AfriqueLe Mali se retire de l’organisation régionale G5 Sahel
Bamako a annoncé sa décision ce dimanche de quitter le G5 Sahel. La junte accuse le G5 Sahel d’être «instrumentalisé par l’extérieur».
La junte au pouvoir au Mali a annoncé dimanche quitter le G5 Sahel et sa force antidjihadiste, une organisation qu’elle accuse d’être «instrumentalisée» par l’«extérieur» et dont elle est empêchée d’assurer la présidence pour, selon Bamako, mieux l’isoler. Après le départ annoncé du Mali, l’organisation régionale sahélienne est réduite à quatre pays: la Mauritanie, le Tchad, le Burkina et le Niger.
Ce départ isole encore plus le Mali de ses voisins alors que Bamako est depuis le 9 janvier la cible de mesures économiques et diplomatiques des États ouest-africains pour sanctionner l’intention de la junte de se maintenir au pouvoir encore plusieurs années, après deux putschs en août 2020 puis en mai 2021. Il survient aussi après l’annonce début mai par la junte de la fin du traité de coopération de 2014 avec la France, ainsi que des accords de 2013 et 2020 fixant le cadre juridique de la présence de la force antidjihadiste Barkhane et du regroupement de forces spéciales européennes Takuba, initié par la France.
«Perte d’autonomie»
Les relations avec les États occidentaux se détériorent à mesure que le Mali se tourne vers la Russie. La France et ses alliés accusent la junte de s’être assurée les services de la société de sécurité privée russe Wagner, aux agissements controversés, ce que conteste Bamako. «Le gouvernement du Mali décide de se retirer de tous les organes et instances du G5 Sahel, y compris la Force conjointe» antidjihadiste, indique un communiqué du gouvernement de transition, publié dimanche soir. Les relations bilatérales avec les pays du G5 Sahel «restent maintenues», a précisé dimanche soir le ministre malien de l’Administration territoriale, le colonel Abdoulaye Maiga, sur la télévision publique malienne.
À l’origine du courroux de Bamako contre le G5, la conférence des chefs d’États de l’organisation prévue en février 2022 à Bamako et devant «consacrer le début de la présidence malienne du G5». Mais «près d’un trimestre après le terme indiqué», cette conférence «ne s’est toujours pas tenue», dit le communiqué du gouvernement malien. Bamako «rejette fermement l’argument d’un État membre du G5 Sahel qui avance la situation politique interne nationale pour s’opposer à l’exercice par le Mali de la présidence du G5 Sahel», sans citer cet État.
Le G5 Sahel compte environ 5000 militaires
Selon le gouvernement malien, «l’opposition de certains États du G5 Sahel à la présidence du Mali est liée aux manœuvres d’un État extra-régional visant désespérément à isoler le Mali», sans également préciser ce dernier État. Bamako accuse le G5 Sahel de «perte d’autonomie» et d’être victime d’une «instrumentalisation» et d’un «dysfonctionnement grave» de ses organes.
Outre le Mali et le Burkina, le G5 Sahel, composé d’environ 5000 militaires, est formé de la Mauritanie, du Tchad et du Niger. Les coups d’État militaires au Mali et au Burkina Faso, deux des cinq membres de la Force multilatérale antidjihadiste G5 Sahel, mettent à mal sa capacité opérationnelle, a récemment estimé le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, dans un rapport remis le 11 mai au Conseil de sécurité.
«Je suis profondément préoccupé par la détérioration rapide de la situation sécuritaire au Sahel, ainsi que par l’effet potentiellement néfaste que la situation politique incertaine au Mali, au Burkina Faso et au-delà aura sur les efforts visant à rendre plus opérationnelle la Force conjointe G5 Sahel», avait-il dit dans ce document obtenu par l’AFP. Les cinq pays du G5 Sahel avaient créé en 2014 cette organisation puis lancé en 2017 sa force militaire alors que l’étau des djihadistes se resserrait autour de ces États, aux armées sous-équipées.
Le Mali est le théâtre depuis 2012 d’opérations de groupes djihadistes liés à Al-Qaïda et à l’organisation État islamique, ainsi qu’à des violences de toutes sortes perpétrées par des milices autoproclamées d’autodéfense et des bandits. Ces violences, parties du nord en 2012, se sont propagées au centre, puis au Burkina Faso et au Niger voisins. Elles ont fait des milliers de morts civils et militaires ainsi que des centaines de milliers de déplacés, malgré le déploiement de forces onusiennes, françaises et africaines.