Salman Rushdie: «Mon agresseur est un idiot»

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ConfidencesSalman Rushdie: «Mon agresseur est un idiot»

Le romancier, attaqué et grièvement blessé le 12 août dernier aux Etats-Unis, a accordé un premier entretien au «New Yorker».

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Salman Rushdie a publié ce selfie sur son compte Twitter: on peut constater la cicatrice sur sa joue droite et un verre noir, à l’oeil droit, équiper ses lunettes.

Salman Rushdie a publié ce selfie sur son compte Twitter: on peut constater la cicatrice sur sa joue droite et un verre noir, à l’oeil droit, équiper ses lunettes.

Twitter/Salman Rushdie

Pour la première fois, depuis qu’il a failli mourir dans une attaque au couteau aux Etats-Unis l’été dernier, l’écrivain britannique Salman Rushdie confie avoir beaucoup de mal à écrire. Et souffrir de stress post-traumatique.

Le célèbre romancier d’origine indienne, naturalisé américain et qui vit à New York, s’exprime dans un long article qui a été publié lundi par le journal «The New Yorker», à la veille de la sortie aux Etats-Unis de son dernier roman, «Victory City», le «récit épique d’une femme» au 14e siècle.

Photo spectaculaire

Ses confidences exclusives sont titrées «Le défi de Salman Rushdie» et accompagnées d’une interview audio d’une heure et d’une sombre photo en noir et blanc de l’intellectuel de 75 ans, le visage marqué et portant des lunettes, avec un verre noir à l’oeil droit.

Devant ce cliché qu’il a jugé sur Twitter «spectaculaire et puissant», Rushdie en a publié un autre, en couleur, le montrant avec le même verre noir de lunettes, mais l’air plus apaisé.

Perte de la vue d’un oeil

Son agent littéraire Andrew Wylie avait révélé en octobre qu’il avait perdu la vue d’un oeil et l’usage d’une main. Alors que «Victory City» a été achevé avant son agression du 12 août 2022 dans le nord des Etats-Unis, Salman Rushdie dit avoir «trouvé très, très difficile d’écrire».

«Je m’assois pour écrire et il ne se passe rien: j’écris, mais c’est un mélange de vide et d’âneries, des choses que je rédige et que j’efface le lendemain», confie l’écrivain qui vit depuis 1989 sous la menace de mort d’une fatwa émise par l’Iran, après la publication de son livre «Les Versets sataniques».

Stress post-traumatique

«Je ne suis pas encore tiré d’affaire», souffle-t-il en prévenant son intervieweur: «Le trouble de stress post-traumatique existe, vous savez». Même «si sa guérison progresse», avait dit la semaine dernière son agent au journal «The Guardian», Rushdie ne fera aucune promotion publique pour ce 15e roman, qui sort mardi aux Etats-Unis et jeudi au Royaume-Uni.

Le livre «Victory City» raconte l’épopée de Pampa Kampana, une jeune orpheline dotée de pouvoirs magiques par une déesse, qui va créer la ville de Bisnaga (littéralement Victory City). Avec pour mission de «donner aux femmes une place égale dans un monde patriarcal», selon l’éditeur Penguin Random House, son héroïne et poète, qui vivra près de 250 ans, sera aussi le témoin de «l’orgueil de ceux qui sont au pouvoir», assistera à l’essor puis à la destruction de Bisnaga et subira l’exil.

Les mots vainqueurs

Né à Bombay en juin 1947, juste avant la partition de l’Inde, dans une famille bourgeoise musulmane laïque, Rushdie publie son premier roman «Grimus» en 1975 et devient une célébrité mondiale dans les années 1980 avec «Les Enfants de minuit» qui lui vaut le Booker Prize au Royaume-Uni. Malgré la fatwa iranienne jamais levée, Rushdie se sentait plus libre et avait repris une vie en société ces dernières années à New York.

Le 12 août dernier, il avait été invité à une conférence littéraire à Chautauqua, petite ville culturelle et bucolique prisée des retraités dans le nord-ouest de l’Etat de New York, près du Grand Lac Erié. Au moment de prendre la parole, un jeune Américain d’origine libanaise soupçonné d’être sympathisant de l’Iran chiite s’était jeté sur lui, armé d’un couteau, et l’avait poignardé une dizaine de fois.

«Je ne vais pas si mal»

L’agresseur de Rushdie – que l’écrivain traite d’«idiot» dans le «New Yorker» – avait été interviewé en prison par le journal «The New York Post». Un entretien que l’écrivain a lu: «Je ne sais pas ce que je pense de mon agresseur, parce que je ne le connais pas. Tout ce que j'ai vu de lui, c'est son interview idiote dans le ‘New York Post’, dit-il. C’est ce que seul un idiot ferait. Je sais que le procès est encore loin. Cela pourrait ne pas arriver avant la fin de l'année prochaine. Je suppose que j'en saurai plus sur lui alors».

«J’ai connu mieux mais vu ce qui c’est passé, je ne vais pas si mal», assure aujourd’hui Salman Rushdie, ajoutant toutefois «tenir son agresseur pour responsable» de son état de santé.

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