Affaire KhashoggiDépôt de plainte pour complicité de torture contre MBS, en visite en France
Deux ONG ont porté plainte contre le prince héritier saoudien, qui doit dîner jeudi soir avec Emmanuel Macron, pour son implication dans l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi en 2018.
Une plainte pour complicité de torture et de disparition forcée en lien avec l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi a été déposée jeudi, à Paris, contre le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane (MBS), en visite en France, ont annoncé deux ONG et leur avocat français. La plainte avec constitution de partie civile a été déposée auprès du doyen des juges d’instruction du tribunal judiciaire de Paris, jeudi matin, a précisé l’avocat des ONG, Me Henri Thulliez. Cette procédure entraîne l’ouverture quasi systématique d’une information judiciaire et la désignation d’un juge d’instruction.
Cette plainte de 42 pages affirme que MBS «est un complice de la torture et de la disparition forcée de Khashoggi au consulat saoudien à Istanbul, le 2 octobre 2018», et qu’il «ne bénéficie pas de l’immunité de poursuite car, en tant que prince héritier, il n’est pas chef d’État», précisent Democracy for the Arab World Now (DAWN), fondée par le journaliste saoudien, et Trial International dans un communiqué.
Compétence universelle
«En application de la compétence universelle rendue possible par les conventions contre la torture et les disparitions forcées, les juridictions françaises sont compétentes pour ouvrir une information judiciaire à l’encontre de tout suspect qui se trouve sur le territoire national au moment où la plainte est déposée», quel que soit le lieu où les crimes dénoncés ont été commis, a ajouté l’avocat.
Dans un premier temps, la justice française doit s’assurer de la compétence de la France, de l’imputabilité des faits à la personne visée et de l’existence ou non d’une immunité pour cette dernière, avant d’engager des investigations.
Emmanuel Macron doit recevoir MBS, dirigeant de facto du royaume saoudien, jeudi pour un «dîner de travail» prévu à 20 h 30 à l’Élysée. La présence en France du prince héritier, dont c’est la première visite en Europe depuis l’assassinat de Jamal Khashoggi, a suscité la vive colère des défenseurs des droits de l’homme. «MBS peut apparemment compter sur Emmanuel Macron pour le réhabiliter sur la scène internationale malgré le meurtre atroce du journaliste Jamal Khashoggi, la répression impitoyable des autorités saoudiennes contre toute critique, crimes de guerre au Yémen», a taclé sur Twitter la directrice pour la France de Human Rights Watch, Bénédicte Jeannerod.
Assassiné et démembré au consulat saoudien d’Istanbul
Chroniqueur du «Washington Post», critique du pouvoir saoudien, le journaliste a été tué et démembré le 2 octobre 2018, dans les locaux du consulat saoudien à Istanbul, où il était venu chercher des papiers nécessaires à son mariage. Les services de renseignement américains avaient pointé la responsabilité de Mohammed ben Salmane dans l’assassinat du journaliste. Le prince héritier, lui, dément avoir ordonné l’assassinat, même s’il dit en porter la responsabilité en tant que dirigeant.