COP26 – Adèle Thorens: «Il nous reste moins de dix ans pour redresser la barre»

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COP26Adèle Thorens: «Il nous reste moins de dix ans pour redresser la barre»

Pour l’élue vaudoise, si l’on continue ainsi, la température de la planète va augmenter de 2,7 degrés. Un scénario «catastrophique» pour la planète. Et pour la Suisse, deux fois plus impactée.

Eric Felley
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Eric Felley
Pour la conseillère aux États vaudoise Adèle Thorens, s’il y a des alternatives, il faut «exclure l’arrivée sur le marché de nouveaux produits liés aux énergies fossiles».

Pour la conseillère aux États vaudoise Adèle Thorens, s’il y a des alternatives, il faut «exclure l’arrivée sur le marché de nouveaux produits liés aux énergies fossiles».

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«Je suis quotidiennement et avec grande attention l’actualité environnementale, suisse et internationale. La COP26 ne modifiera pas mes habitudes en la matière et je vais suivre l’ensemble des discussions». La conseillère aux États vaudoise Adèle Thorens (Verts/VD) connaît le dossier du climat sur le bout de ses doigts. La conférence, qui débute dimanche à Glasgow, est pour elle une étape de plus dans cette longue course mondiale contre la montre afin de réduire les gaz à effets de serre. Son propos oscille entre pessimisme et volontarisme.

Quelle est la responsabilité de la Suisse à cette COP26?

La Suisse est touchée de plein fouet par le réchauffement climatique. Les températures ont augmenté deux fois plus vite chez nous qu’en moyenne mondiale. Cela nous rend vulnérables et doit nous encourager à jouer un rôle moteur à la COP26, dans notre propre intérêt.

Que répondez-vous à ceux qui disent que la Suisse ne représente qu’un millième de la population mondiale et ne peut pas faire grand-chose?

La Suisse est certes un petit pays, mais les émissions par personne y sont importantes, tout comme celles liées à ses importations. L’impact climatique de notre place financière est aussi considérable. Enfin, le fait que nous soyons un pays riche et innovant constitue une responsabilité supplémentaire: nous avons les moyens, tant financiers que technologiques, de jouer un rôle exemplaire et d’appuyer les efforts de pays moins privilégiés.

Qu’espérez-vous comme résultat à Glasgow?

Les États doivent augmenter drastiquement leurs objectifs de réduction des émissions. En effet, ceux qui ont été annoncés jusqu’ici sont totalement insuffisants, y compris en Suisse. Ils devraient être sept fois plus ambitieux pour limiter le réchauffement à 1,5 degré, quatre fois plus si l’on se contentait d’une limite à 2 degrés. Nous nous dirigeons vers un réchauffement de 2,7 degrés, c’est-à-dire vers une catastrophe climatique sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Et il nous reste moins de dix ans pour redresser la barre.

La Suisse elle-même a échoué à respecter ses objectifs climatiques pour 2020

Adèle Thorens

À vous entendre, c’est plutôt mal parti?

Il faudra surtout que les États prennent les mesures nécessaires pour mettre en œuvre ces engagements. Cela n’a pas été fait jusqu’ici: la Suisse elle-même a échoué à respecter ses objectifs climatiques pour 2020. Seuls les changements de technologies et de comportements, sur le terrain, réduisent effectivement nos émissions. Cela exige des investissements publics et privés, mais aussi d’avoir le courage, dans un délai raisonnable et lorsque les alternatives existent, d’exclure l’arrivée sur le marché de nouveaux produits liés aux énergies fossiles.

Quels sont les principaux obstacles à un nouvel accord international?

Pour justifier l’inaction, on prétend souvent que tel ou tel autre pays devrait agir d’abord ou en faire plus, avant que nous bougions nous-mêmes. C’est un cercle vicieux. La justice climatique est nécessaire. Tous les pays doivent s’engager et faire leur part. Les engagements doivent en outre être équitables. Dans ce contexte, il est essentiel d’atteindre l’objectif des 100 milliards de dollars annuels d’aide des pays riches et gros émetteurs de CO2 en faveur des pays pauvres, particulièrement menacés par l’impact du réchauffement.

Investir dans les technologies propres et les pratiques respectueuses du climat est la meilleure option, y compris financièrement.

Adèle Thorens

100 milliards? Cela paraît énorme?

Il faut arrêter de penser que c’est le fait d’agir qui est complexe et coûteux. Ce préjugé, pourtant contredit en 2006 déjà par le rapport de l’économiste Nicholas Stern, reste un obstacle important. C’est l’inaction qui est chère et problématique. L’alternative n’est pas entre la situation actuelle et des investissements dans des mesures de réduction de nos émissions. L’alternative est entre une catastrophe climatique aux coûts humains et financiers de plus en plus considérables et des investissements dans des mesures de réduction de nos émissions. Investir dans les technologies propres et les pratiques respectueuses du climat est la meilleure option, y compris financièrement.

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