Un an de guerre en UkrainePrigogine, Simonian et Medvedev: l’envol des faucons russes
La guerre en Ukraine a permis la montée en puissance de trois figures russes partisanes de la ligne dure: le patron du groupe Wagner, la rédactrice en chef de RT et un ex-président. Portraits.
L’un menace régulièrement l’Europe d’apocalypse nucléaire à l’heure du petit-déjeuner. L’autre affirme que Moscou affronte des «cannibales» en Ukraine. Le troisième veut jouer le sort de Bakhmout dans un duel aérien avec le président ukrainien. Autrefois cantonnées à la marge, ces sorties sont désormais banales en Russie, où l’offensive en Ukraine a propulsé les bellicistes sur le devant de la scène. Voici trois figures qui illustrent leur montée en puissance.
Prigogine, le seigneur de guerre
Autrefois discret, le patron du groupe paramilitaire Wagner, Evguéni Prigogine, est devenu l’un des visages les plus connus du conflit, érigeant ses mercenaires en force qu’il assure plus efficace qu’une armée qu’il critique régulièrement.
L’homme d’affaires de 61 ans, natif de Saint-Pétersbourg – comme Vladimir Poutine – où il a commencé en vendant des hot-dogs, a recruté des milliers de détenus pour combattre en Ukraine, en échange d’une amnistie. Contrairement aux généraux russes réputés distants et peu soucieux du bien-être de leurs troupes, il distribue accolades et médailles à ses hommes, qu’il harangue avec gouaille.
Sa visibilité croissante et ses critiques contre l’armée agacent néanmoins à Moscou. Les tensions ont éclaté au grand jour le mois dernier lorsque Wagner et l’état-major ont séparément revendiqué la prise de Soledar, près de Bakhmout. Prigogine s’en est alors pris à «ceux qui cherchent en permanence à voler nos victoires».
Simonian, la guerrière de l’information
La rédactrice en chef du réseau de télévision RT, Margarita Simonian, est devenue l’un des visages de la guerre menée par Moscou sur le terrain de l’information, en parallèle de l’offensive en Ukraine. Cette femme de 42 ans est une habituée des émissions télévisées du soir où elle multiplie les tirades patriotiques pour galvaniser la population ou menacer les adversaires. «Soit nous gagnons, soit tout cela se terminera mal pour l’humanité tout entière», lance-t-elle en mai dernier, brandissant elle aussi le spectre de l’apocalypse nucléaire.
Le conflit, et les sanctions occidentales contre Moscou qui ont suivi, a directement touché Margarita Simonian, avec l’interdiction des antennes de RT dans la plupart des pays occidentaux. Pas de quoi la décontenancer: «À chaque fois qu’ils nous ont interdits, nous avons trouvé d’autres (façons) de continuer à diffuser (…) et relayer notre message.»
En récompense de ses efforts, Vladimir Poutine lui a remis en décembre l’Ordre de l’honneur. Lors de la cérémonie, elle a remercié le président russe de «tuer des cannibales» en Ukraine.
Medvedev, le néoconverti
Autrefois figure plutôt libérale dans l’univers poutinien, l’ex-président Dmitri Medvedev est désormais partisan acharné de la manière dure. Pas une semaine ne s’écoule sans que l’ancien dirigeant de 57 ans, actuellement numéro deux du Conseil de sécurité, ne publie des messages au vitriol sur les réseaux sociaux. «La défaite d’une puissance nucléaire lors d’une guerre conventionnelle peut provoquer une guerre nucléaire», prévient-il ainsi en janvier.
En 2010, il mangeait des burgers avec Barack Obama, alors son homologue américain. Aujourd’hui, il qualifie Joe Biden de «papy gâteux» et l’ensemble des dirigeants occidentaux de «fous». Toujours dans l’outrance, il affirme que Moscou combat en Ukraine «une bande de nazis fous et drogués». «Les gens me demandent souvent pourquoi mes messages sont aussi durs», écrivait-il en juin. «Voici la réponse: je les hais. Ce sont des enfoirés et des dégénérés.»