Émeutes en FranceLes violences retombent, le gouvernement à l’heure du bilan
La désescalade semble se confirmer. La soirée de lundi a été calme, à la veille d’une reprise en main politique où le Président doit recevoir les maires de communes «victimes d’exactions».
Avec cette consultation des élus locaux, Emmanuel Macron «souhaite débuter un travail minutieux et de plus long terme pour comprendre en profondeur les raisons qui ont conduit à ces événements», a indiqué l’Élysée.
Dans la nuit, le chef de l'État a rendu hommage dans un tweet aux policiers, gendarmes et sapeurs-pompiers, leur disant «merci pour (leur) mobilisation exceptionnelle ces dernières nuits».
La journée de lundi a été marquée par de nombreux rassemblements à travers la France en soutien au maire de L’Haÿ-les-Roses Vincent Jeanbrun, au lendemain de l’attaque à la voiture-bélier contre son domicile dans cette ville du Val-de-Marne.
Premier déplacement depuis le début de la crise, Emmanuel Macron s’est rendu en milieu de soirée avec son ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin à la caserne Bessières, dans le XVIIe arrondissement de la capitale, qui accueille les effectifs de la BAC (Brigade anti-criminalité) de nuit et de compagnies départementales d’intervention.
Dans la foulée, après minuit, il est allé à la préfecture de police de Paris, pour de nouveaux échanges, a ensuite précisé l’Élysée. L’exécutif a demandé de maintenir «une présence massive» sur «le terrain», «pour conforter le retour au calme et à l’ordre», a fait savoir son entourage à l’AFP.
Le dispositif nocturne des jours précédents, soit un effectif maximal de 45’000 policiers et gendarmes, a ainsi été maintenu dans la nuit de lundi à mardi, sans incidents majeurs recensés dans la soirée. Le nombre d’interpellations en Île-de-France a baissé lundi soir, comme lors des nuits précédentes: 17 à 23 h 30 contre une quarantaine la veille et plus de 400 jeudi dernier.
«J’ai pas réfléchi»
Ces émeutes nocturnes ont éclaté le 27 juin, jour de la mort de Nahel, un adolescent de 17 ans tué d’un tir à bout portant par un motard de la police, à la suite d’un refus d’obtempérer à Nanterre. La scène a été capturée par une vidéo amateur.
Selon les chiffres du ministère de la Justice, depuis vendredi 3915 personnes ont été interpellées (dont 1244 mineurs) donnant lieu à 374 comparutions immédiates.
À Strasbourg, des peines de prison ferme allant de quatre à dix mois, ont été prononcées lors de ces audiences. «C’était un vol opportuniste: c’était cassé, j’ai pas réfléchi, je suis entré», a expliqué au tribunal Rayane, 26 ans, ressorti d’un magasin Zara «avec un gros paquet de vêtements sous le bras».
Les principales organisations patronales françaises ont de leur côté appelé lundi le gouvernement à mettre en place des mesures de soutien en faveur des commerçants et entrepreneurs affectés, notamment un «fonds de secours» pour «ceux qui ont tout perdu».
Les dégâts sont estimés par le patron des patrons, Geoffroy Roux de Bézieux, à 1 milliard d’euros. «Sans compter les dégâts au niveau du tourisme. Les vidéos des émeutes, qui ont circulé dans le monde, dégradent l’image de la France», a déclaré le dirigeant du Medef au journal «Le Parisien».
Et en Île-de-France, l’heure est aussi au premier bilan: les émeutes ont causé «au moins 20 millions d’euros de dégâts» pour les transports publics, des bus brûlés au mobilier urbain cassé, selon une première estimation d’Ile-de-France Mobilités (IDFM).
Cagnotte polémique
Du côté de l’enquête, le troisième occupant de la voiture conduite par Nahel, 17 ans, dont la mort causée par le tir d’un policier a suscité une vague de violences urbaines dans tout le pays, a été entendu lundi par l’Inspection générale de la police nationale (IGPN), a appris l’AFP de source proche du dossier.
Recherché depuis les faits, cet homme s’est présenté de lui-même à 11 h devant la «police des polices». Le policier, auteur du tir qui a tué Nahel, a lui été mis en examen pour homicide volontaire et est toujours écroué.
Une cagnotte de soutien à l’agent, a dépassé lundi sur internet le million d’euros, soulevant l’indignation d’élus de gauche. La Première ministre a estimé qu’elle ne «contribue pas à l’apaisement» et ajouté que ce serait à la justice de se prononcer «le cas échéant» sur la légalité de cette caisse de solidarité.