Afghanistan - Menace terroriste «imminente»: appels à quitter l’aéroport de Kaboul

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AfghanistanMenace terroriste «imminente»: appels à quitter l’aéroport de Kaboul

Washington, Londres et Canberra appellent leurs ressortissants à se tenir éloignés de l’aéroport de Kaboul en raison de menaces terroristes.

Des réfugiés afghans ayant réussi à fuir Kaboul ont atterri à Madrid, le 25 août 2021.

Des réfugiés afghans ayant réussi à fuir Kaboul ont atterri à Madrid, le 25 août 2021.

AFP

Plusieurs pays occidentaux ont appelé leurs ressortissants à s’éloigner au plus vite de l’aéroport de Kaboul en raison de menaces «terroristes», alors que des milliers de personnes s’y massent toujours dans l’espoir de fuir le pays tombé aux mains des talibans.

Alors que la date butoir fixée par les États-Unis pour leur retrait d’Afghanistan, le 31 août, approche, plusieurs pays, dont la France et les Pays-Bas, ont annoncé jeudi qu’ils allaient bientôt mettre fin à leurs vols d’évacuation.

Les États-Unis, l’Australie et le Royaume-Uni ont émis simultanément des mises en garde très précises et presque identiques dans la nuit de mercredi à jeudi. Les personnes «se trouvant actuellement aux entrées Abbey, Est et Nord devraient partir immédiatement», a indiqué le département d’État américain, invoquant des «menaces sécuritaires». La diplomatie australienne a pour sa part mis en garde contre une «menace très élevée d’attentat terroriste».

Menace terroriste «imminente» annoncée par un ministre britannique

Le secrétaire d’État britannique chargé des forces armées James Heappey a indiqué jeudi matin que la menace terroriste qui a poussé Londres à déconseiller dans la nuit à ses ressortissants de rejoindre l’aéroport de Kaboul était «très sérieuse» et «imminente».

«Les informations recueillies au cours de la semaine sont de plus en plus sérieuses: elles font état d’une menace imminente et grave pour la vie», a indiqué M. Heappey sur Times Radio, «Il s’agit d’une menace très sérieuse, très imminente». Le Royaume-Uni a déconseillé tard mercredi soir à ses ressortissants de se rendre à l’aéroport de Kaboul pour y être évacués d’Afghanistan, les mettant en garde contre des risques élevés d’«attaque terroriste».

«Ne vous rendez pas à l’aéroport international Hamid Karzai de Kaboul», a écrit le Ministère des affaires étrangères et du Commonwealth sur son site internet.

Les informations recueillies au cours de la semaine sont de plus en plus sérieuses: elles font état d’une menace imminente et grave pour la vie.

James Heappey, secrétaire d’État britannique chargé des forces armées

«Il y a une menace élevée et permanente d’attaque terroriste», soulignait le ministère, alors que des milliers d’Afghans sont toujours massés aux portes du site de l’aéroport dans l’espoir de fuir le pays tombé aux mains des talibans. «Je conseille (aux ressortissants britanniques) de suivre les instructions du Ministère des affaires étrangères et de se mettre à l’abri», a ajouté, jeudi matin, James Heappey. «Et s’ils venaient à rentrer au Royaume-Uni, je crains qu’ils ne deviennent une cible».

Le secrétaire d’État britannique a expliqué ne pas pouvoir «donner de détails sur la menace exacte», mais a assuré que les gouvernements américain et australien disposaient, eux aussi, «de renseignements très crédibles» au sujet d’une «attaque mortelle très imminente». Le ministre australien de la Défense, Andrew Hastie, a expliqué que «le risque de la présence d’un kamikaze est si élevé que la menace augmente», dans une interview avec la radio australienne 6PR.

Pour autant, les évacuations ne sont pas suspendues et les personnes déjà présentes dans le centre d’évacuation continueront d’être rapatriées vers le Royaume-Uni. «Des vols partiront aujourd’hui: 1988 personnes sont parties au cours des dernières 24 heures sur huit vols de la Royal Air Force. Onze autres vols sont prévus aujourd’hui», a détaillé M. Heappey, évoquant «un nombre important» d’évacuations prévues pour jeudi.

Des vols partiront aujourd’hui.

James Heappey, secrétaire d’État britannique chargé des forces armées

Selon les derniers chiffres publiés par le Ministère de la défense mercredi soir, le Royaume-Uni a désormais évacué 11’474 personnes d’Afghanistan depuis le 13 août, dont 6946 Afghans. Le député d’opposition travailliste Stephen Kinnock a cependant accusé le gouvernement d’avoir «complètement échoué à faire les préparations nécessaires pour un retrait ordonné» malgré «18 mois pour planifier ça».

Ces avertissements sont intervenus après que le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a assuré que les talibans s’étaient engagés à laisser partir les Américains et les Afghans à risque se trouvant encore dans le pays après la date butoir du 31 août. Il n’a toutefois pas spécifié comment leur départ s’organiserait.

88’000 personnes déjà évacuées

Malgré une situation chaotique, 88’000 personnes ont été évacuées depuis la mise en place du pont aérien le 14 août, à la veille de l’entrée des talibans dans Kaboul et de leur prise du pouvoir.

Plusieurs pays ont plaidé en vain pour une extension du délai au-delà du 31 août, estimant qu’il ne serait pas possible d’évacuer tout le monde d’ici là. D’autant que, pour que le retrait soit effectif ce jour-là, il faudra avoir interrompu les évacuations plus tôt, les États-Unis devant rapatrier leur dispositif militaire.

Interruption des opérations programmée

Le Premier ministre français Jean Castex a annoncé jeudi que la France interromprait ses opérations vendredi soir, une date butoir «imposée par les Américains» selon une source gouvernementale. Les Pays-Bas ont également fait savoir qu’ils mettaient fin à leurs vols d’évacuation depuis Kaboul.

Mercredi soir, la Belgique avait déjà dit mettre un terme à ses opérations afghanes. La Turquie avait quant à elle annoncé le retrait de ses soldats, qui gardaient l’aéroport de Kaboul au côté des militaires américains, abandonnant ainsi sa proposition de continuer à en assurer la sécurité après le retrait des forces étrangères.

La menace de l’État islamique

Lors d’un sommet virtuel mardi avec les autres dirigeants du G7, le président américain Joe Biden avait évoqué déjà un «risque grave et croissant d’attaque» du groupe jihadiste État islamique (EI) à l’aéroport. Sous le nom d’ISKP (État islamique Province du Khorasan), l’EI a revendiqué certaines des attaques les plus meurtrières commises ces dernières années en Afghanistan.

Il a massacré des civils dans des mosquées, des hôpitaux ou des lieux publics, ciblant surtout les musulmans qu’il considère comme hérétiques, en particulier les chiites. Même s’il s’agit de deux groupes sunnites radicaux, l’EI et les talibans sont en concurrence et sont animés par une haine tenace et réciproque.

Un porte-parole des talibans, Zabihullah Mujahid, a accusé mardi les États-Unis et leurs alliés de vider le pays de ses forces vives en évacuant les Afghans qui ont travaillé avec eux, souvent parmi les plus qualifiés. Beaucoup d’entre eux, souvent urbains et éduqués, craignent que les islamistes n’instaurent le même type de régime fondamentaliste et brutal que lorsqu’ils étaient au pouvoir entre 1996 et 2001.

Les femmes et les minorités ethniques inquiètes pour leur sort

Les femmes et les minorités ethniques en particulier s’inquiètent pour leur sort.

«Nous sommes la génération des femmes éduquées, ils (les talibans) ne le supportent pas, ils ne peuvent pas gouverner avec nous, ils vont nous exterminer», a déploré une jeune femme bloquée à Mazar-e-Sharif (Nord), en quête de contacts à l’étranger pour l’aider à fuir.

Le «business de la peur»

Les talibans n’ont pas formé de gouvernement, disant attendre que le dernier soldat étranger ait quitté le pays. Sans lois valables sur tout le territoire, les règles diffèrent d’une région à l’autre. Les islamistes s’efforcent de se présenter sous un jour plus modéré, souvent sans convaincre, en tout cas à Kaboul.

«C’est le business de la peur. Ils n’ont pas d’armée pour contrôler les gens. Mais la peur contrôle tout le monde», observe un jeune banquier de Kaboul.

Ils n’ont pas d’armée pour contrôler les gens. Mais la peur contrôle tout le monde.

Un jeune banquier de Kaboul

Sous le vocable de talibans se regroupent des gens bien différents, note-t-il cependant. «Certains groupes se comportent bien avec la population», mais d’autres n’en font qu’à leur tête, comme ceux qui mangent dans les restaurants sans payer.

Les talibans savent qu’ils doivent s’appuyer sur les structures administratives existantes, n’ayant pas dans leurs rangs l’expertise nécessaire pour gouverner seuls le pays, et notamment relancer une économie dévastée par la guerre et très dépendante de l’aide internationale.

L’Afghane née à bord d’un avion militaire américain nommée Reach, nom de code de l’appareil

Une petite Afghane née à bord d’un avion militaire américain qui évacuait ses parents vers la base de Ramstein, en Allemagne, a été nommée Reach, du nom de code de l’appareil, a révélé mercredi le commandant des forces américaines en Europe, le général Tod Wolters.

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