La Neuveville: le procès de la triple électrocution a débuté

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Drame de La NeuvevilleLe procès de la triple électrocution a débuté

Une installation électrique défaillante dans le port de La Neuveville est à l’origine d’un drame qui s’est déroulé en 2017. Et qui trouvera son épilogue au tribunal.

Vincent Donzé
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Vincent Donzé

Six ans après une triple électrocution survenue dans le port de plaisance de La Neuveville, au bord du lac de Bienne, une défectuosité dans l’alimentation électrique est au cœur d’un procès qui s’est ouvert ce matin à Moutier devant le Tribunal régional Jura bernois – Seeland, présidé par Maryvonne Pic Jeandupeux.

Deux femmes et une chienne sont mortes le 15 mai 2017. Sans doute la chienne Makani a-t-elle basculé dans l’eau après avoir touché la balustrade électrifiée en remuant la queue. Claire Schläfli a sauté dans l’eau pour lui porter secours, puis une résidente australienne a été électrocutée à son tour en voulant les aider.

Toujours autant triste

«Je suis toujours aussi triste et en colère pour quelque chose qui dans notre pays n’aurait jamais dû arriver», a déclaré la maman de Claire, en décrivant son «impression d’être dans le vide». Christiane Schläfli attend du procès des condamnations, mais aussi «des excuses jamais entendues».

La mort de Claire n’est pas due selon sa maman à «la faute à pas de chance», mais à «des fautes professionnelles». Des «graves manquements», selon les mots de son mari. «Mon bien-être, il y a un moment que je l’ai perdu», a déclaré Robert Schläfli, lui qui tutoyait tous les prévenus avant le drame.

Conclusions civiles

Ils sont huit, ces prévenus qui risquent jusqu’à deux ans de prison: quatre monteurs-électriciens, trois électriciens et un technicien, tous accusés d’homicides par négligence pour la mort de Claire Schläfli et de Miranda Korn, la chienne Makani n’ayant pas de statut juridique. Les plaignants sont les parents de Claire, qui demandent aux prévenus le remboursement de leurs frais, après le règlement des prétentions civiles.

Le procureur Raphaël Arn a constaté que le 15 mai 2017, vers 11h15, Claire Schläfli, sa chienne Makani et Miranda Korn ont été électrocutées alors qu’elles se trouvaient au niveau des barrières situées à l’ouest du port Jean-Jacques Rousseau, à La Neuveville.

Rapports de contrôle

Ces électrocutions sont attribuées à un défaut constaté sur une installation électrique dépourvue de mise à terre et prolongée en 2016, une extension validée par trois prévenus qui ont attesté de sa conformité dans des rapports de contrôle. Problème: le câble menant à une prise passait dans un tube de la barrière et en bougeant, ce tube a fait bouger le câble installé à l’intérieur.

Le câble électrique n’était pas protégé par un manchon à sa sortie du tube. Le frottement contre le métal a cisaillé sa gaine et son isolation, si bien que l’électricité s’est propagée dans le tube, puis dans un ponton rouillé qui entrait dans le lac, avec un risque mortel «en cas de contact par un être humain», selon l’acte d’accusation.

Une décharge mortelle

Ce n’est pas un être humain, mais un chien qui a été électrocuté en premier, le 15 mai 2017. En tentant de le sauver, Claire a été touchée à son tour par une décharge électrique mortelle. Pour lui porter secours, Miranda a sauté à l’eau.

«Le disjoncteur n’a pas déclenché l’installation électrique», a constaté le procureur. Le disjoncteur initial sautait trop fréquemment et suite à des plaintes de plaisanciers, il a été remplacé trois ans avant le drame par deux employés communaux qui n’étaient pas habilités à faire ce travail.

Contraire aux règles

L’enquête a montré qu’à l’époque, il s’était instauré au sein de la commune une pratique contraire aux règles: les chefs de département pensaient être autorisés à donner des ordres à l’ensemble du personnel communal. Mais aucun politicien n’a été inculpé, alors que selon Robert Schläfli, dans ce drame, «les détonateurs sont des politiciens qui, en ce moment, sont à l’abri».

Dans l’acte d’accusation, les mots sont durs. «Ces morts sont en lien de causalité directe avec les manquements du prévenu», est-il indiqué à l’adresse d’un monteur-électricien. «Moi qui suis infirmière, je n’irais pas faire de la chirurgie», a indiqué la maman de Claire à l’adresse des prévenus. Le jugement sera rendu le 6 décembre, avec des enjeux moraux et financiers, au terme d’une procédure qui a duré six ans et coûté 153 000 francs.

Avant l’audience de ce matin, les plaignants ont distribué un message illustré par une photo de Claire et Makani intitulé «Merci à toutes et tous pour votre soutien et vos gentils messages». En marge d’un texte relatant la vie de leur fille et «son incroyable vision de la vie», les parents citent une chanson de Sting: «Tant que la pluie tombera, comme des larmes d’étoiles, Pour toujours elle nous rappellera à quel point nous sommes fragiles».

Conductrice de chien militaire et membre de Redog Suisse, Claire est morte à 24 ans. Ses parents qui n’ont pas d’avocat diront le fond de leur pensée lors d’une plaidoirie, en présence des huit prévenus, employés communaux et privés.

Geste incroyable

Personne n’est à Moutier pour Miranda, morte à 53 ans: ses enfants vivent en Australie, un pays où cette Hollandaise s’était établie avant de poser ses valises à Port, dans la banlieue biennoise. La maman de Claire a salué cette femme «qui a fait le geste incroyable de vouloir sauver notre fille».

À La Neuveville, un crédit a été voté pour assainir deux stations électriques, dont celle qui alimentait les deux prises incriminées. Selon les renseignements pris par la présidente du tribunal, toutes les mesures ont été prises pour assurer durablement la sécurité.

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