Attaque à Annecy (F)Abdalmasih H., réfugié syrien en errance, auteur de la violence ultime
Le lendemain de l’attaque de très jeunes enfants dans un parc à Annecy (F), les raisons qui ont poussé l’assaillant à commettre l’impensable sont encore floues.
Geste de désespoir, crise de folie? Difficile d’expliquer pourquoi Abdalmasih H., un réfugié syrien en errance en France, après plusieurs années de stabilité en Suède, a brusquement attaqué au couteau six personnes, dont quatre enfants en bas âge, jeudi matin dans un parc d’Annecy (est de la France). L’homme né en 1991 est arrivé en octobre dernier dans la paisible ville de Haute-Savoie, au cœur des Alpes. Il n’était connu d’aucun service de renseignement et sans antécédent psychiatrique connu.
Depuis son interpellation, il n’a pas donné d’explication sur son geste et a fait «obstruction à la garde à vue», notamment en se «roulant par terre», selon une source proche de l’enquête. Il devait être soumis dans la journée à un examen psychiatrique qui déterminera s’il y a eu ou pas altération du discernement. De lui, on sait qu’il est chrétien, qu’il a un enfant de trois ans et qu’il a divorcé l’an dernier, après plusieurs années de vie de famille. Son ex-épouse est une Syrienne réfugiée comme lui qui a obtenu la nationalité suédoise.
Fuite de la Syrie en 2011
Selon sa mère, jointe par l’AFP aux États-Unis où elle vit depuis dix ans, il avait fait son service militaire obligatoire en Syrie, avant de fuir son pays en 2011 à cause de la guerre civile, puis avait réussi à gagner la Suède via la Turquie puis la Grèce.
«Nous nous sommes rencontrés en Turquie, nous sommes tombés amoureux (…) Après deux ans, nous nous sommes mariés, mais il n’a pas pu obtenir la nationalité suédoise, donc il a décidé de quitter le pays. Nous nous sommes séparés parce que je ne voulais pas quitter la Suède», a confié son ex-épouse, jointe par l’AFP à Trollhättan (sud-ouest de la Suède).
Selon les autorités françaises, il avait obtenu le statut de réfugié en Suède, le 26 avril 2003, et voyageait en situation régulière. Raison pour laquelle la police l’a laissé repartir après l’avoir contrôlé dimanche dernier parce qu’il se lavait dans les eaux du lac d’Annecy, selon le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin. L’Autorité suédoise des Migrations a pour sa part indiqué qu’il avait reçu un permis de séjour en 2013, mais a plusieurs fois échoué à obtenir la nationalité suédoise depuis 2017.
Sans domicile fixe
L’homme avait déposé des demandes d’asile en Suisse, Italie et France, où son dossier a été rejeté tout récemment. «Notification lui a été faite qu’il ne pouvait pas avoir l’asile en France, car il l’avait en Suède», a détaillé jeudi le ministre français de l’Intérieur. Lors d’un rare échange avec son ex-femme après son départ, Abdalmasih H. lui a expliqué qu’il vivait «dans une église» en France. C’était il y a quatre mois.
À Annecy, il était sans domicile fixe. «Il bénéficiait de l’allocation pour demandeur d’asile depuis qu’il s’était enregistré comme tel» mais, faute de place, «n’a jamais été pris en charge au titre de l’hébergement dans le dispositif national d’accueil», a indiqué le directeur général de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii), Didier Leschi.
Deux mois sur un banc
Un employé des pontons du lac d’Annecy a confié au quotidien régional «Le Dauphiné Libéré» l’avoir vu sur un banc au bord du lac, «chaque jour du matin au soir, qu’il fasse beau ou mauvais», depuis environ deux mois. Il décrit un homme «qui marmonnait dans sa barbe», sans agressivité apparente.
Selon sa mère, Abdalmasih H. souffrait d’une «grave dépression» et ses échecs pour obtenir un passeport suédois ont aggravé son état. «C’est ma belle-fille qui m’a dit ça», a-t-elle précisé à l’AFP. «Elle disait qu’il n’était jamais bien, toujours déprimé, avec des idées noires, il ne voulait pas quitter la maison, il ne voulait pas travailler...» «Il a demandé la nationalité, il a eu un rejet», a priori parce qu’il a fait l’armée syrienne, a-t-elle dit: «Ça l’a probablement rendu fou».
Au moment du drame, il n’était «ni sous l’emprise de stupéfiant ni sous l’emprise d’alcool», selon la procureure d’Annecy Line Bonnet-Mathis. À ce stade, son geste reste sans «mobile terroriste apparent», a-t-elle dit jeudi, sans exclure «un acte insensé».
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