Ce lundi soir serait jour de gloire pour lui, un autre après l’Euro, qu’il le mériterait sans doute plus que d’autres encore. S’il devait ne pas être le sauveur providentiel, il ne faudrait pas lui en vouloir, parce qu’il aura tout donné pour l’être. Ça, c’est sûr. Malgré la pression.

«Il faut rester concentré sur son boulot ce soir, prévient-il. Sans vouloir trop en faire. Il faut être prêt, tout le temps, à chaque instant, à chaque occasion. On se connaît tous, on sait ce qu’on doit faire, il y a des automatismes.» Le reste se jouera sur le terrain, ce soir. Avec un Mario Gavranovic gonflé à bloc, comme toute l’équipe de Suisse.

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