Irlande du NordLondres reconnaît un «effort» de l’UE mais veut davantage
Le Royaume-Uni et l’Union européenne continuent de chercher un accord sur le protocole nord-irlandais, malgré les «grandes divergences» qui demeurent.
- par
- Fabien Le Floch
Le secrétaire d’État britannique David Frost a reconnu vendredi à Bruxelles l’«effort» fait par l’UE pour atténuer les tensions en Irlande du Nord, attribuées aux difficultés d’approvisionnement post-Brexit, tout en prévenant que de «grandes divergences» demeuraient.
Le responsable britannique chargé du Brexit s’est rendu à Bruxelles pour discuter, pour la première fois, de l’offre de la Commission européenne dévoilée jeudi par le commissaire Maros Sefcovic, son homologue de l’UE. Bruxelles a proposé d’alléger sensiblement les contrôles phytosanitaires et les formalités douanières pour un large éventail de marchandises destinées à la seule consommation de l’Irlande du Nord et qui n’entreront pas dans le marché unique européen.
«Je pense que l’UE a vraiment fait un effort en allant au-delà» de ce qu’elle propose d’habitude, a déclaré à la presse David Frost à son arrivée à la Commission pour un déjeuner avec Maros Sefcovic. «Mais il y a bien sûr de grandes divergences et c’est ce dont nous allons parler aujourd’hui».
Frontière physique
La plus importante est celle du droit de regard de la Cour de justice de l’Union européenne sur la mise en œuvre du protocole nord-irlandais, effectif depuis le 1er janvier 2021, et conclu dans le cadre du traité de Brexit entre Londres et l’UE.
Ce dispositif maintient la province britannique dans l’union douanière et le marché unique européens, pour empêcher le retour d’une frontière physique sur l’île d’Irlande qui risquerait de fragiliser l’accord de paix de 1998. «C’est une offre que les Britanniques auront du mal à refuser», a estimé jeudi Maros Sefcovic, selon des propos rapportés par des sources européennes.
Les deux parties ont indiqué qu’elles ne feraient pas de commentaires sur la rencontre, en signe de respect après le décès du député conservateur britannique David Amess, poignardé alors qu’il tenait une permanence dans sa circonscription.
Source de tension
Les Britanniques veulent renégocier le protocole nord-irlandais, ce que Bruxelles refuse fermement, sans écarter des assouplissements. Ils proposent notamment d’instaurer «un arbitrage international», à la place de la Cour de justice de Luxembourg, pour faire respecter les lois du marché unique en Irlande du Nord, une modification inacceptable aux yeux des Européens.
Londres a menacé à plusieurs reprises de suspendre unilatéralement le protocole nord-irlandais si les difficultés n’étaient pas résolues, au risque d’une crise ouverte avec l’UE et d’une spirale de représailles commerciales.
Si le protocole nord-irlandais est source de tension, ce n’est pas le seul sujet de contentieux depuis le divorce avec Londres: l’octroi jugé insuffisant des licences de pêche par les Britanniques suscite aussi de vives frictions avec la France, qui a menacé jeudi de riposter contre Londres d’ici huit jours.
«Une certaine idée de l’Europe»
La ministre française de la Mer, Annick Girardin, était elle aussi présente vendredi à Bruxelles, où elle s’est entretenue avec Maros Sefcovic et avec la commissaire chargée de la Pêche Virginijus Sinkevicius.
«Cette question des licences de pêche est un cas d’école. Ce qui est en jeu, c’est bien le respect par le Royaume-Uni de sa signature: nous devons tenir, ensemble, pour maintenir une certaine idée de l’Europe!» a déclaré AnnickGirardin, qui était accompagnée de représentants des comités des pêches français.
«Il faut offrir plus de visibilité aux professionnels et je suis heureuse de mieux percevoir, après cet entretien important, que l’Europe nous soutient dans notre démarche», a-t-elle ajouté, citée dans un communiqué de son ministère.