Football: Pelé: «Le football va au-delà des frontières du sport»

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FootballPelé: «Le football va au-delà des frontières du sport»

Le Matin avait eu le privilège de rencontrer le Roi lors de son passage à Lausanne en 2004. Nous reproduisons ici cet entretien au cours duquel il évoquait notamment les valeurs sociales du jeu qu’il incarnait et… Servette.

Nicolas Jacquier
par
Nicolas Jacquier
Pelé a marqué l’histoire du sport et des hommes.

Pelé a marqué l’histoire du sport et des hommes.

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Chaque passage du roi Pelé en Suisse est un événement. Cela l’est d’autant plus quand celui-ci coïncide avec le vernissage, au Musée olympique, à Lausanne, de l’exposition retraçant les 100 ans de la FIFA. Une exposition qui fait la part belle à celui qui demeure, aujourd’hui encore, son ambassadeur le plus (re)connu. Qui d’autre que Pelé, quatre lettres magiques et un No 10 de légende, a le plus fait rêver les foules du monde entier? De passage au bord du Léman, le Brésilien a dribblé hier sa légende dans l’enceinte du musée. On connaissait le footballeur; on a écouté l’homme.

Edson Arantès Do Nascimento, en tant que légende du football, vous êtes aussi le personnage central de cette exposition. Cela vous fait quoi?

Quelque part, je représente, en les incarnant, tous les joueurs du monde. Sur ces 100 ans, j’en ai quand même vécu la moitié crampons aux pieds, ou presque! S'il est important d’être un footballeur, c’est encore mieux d’être un homme. Car le football va au-delà des frontières du sport. C’est une culture mondiale, le plus bel exemple de démocratie pour la diffusion de valeurs telles que le respect de l’autre. Le pouvoir du jeu est énorme. En Afrique, je me souviens que l’on avait arrêté une guerre pour que l’on puisse jouer avec Santos. Quel autre sport permet ça?

Que pensez-vous de ce besoin des hommes à vouloir toujours désigner le meilleur?

C’est un phénomène naturel. On cherche le meilleur, pas le moins bon. J’espère encore être vivant pour savoir qui seront les meilleurs dans un siècle!

«J’espère que le football rapprochera encore plus les gens au lieu de les diviser. Et il y aura toujours le ballon, et l’amour du jeu»

Pelé

Justement, comment jouera-t-on au football en 2104?

Je ne suis pas Jésus-Christ! Je ne peux pas le deviner. J’espère que le football rapprochera encore plus les gens au lieu de les diviser. Et il y aura toujours le ballon, et l’amour du jeu.

S'il ne fallait retenir qu’une image de toute votre carrière, laquelle choisiriez-vous?

Mais il y en a tellement… Une seule image? Celle du titre de champion du monde en Suède, en 1958. J’avais 17 ans et je n’avais qu’une envie: appeler mon père pour lui annoncer la nouvelle. Hélas, à l’époque, les moyens de communication n’étaient pas ceux d’aujourd’hui. J’avais dû attendre le lendemain avant de m’adresser à ma famille par l’intermédiaire d’une radio. Aujourd’hui, dès qu’un joueur marque, il saute généralement sur son portable pour prévenir sa maman! (Rires)

«Je remercie chaque jour Dieu pour la vie qu’il m’a donnée, pour être devenu qui je suis»

Pelé

Votre plus grande émotion de footballeur?

Le jour où, à Maracana, j’ai marqué mon 1000e but, sur penalty (ndlr: contre Vasco, le 19 novembre 1969). Avant de tirer, je n’en menais pas large. Pour la première fois de ma vie, mon pied a tremblé.

Un regret, un vœu non exaucé?

J’ai regretté de n’avoir pas pu aller plus loin en 1966, à cause d’une blessure. À part ça, je remercie chaque jour Dieu pour la vie qu’il m’a donnée, pour être devenu qui je suis.

L’original du Matin du 18 novembre 2004.

L’original du Matin du 18 novembre 2004. 

Alors que la FIFA vous a élus footballeur du siècle, les internautes du monde entier ont voté en faveur de Maradona. Quel regard portez-vous non sur le joueur, mais sur l’homme Maradona?

Ce qui lui arrive, beaucoup d’artistes l’ont vécu. Il est tombé dans la drogue, alors qu’il aurait pu mener une vie normale. Les paradis artificiels l’ont cassé, en le sortant du bon chemin. La drogue fait hélas partie de la société, elle n’est pas liée au football.

Ces derniers temps malgré tout, on assiste à une multiplication de décès sur la pelouse, pour des problèmes cardiaques…

C’est bien sûr préoccupant, mais cela arrive partout.

«Entre Servette et moi, les contacts existent, ils ont même repris, mais il est encore trop tôt pour définir quel y sera mon rôle exact…»

Pelé

Que pensez-vous de l’attribution de la Coupe du monde 2010 à l'Afrique du Sud?

C’est une juste reconnaissance. Je me suis battu en faveur de ce choix. L’Afrique mérite sa Coupe, cela contribuera au développement de tout le continent.

Au printemps dernier, vous étiez venus encourager et soutenir Servette. Récemment, on a pu lire que vous alliez vous impliquer encore davantage dans ce club. Où en êtes-vous dans ce rapprochement? Serez-vous bientôt «grenat» à 100%?

Je suis venu à Genève pour mon ami Edson (ndlr: Carpegiani, directeur général du SFC). C’est vrai, on va collaborer. Entre Servette et moi, les contacts existent, ils ont même repris, mais il est encore trop tôt pour définir quel y sera mon rôle exact…

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